La protection du droit au respect de la vie privée et familiale dans la procédure du mandat d’arrêt européen : la chambre criminelle aurait-elle délié l’outre des vents contraires ?

Publié le 25/10/2016

En distinguant l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme comme un motif de non-exécution du mandat d’arrêt européen, notamment pour permettre la mise en œuvre en France d’une peine privative de liberté étrangère, la chambre criminelle de la Cour de cassation malmène la législation issue de l’Union européenne. Une interprétation extensive, et une application incertaine, des instruments de coopération judiciaire pénale qui révèlent une approche tourmentée de ce droit européen.

Cass. crim., 12 avr. 2016, no 16-82175, PB

1. Instruments européens de coopération judiciaire et protection des droits fondamentaux. Naviguer en coopération judiciaire pénale sur les océans européens peut être périlleux pour les autorités judiciaires nationales. Trouver le bon cap lorsqu’il s’agit d’appliquer, dans les ordres juridiques nationaux, le droit pénal de l’Union européenne fondé sur le principe de reconnaissance mutuelle1 n’est pas toujours évident2. La mise en œuvre du mandat d’arrêt européen3 est révélatrice des difficultés rencontrées par les plus hautes juridictions des États membres qui doivent manier les mesures répressives élaborées par l’Union européenne et les approches internes de la protection des droits et libertés fondamentaux4, elles-mêmes façonnées par la Convention européenne des droits de l’Homme (Conv. EDH)5. Dans sa jurisprudence la plus récente, et particulièrement l’arrêt rendu le 12 avril 2016 publié au Bulletin6, la chambre criminelle de la Cour de cassation se prononce en faveur du refus d’exécution des mandats d’arrêt européens pour atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de l’individu. Une solution, rendue au visa de l’article 8 de la Conv. EDH, articulée autour des conditions d’application de l’article 695-24, 2° du Code de procédure pénale (CPP), qui repose sur une interprétation et une mise en œuvre des motifs de non-exécution des mandats d’arrêt européens peu orientées vers l’Espace pénal européen.

2. L’article 695-24, 2° du CPP au cœur de la tempête. L’article 695-24, 2° du CPP prévoit que « l’exécution du mandat d’arrêt européen peut être refusée si la personne recherchée pour l’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privatives de liberté est de nationalité française ou réside régulièrement de façon ininterrompue depuis au moins cinq ans sur le territoire national et que la décision de condamnation est exécutoire sur le territoire français en application de l’article 728-31 du Code de procédure pénale ». La version en vigueur de l’article 695-24, 2° est issue de la loi du 5 août 20137 qui d’une part, transpose la décision-cadre de 2008 relative à la reconnaissance mutuelle des décisions étrangères prononçant des peines privatives de liberté8 et, d’autre part, modifie le texte initial pour tenir compte de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE)9. Le 12 avril 2016, la Cour de cassation française statue sur deux pourvois très similaires10 concernant, chacun, un individu localisé en France, visé par un mandat d’arrêt européen, qui demande l’application du motif de refus facultatif prévu à l’article 695-24, 2° du CPP afin de pouvoir exécuter sur le territoire français la peine privative de liberté prononcée à l’étranger et à la base du mandat d’arrêt européen. Dans les deux affaires, la chambre de l’instruction ne retient pas ce motif de refus considérant que les conditions d’application de l’article 694-24, 2° du CPP ne sont pas réunies. Or, dans un cas, la Cour de cassation rejette le pourvoi11 et, dans l’autre, elle rend un arrêt de cassation12. Seul ce dernier est publié au Bulletin marquant ainsi l’importance que la chambre criminelle souhaite conférer à sa décision. En l’espèce, un mandat d’arrêt européen a été émis par les Pays-Bas contre une personne, de nationalité française, ayant ses attaches familiales et professionnelles en France, aux fins d’exécution d’une peine d’emprisonnement de six mois pour infraction à la législation sur les stupéfiants. Le jugement néerlandais sur lequel se base le mandat d’arrêt européen a été rendu par défaut le 16 mai 2006. Le mandat d’arrêt européen est notifié à la personne concernée par les autorités françaises le 14 janvier 2016. Devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Montpellier, l’individu s’oppose à sa remise demandant l’exécution en France de la peine privative de liberté. Après avoir vérifié que le jugement rendu in abstentia dans l’État d’émission ne faisait pas obstacle à sa remise13, et ne retenant pas l’application de l’article 695-24, 2° du CPP, les juges du fond montpelliérains ont autorisé l’exécution du mandat d’arrêt européen. La Cour de cassation casse au visa de l’article 8 de la Conv. EDH, faisant ainsi de l’article 695-24, 2° du CPP une voie d’accès par excellence au respect du droit à la vie privée et familiale dans les rouages de la procédure du mandat d’arrêt européen.

3. Droit au respect de la vie privée et familiale et exécution du mandat d’arrêt européen. En réalité, l’invocation de l’article 695-24, 2° du CPP par la personne recherchée soulève deux questions à coloration européenne devant la haute juridiction française14. D’abord, la question est de savoir dans quelle mesure la situation personnelle d’un individu visé par un mandat d’arrêt européen – nationalité, attaches familiales et professionnelles – entre dans les conditions de mise en œuvre de ce motif de refus facultatif de remise ? Ensuite, il semble que cette première interrogation renvoie à une problématique plus large relative à la protection du droit au respect de la vie privée et familiale, en tant que droit fondamental de la personne recherchée, dans la procédure d’exécution des mandats d’arrêt européens. Il ressort de l’arrêt du 12 avril 201615 que la garantie du respect de la vie privée et familiale pourrait ainsi intervenir dans la procédure d’exécution de l’instrument européen de coopération judiciaire soit en tant que critère de mise en œuvre de l’article 695-24, 2° du CPP, soit, dans un élan d’autonomie juridique, en tant que motif de non-exécution du mandat d’arrêt européen en cas d’atteinte disproportionnée. Une étude de la jurisprudence de la chambre criminelle depuis 2004 montre que cette dernière accepte ce moyen souvent avancé par les personnes recherchées, devant les autorités d’exécution des mandats d’arrêt européens, pour faire obstacle à leur remise vers l’État d’émission16. Un motif de refus qui, en outre, suppose d’effectuer un contrôle de proportionnalité dont les critères ne sont pas établis. Dans cette lignée, la Cour de cassation rejette, pour la première fois en mai 2015, un pourvoi contre un refus de remise prononcé pour atteinte disproportionnée au droit à la vie privée et familiale17. Dans son arrêt rendu le 12 avril 2016, la chambre criminelle va plus loin encore en visant d’office l’article 8 de la Conv. EDH comme fondement du droit au respect à la vie privée et familiale dans la procédure d’exécution du mandat d’arrêt européen. Doit-on identifier une volonté d’assurer un niveau de protection plus élevé des droits fondamentaux dans l’instrument européen de coopération judiciaire ? Mais dans ce cas, pourquoi invoquer l’article 8 de la Conv. EDH quand on sait que d’une part, le droit dérivé de l’Union européenne tire sa validité de la conformité au droit primaire de l’Union européenne, donc à la Charte des droits fondamentaux de l’Union18 et que, d’autre part, la Cour de Strasbourg n’a jusqu’à présent jamais remis en cause la présomption d’équivalence de protection des droits fondamentaux dans l’ordre juridique de l’Union19 ? Serait-ce alors un réflexe judiciaire que d’invoquer et de retenir systématiquement la Conv. EDH, et de ne pas saisir la CJUE d’une question préjudicielle en matière pénale ? Ou, ce nouveau moyen est-il une rémanence protectionniste après la suppression du principe de non-extradition des nationaux dans l’Espace pénal européen20 ? En toute hypothèse, cette décision de la Cour de cassation met à mal le sens du droit européen de la coopération judiciaire pénale21.

4. Mise à mal du sens du droit européen de la coopération judiciaire pénale. Depuis la loi du 5 août 2013 modifiant le contenu de l’article 695-24, 2° du CPP22, l’arrêt du 12 avril 201623 est le premier arrêt de principe dans lequel la haute juridiction française ajoute, sans saisir la Cour de justice de l’Union européenne, un nouveau critère d’application à l’article 695-24, 2° du CPP. En refusant la remise d’une personne, et en acceptant concomitamment l’exécution en France de la condamnation étrangère, sur le fondement du droit au respect à la vie privée et familiale, la portée du motif de refus prévu à l’article 695-24, 2° du CPP est étendue. Cependant, et là se marque aussi le tournant, la chambre criminelle pose dans cet arrêt une règle de principe en vertu de laquelle, au regard de l’article 8 de la Conv. EDH, les autorités d’exécution des mandats d’arrêt européens sont tenues de vérifier « que la remise sollicitée ne portait pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale ». Ce faisant, la haute juridiction installe, unilatéralement, la protection des droits fondamentaux, via un contrôle de proportionnalité, dans les limites à l’exécution des mandats d’arrêt européens. Entre une interprétation trop extensive (I) et une mise en œuvre très incertaine (II) du droit européen de la coopération judiciaire pénale, la jurisprudence de la Cour de cassation est pleine de défiance.

I – Une interprétation extensive du droit européen de la coopération judiciaire pénale

5. L’application de l’article 695-24, 2° est, pour les autorités d’exécution d’un mandat d’arrêt européen, facultative et soumise à plusieurs conditions dont certaines sont issues, depuis 2013, de la procédure européenne d’exécution des peines privatives de liberté étrangères. La législation pose, sans ambiguïté, deux conditions de mise en œuvre de ce motif de refus d’exécution des mandats d’arrêt européens (A). Pourtant, face à la ferveur de l’argument du respect du droit à la vie privée et familiale de la personne visée par le mandat d’arrêt européen, la Cour de cassation pose un critère supplémentaire pour décider si la peine d’emprisonnement prononcée dans un autre État membre peut ou non être exécutée sur le territoire français – et la remise refusée (B).

A – Les deux conditions légales de l’article 695-24, 2° du CPP

6. Un cadre posé par l’articulation de deux instruments européens de coopération judiciaire. La particularité de l’article 695-24, 2° du CPP est que son application repose sur l’articulation de deux instruments européens de coopération judiciaire. En premier lieu, il s’agit d’une règle régissant l’exécution des mandats d’arrêt européens – ou plus exactement empêchant, le cas échéant, la remise de la personne recherchée. Elle trouve donc sa raison d’être dans l’article 4, § 6 de la décision-cadre du 13 juin 2002 sur le mandat d’arrêt européen relatif aux motifs de non-exécution facultative24. Cependant, en second lieu, l’article 695-24, 2° du CPP renvoie expressément à la procédure européenne de reconnaissance mutuelle des décisions de condamnation à une peine privative de liberté prononcée dans un autre État membre. Aussi, il convient de se référer au nouveau mécanisme d’exécution des peines privatives de liberté étrangères tel que mis en place par la décision-cadre de 200825. Les conditions de mise en œuvre de l’article 695-24, 2° du CPP sont donc issus de ces deux textes de droit dérivé. Depuis la modification de l’article 695-24, 2° du CPP en 201326, les nationaux mais également les personnes qui résident régulièrement de façon ininterrompue depuis au moins cinq ans sur le territoire français peuvent bénéficier d’un refus de la remise aux autorités d’émission du mandat d’arrêt européen. Ce refus est cependant soumis à une seconde condition au regard de laquelle la décision de condamnation doit être exécutoire sur le territoire français en application de l’article 728-31 du Code de procédure pénale. Cette dernière disposition prévoit les seuls cas dans lesquels une condamnation étrangère à une peine d’emprisonnement ne pourra pas être exécutée en France27. Concrètement, cela implique que la mise en œuvre du motif de refus d’exécution du mandat d’arrêt européen soit articulée avec les articles 728-10 et suivants du CPP28. Ainsi la transposition de la décision-cadre de 2008 et la modification du contenu de l’article 695-24 2° du CPP laissent, depuis 2013, peu de marge de manœuvre aux juges judiciaires nationaux invitant à une application stricte des conditions légales.

7. L’application stricte de l’article 695-24, 2° du CPP. La chambre criminelle de la Cour de cassation a déjà affirmé, au visa de l’article 695-24, 2° du CPP, l’application stricte de ces conditions29. Elle rappelle d’une part, que le critère de la nationalité n’est plus suffisant et, d’autre part, qu’il convient de vérifier en plus de la résidence de l’individu en France que la condamnation y est bien exécutoire selon les dispositions de l’article 728-31 du CPP. Ainsi, la mise en œuvre de l’article 695-24, 2° du CPP par la chambre de l’instruction de Montpellier, dans l’affaire qui nous occupe, s’inscrit parfaitement dans cette approche. L’autorité française d’exécution du mandat d’arrêt émis par les autorités néerlandaises considère dans sa décision du 22 mars 2016 que « les conditions de cet article ne sont pas réunies en l’absence, parmi les pièces de la procédure transmises par les autorités néerlandaises, du certificat visé aux articles 728-12, 728-31 et 728-32 du Code de procédure pénale ». L’article 728-31 du CPP obligeant l’autorité française d’exécution à refuser l’exécution de la décision étrangère lorsque le certificat prévu à l’article 728-1230 « n’est pas produit, est incomplet ou ne correspond manifestement pas à la décision de condamnation et n’a pas été complété ou corrigé dans le délai fixé ». Par ricochet, l’exécution du mandat d’arrêt européen ne pouvait pas être refusée sur le fondement de l’article 695-24, 2° du CPP. Retenir malgré tout le motif de refus posé à l’article 695-24, 2° du CPP suppose une interprétation extensive du texte de transposition. Aussi, on peut s’interroger sur une justification de l’extension par le caractère facultatif de ce motif de refus ? Autrement dit, la faculté offerte de retenir ou non l’article 695-24, 2° du CPP afin de refuser la remise de la personne recherchée permet-elle aux juridictions des États membres d’ajouter un critère fondé sur le droit au respect de la vie privée et familiale ? Sans poser de question préjudicielle à la Cour de justice31, la Cour de cassation va utiliser, dans cet arrêt du 12 avril 2016, le respect du droit à la vie privée et familiale de la personne recherchée comme un critère d’application de l’article 695-24, 2° du CPP. Plus encore, elle casse l’application stricte des conditions de l’article 695-24, 2° du CPP par les juges du fond en faisant du droit au respect de la vie privée et familiale un critère en soi d’application de l’article 695-24, 2° du CPP.

B – L’ajout d’un critère fondé sur le droit au respect de la vie privée et familiale

8. Un critère supplémentaire pour l’application de l’article 695-24, 2° du CPP. En décidant que la chambre de l’instruction de Montpellier, qui s’en était tenue strictement aux conditions énoncées par la loi, fait une mauvaise application de l’article 695-24, 2° du CPP, la Cour de cassation innove à deux égards. D’abord, elle ajoute une condition, fondée sur le droit au respect de la vie privée et familiale, tant à l’article 695-24, 2° du CPP qu’à l’article 728-31 du même code auquel le premier de ces textes renvoie32. En effet, l’analyse du contenu de l’article 695-24, 2° du CPP et des articles 728-10 et suivants du CPP, au regard des dispositions et des finalités des textes européens transposés, montre que le droit au respect à la vie privée et familiale n’y est pas distingué comme un critère d’application. Ensuite, en imposant aux autorités d’exécution le contrôle de ce critère, la Cour de cassation change la nature du motif de refus d’exécution du mandat d’arrêt européen. Prévue comme un motif de refus de remise facultatif, cette disposition dépend, une fois les conditions légales réunies, d’un choix effectué par l’autorité nationale d’exécution33. Cependant, la Cour de cassation décide « qu’il devait être vérifié que la remise sollicitée ne portait pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale ». La nature facultative du motif de refus de remise de la personne dans le cadre d’un mandat d’arrêt européen, importante aux yeux de la CJUE34, devient ainsi poreuse dans l’ordre juridique français. In fine, l’interprétation extensive de la haute juridiction française interroge sur l’opportunité d’introduire ce critère supplémentaire pour l’application de ce motif de refus basé sur l’exécution de la peine privative de liberté étrangère sur le territoire français35.

9. L’inopportunité d’une interprétation extensive de l’article 695-24, 2° du CPP. Derrière la question de l’opportunité d’introduire un nouveau critère pour l’application de l’article 695-24, 2° du CPP se loge celle de sa nécessité au regard des conditions légales existantes et celle de sa conformité au droit de l’Union européenne. Premièrement, on peut se demander si le respect de ce droit n’est pas déjà pris en compte dans les conditions posées à l’article 695-24, 2° du CPP ? Le respect du droit à la vie privée et familiale ne peut-il pas s’induire de la première condition reposant sur des signes objectifs de rattachement de la personne à l’État d’exécution : la nationalité française, ou la résidence de la personne sur le territoire français ? De même, les règles régissant l’exécution des condamnations à une peine privative de liberté prononcées à l’étranger, ayant pour objectif la réinsertion sociale du condamné, peuvent difficilement être considérées comme indifférentes à l’exigence fondamentale d’une protection du droit au respect de la vie privée et familiale de ce dernier36. Dès son préambule, la décision-cadre de 2008 énonce les éléments qui peuvent être retenus par les autorités nationales afin de faire exécuter dans un État membre une peine privative de liberté prononcée dans un autre. À ce titre, sont mentionnés « l’attachement de la personne à l’État d’exécution, le fait qu’elle le considère ou non comme un lieu où elle a des liens familiaux, linguistiques, culturels, sociaux ou économiques et autres »37. Aussi, instaurer une vérification supplémentaire du respect du droit à la vie privée via un contrôle de proportionnalité n’apparaît pas forcément nécessaire. L’interprétation extensive par la Cour de cassation semble, en second lieu, effectivement contraire au principe européen de coopération loyale. Tel que l’a expliqué la CJUE, pour la matière pénale, ce principe signifie que « la juridiction nationale est tenue de prendre en considération l’ensemble des règles du droit national et de les interpréter, dans toute la mesure du possible, à la lumière du texte ainsi que de la finalité de ladite décision-cadre »38. Encore, la Cour de justice a précisé, concernant l’article 695-24, 2° du CPP, lui-même, que « cette obligation d’interprétation conforme du droit national est inhérente au système du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne en ce sens qu’elle permet aux juridictions nationales d’assurer, dans le cadre de leurs compétences, la pleine efficacité du droit de l’Union lorsqu’elles tranchent les litiges dont elles sont saisies »39. Or, force est de constater que ni la décision-cadre relative au mandat d’arrêt européen40 ni celle portant la procédure d’exécution des condamnations étrangères à une peine privative de liberté41 ne visent le droit au respect de la vie privée et familiale comme condition per se de mise en œuvre d’une de ses dispositions. En somme, ces instruments européens ne semblent pas offrir aux juges judiciaires des États membres la possibilité de revenir, dans le cadre de leur mise en œuvre, sur les moyens de garantie du droit au respect de la vie privée et familiale. Malgré tout, la Cour de cassation va plus loin en imposant comme une règle générale le contrôle du respect de la vie privée et familiale au stade de l’exécution des mandats d’arrêt européens. Une décision de naviguer en sens contraire qui laisse place à une mise en œuvre incertaine des instruments européens de coopération judiciaire pénale.

II – Une mise en œuvre incertaine du droit européen de la coopération judiciaire pénale

10. Le choix de la chambre criminelle de la Cour de cassation d’inscrire l’article 8 de la Conv. EDH au rang des motifs permettant le refus d’exécuter un mandat d’arrêt européen en cas d’atteinte disproportionnée au droit à la vie privée et familiale de la personne recherchée entérine une incertitude latente dans la procédure européenne de coopération judiciaire. D’une part, le motif de refus ainsi fondé sur l’article 8 de la Conv. EDH par la haute juridiction française n’est pas prévu – voire pas accepté en ces termes – en droit de l’Union européenne (A). D’autre part, l’application de cette cause de non-exécution du mandat d’arrêt européen repose sur un contrôle de proportionnalité dont la caractéristique principale est, sans critère établi, d’être aléatoire (B).

A – Un nouveau motif de non-exécution fondé sur l’article 8 de la Conv. EDH

11. Le rapport sensible entre exécution des mandats d’arrêt européens et protection des droits fondamentaux. Avancer que la procédure d’exécution des mandats d’arrêt européens n’offre pas une protection effective des droits fondamentaux des individus n’est pas nouveau42, mais n’est pas tout à fait juste. D’abord, il convient de rappeler que la protection des droits fondamentaux dans l’espace pénal européen est une priorité affirmée de l’Union43. Ensuite, et surtout, le mécanisme de la reconnaissance mutuelle, sur lequel est basé le mandat d’arrêt européen, implique des modalités procédurales spécifiques pour la protection des droits fondamentaux44. Spécifiques ne veut pas dire inexistantes ou relatives, mais plutôt adaptées à la particularité d’une procédure pénale transfrontière dans l’ordre juridique de l’Union européenne45. En vertu de ce principe de reconnaissance mutuelle il n’est pas envisageable, par exemple, de faire obstacle à la reconnaissance mutuelle d’une décision de justice rendue dans un autre État membre au motif que le niveau de protection des droits fondamentaux de la personne visée n’est pas suffisant au regard de la norme nationale de l’État d’exécution46. Cette approche de la protection des droits fondamentaux en coopération judiciaire pénale découle, comme le rappelle la Cour de Luxembourg, du principe de la confiance mutuelle entre les États membres « ayant une importance fondamentale » dans l’espace pénal européen47. S’inscrivant déjà dans cette logique, par ailleurs regrettée48, la décision-cadre sur le mandat d’arrêt européen ne prévoit pas, au titre des motifs de refus, facultatifs ou obligatoires49, de disposition relative à la protection des droits fondamentaux, fondée ou non sur la Conv. EDH50. Aussi, la solution de l’arrêt de cassation du 12 avril 2016 vient établir un rapport instable entre l’instrument de coopération judiciaire pénale, le droit au respect de la vie privée et familiale… et l’article 8 de la Conv. EDH.

12. Un rapport instable entre remise de la personne et droit au respect de sa vie privée et familiale. Lorsque la chambre criminelle considère, dans cet arrêt du 12 avril 2016, « qu’il devait être vérifié que la remise sollicitée ne portait pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale » de la personne recherchée, elle place le droit au respect de la vie privée et familiale comme une limite systématique à l’exécution d’un mandat d’arrêt européen. Une rupture avec le droit dérivé européen amorcée avec l’arrêt du 5 mai 2015 dans lequel la Cour de cassation rejette le pourvoi formé contre la décision de la chambre de l’instruction de refuser la remise de la personne aux autorités portugaises dès lors que « sa remise aux autorités requérantes porterait une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale prévue par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme »51. Cependant, la CJUE a précisé, à plusieurs reprises, que les listes de motifs de refus, facultatifs ou obligatoires, sont limitatives52. Les autorités nationales d’exécution n’ont pas, en principe, le pouvoir d’y ajouter une nouvelle cause de non-exécution des mandats d’arrêt européens – telle le droit au respect à la vie privée et familiale – au risque de porter atteinte tant au mécanisme procédural de la reconnaissance mutuelle qu’au principe européen de la confiance mutuelle53. La chambre criminelle, elle-même, rappelle ce caractère limitatif des listes de motifs de refus d’exécution54. Aussi est-il difficile de ne pas voir ici une remise en cause substantielle, par le juge national, de la protection des droits fondamentaux dans la législation européenne. Une telle entaille au principe de primauté du droit de l’Union européenne est-elle justifiable ? Une question qui se pose avec d’autant plus d’acuité que la CJUE a récemment montré que la protection des droits fondamentaux peut faire obstacle, dans certains cas, à la confiance mutuelle55. Une désapprobation jurisprudentielle nationale qui n’est pas isolée56, mais qui est, dans cette affaire, d’autant plus fragile qu’elle se fonde sur l’article 8 de la Conv. EDH.

13. La fragilité du recours à l’article 8 de la Conv. EDH. L’article 8 de la Conv. EDH comme base juridique de la limite posée par la Cour de cassation à l’exécution des mandats d’arrêt européens se justifie-t-il dans l’ordre juridique européen, au sein duquel le droit dérivé doit être conforme au droit primaire, incluant la Charte des droits fondamentaux57 ? La CJUE retient dans l’arrêt Aranyosi et Căldăraru, notamment, que si la Conv. EDH peut être utilisée comme une source indirecte d’interprétation, la Charte est, elle, la matrice principale – la source directe – de protection des droits fondamentaux dans l’Union européenne58. Aussi, à relever d’office le droit au respect de la vie privée et familiale, l’article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne59 aurait été, sans doute, un fondement juridique plus approprié pour poser cette limite à l’exécution du mandat d’arrêt européen60. Mais l’incertitude qui ressort de cette décision de la haute juridiction française ne s’arrête pas à la mise en place unilatérale, sur une base juridique dissonante, d’un nouveau motif de refus du mandat d’arrêt européen. L’incertitude vient également des aléas du contrôle de proportionnalité sur lequel repose, selon la Cour de cassation, l’application de ce motif de refus.

B – Les aléas d’un contrôle de proportionnalité

14. Progression rampante de la proportionnalité dans la procédure du mandat d’arrêt européen. L’introduction d’un motif de refus de remise uniquement fondé sur le respect du droit à la vie privée et familiale de la personne recherchée suppose que les autorités françaises d’exécution aient un moyen de décider de l’application ou non de cette limite. La chambre criminelle considère ici que l’exécution du mandat d’arrêt européen ne doit pas porter « une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale » de la personne visée61. Le contrôle de proportionnalité devient ainsi central dans la procédure d’exécution des mandats d’arrêt européens. Une consécration prévisible tant le respect du principe de proportionnalité dans les instruments européens de coopération judiciaire pénale fait, depuis plusieurs années, l’objet d’analyses pour une meilleure mise en œuvre62. Encore, face au silence de la législation européenne, la CJUE est sollicitée, avec insistance, pour se positionner sur la définition et les critères permettant le respect du principe de proportionnalité dans le mécanisme de reconnaissance mutuelle63. Le principe de proportionnalité est ainsi devenu la pierre d’achoppement du droit de la coopération judiciaire pénale dans l’Union européenne64. La première difficulté, qui se pose sans doute dans des termes identiques pour le législateur européen et les juges nationaux et européens, est que le principe de proportionnalité n’a pas, dans l’ordre juridique de l’Union européenne, de définition unique65. La proportionnalité dans les instruments de coopération judiciaire peut renvoyer soit au principe structurel de l’Union de subsidiarité et de proportionnalité66, soit au principe de proportionnalité des délits et des peines tel que prévu à l’article 49, § 3 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne67, soit, enfin, à l’article 52 de la même Charte68. L’article 52 qui a un contenu fortement similaire à celui de l’article 8, § 2 de la Conv. EDH en vertu duquel « il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui ». Il semble que ce soit bien cette dernière acception qui vaille dans le cas précis du contrôle de la proportionnalité de l’atteinte au droit à la vie privée et familiale par l’exécution d’un mandat d’arrêt européen. La seconde difficulté, plus péremptoire, tient à la mise en œuvre du contrôle de proportionnalité.

15. Le contrôle de proportionnalité devant la Cour de cassation. La chambre de l’instruction de la cour d’appel, compétente pour décider de l’exécution d’un mandat d’arrêt européen, doit procéder au contrôle de proportionnalité. En d’autres termes, l’autorité d’exécution française est chargée, conformément à l’interprétation de la Cour de cassation, de vérifier que la remise de la personne visée par le mandat d’arrêt ne constitue pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale. Ce contrôle de proportionnalité de la mesure de coopération judiciaire par rapport aux droits fondamentaux de l’individu est alors doublement aléatoire. En premier lieu, en l’absence de critère établis pour la mise en œuvre du contrôle, les solutions – et le raisonnement – des autorités d’exécution françaises manquent de lisibilité. En 2011, la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris relève, au soutien de sa décision de remettre la personne recherchée, que « le paragraphe 2 de l’article 8 de la Convention (Conv. EDH) prévoit que l’ingérence de l’autorité publique, caractérisée en l’espèce par la règle pénale, dans une société démocratique, à l’instar du Portugal, que l’Union européenne a admise parmi ses membres, est nécessaire, entre autres, à la prévention des infractions pénales ou à la protection des droits et libertés d’autrui, ce que la décision cadre du 13 juin 2002 a élevé comme un principe, notamment en ses articles 1 à 5, et que la France a transposé dans les articles 695-22 et 695-23 du Code de procédure pénale, en prévoyant limitativement les cas de refus obligatoires, ou facultatives, d’un mandat d’arrêt européen »69. En mars 2015, la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Poitiers, dans une affaire très similaire, refuse, cette fois, d’ordonner la remise de l’individu aux autorités d’émission du mandat d’arrêt européen au motif que cela « porterait une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale prévue par l’article 8 de la Conv. EDH »70. Un aléa qui se renforce dès lors qu’il apparaît, en second lieu, que l’introduction d’un contrôle de proportionnalité au stade de l’exécution des mesures de coopération judiciaire fait bouger les lignes délimitant la compétence de la Cour de cassation. En principe, la Cour de cassation, juge du droit et non du fait, assure un contrôle des décisions de la chambre de l’instruction sur l’absence d’insuffisance ou de contradiction de la motivation. Dans le cas de l’application de la proportionnalité au stade de l’exécution des mandats d’arrêt européens, ce contrôle a été identifié comme étant jusqu’ici « particulièrement léger »71. Or en s’arrêtant sur les deux arrêts rendus par la chambre criminelle le 12 avril 201672, on s’interroge sur ce qui peut, à part une appréciation de la manifeste disproportion par la Cour de cassation elle-même, justifier la différence de solution – un rejet dans un cas, une cassation dans l’autre ?

16. La jurisprudence de la Cour de cassation sur les rapports entre les instruments de coopération judiciaire pénale, le mandat d’arrêt européen essentiellement, et la protection des droits fondamentaux, ici le droit au respect de la vie privée et familiale, invite à repenser les techniques de raisonnement73 – voire de jugement – des juges nationaux autant qu’elle lance un appel aux instances européennes. La protection des droits fondamentaux dans les instruments européens de coopération judiciaire pénale doit, encore, être améliorée74. Néanmoins, dans cette configuration d’intersection des ordres juridiques75, une interprétation extensive ou laisser la place à une incertitude manifeste dans la mise en œuvre du droit européen de la coopération judiciaire pénale relèvent de choix jurisprudentiels nationaux tenant difficilement le cap sur la construction européenne de l’Espace de liberté, de sécurité et de justice76.

Notes de bas de pages

  • 1.
    TFUE, art. 67, 82 et s.
  • 2.
    Cela s’explique, sans doute, par la jeunesse et la spécificité du droit pénal européen. Une matière qui se développe véritablement à partir du Traité d’Amsterdam, entré en vigueur en 1999, venant fixer le nouvel objectif de l’Union européenne de devenir un espace de liberté de sécurité et de justice. Depuis, la compétence pénale de l’Union européenne n’a cessé de croître, sur la base de principes et de mécanismes propres à l’ordre juridique de l’Union européenne, jusqu’à sa consécration aux articles TFUE, art ; 82 et s. Cela peut également s’expliquer par les particularités de ce droit et la complexité de son évolution, telles que mises en lumière par Giudicelli-Delage G., « Introduction générale », in Le droit pénal de l’Union européenne au lendemain du Traité de Lisbonne, Giudicelli-Delage G. et Lazerges C. (dir.), Société de législation comparée, vol. 28, 2012, Paris, p. 17 et spéc. p. 18 et s.
  • 3.
    Décision-cadre du 13 juin 2002, relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres, transposée en France par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité aux articles CPP, art. 695-11 et s. ; v. Pradel J., « Le mandat d’arrêt européen. Un premier pas vers une révolution copernicienne dans le droit français de l’extradition », D. 2004, nos 20-21.
  • 4.
    V. en ce sens, notamment, la célèbre affaire Melloni : CJUE, 26 févr. 2013, n° C-399/11, Melloni c./ Ministerio fiscal.
  • 5.
    Sur cette large question, v. not. Dubout E., « Au carrefour des droits européens : la dialectique de la reconnaissance mutuelle et de la protection des droits fondamentaux », RDLF 2016, chron. n° 17.
  • 6.
    Cass. crim., 12 avr. 2016, n° 16-82175.
  • 7.
    L. n° 2013-711, 5 août 2013, portant diverses dispositions d’adaptation dans le domaine de la justice en application du droit de l’Union européenne et des engagements internationaux de la France.
  • 8.
    Décision-cadre n° 2008/909/JAI du Cons., 27 nov. 2008, concernant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux jugements en matière pénale prononçant des peines ou des mesures privatives de liberté aux fins de leur exécution dans l’Union européenne, transposée aux articles CPP, art. 728-10 et s.
  • 9.
    La première version de l’article 695-24, 2°, issue de la loi du 9 mars 2004, réservait son application aux seuls nationaux. La Cour de justice de l’Union européenne condamne l’État membre qui ne respecte pas ainsi le principe de non-discrimination ; CJUE, 5 sept. 2012, n° C-42/11, João Pedro Lopes Da Silva Jorge.
  • 10.
    Cass. crim., 12 avr. 2016, n° 16-81891 ; Cass. crim., 12 avr. 2016, n° 16-82175.
  • 11.
    Cass. crim., 12 avr. 2016, n° 16-81891.
  • 12.
    Cass. crim., 12 avr. 2016, n° 16-82175.
  • 13.
    Au regard des dispositions introduites par la loi modificative du 5 août 2013 transposant la décision-cadre 2009/299/JAI du Conseil du 26 février 2009 portant modification des décisions-cadres nos 2002/584/JAI, 2005/214/JAI, 2006/783/JAI, 2008/909/JAI et 2008/947/JAI, renforçant les droits procéduraux des personnes et favorisant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux décisions rendues en l’absence de la personne concernée lors du procès.
  • 14.
    Cass. crim., 12 avr. 2016, n° 16-82175.
  • 15.
    Cass. crim., 12 avr. 2016, n° 16-82175.
  • 16.
    À ce jour, plus d’une quarantaine d’arrêts ont été rendus par la chambre criminelle de la Cour de cassation dans lesquels elle accepte le contrôle dans la procédure d’exécution d’une violation éventuelle du droit au respect à la vie privée et familiale de la personne visée par le mandat d’arrêt européen. Le premier arrêt en ce sens publié au Bulletin date de 2005 : Cass. crim., 26 oct. 2005, n° 05-05847.
  • 17.
    Cass. crim., 5 mai 2015, n° 15-82108 : Cordier F., « Le refus de remise suite à l’émission d’un mandat d’arrêt européen pour atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale », RSC oct. 2015, p. 906 ; Herran T., « Le refus de la remise pour atteinte disproportionnée au droit au respect à la vie privée et familiale : l’illustration discrète d’une révolution annoncée », AJ pénal 2015, p. 611.
  • 18.
    Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, 2010/C 83/02.
  • 19.
    CEDH, 30 juin 2005, n° 45036/98, Bosphorus Hava Yollari Turizm Ve Ticaret anonym sirketi c./ Irlande ; une présomption d’équivalence non remise en cause, malgré une légère inflexion de la CEDH en matière civile et commerciale dans l’arrêt CEDH, 25 févr. 2014, n° 17502/07, Avotins c/ Lettonie.
  • 20.
    Malabat V., « Observations sur la nature du mandat d’arrêt européen », Dr. pén. n° 12, p. 6.
  • 21.
    Pour une interprétation sensiblement différente de l’action de la Cour de cassation, dans une hypothèse proche concernant l’article CPP, art. 695-22, 5°, v. Cahn O., « La chambre criminelle de la Cour de cassation a-t-elle sacrifié la confiance mutuelle aux droits de l’Homme ? », in Droit répressif au pluriel : droit interne, droit international, droit européen, droits de l’Homme, Liber amicorum en l’honneur de Renée Koering-Joulin, 2014, Anthémis, p. 79.
  • 22.
    L. n° 2013-711, 5 août 2013, portant diverses dispositions d’adaptation dans le domaine de la justice en application du droit de l’Union européenne et des engagements internationaux de la France.
  • 23.
    Cass. crim., 12 avr. 2016, n° 16-82175.
  • 24.
    Décision-cadre du 13 juin 2002 relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres, transposée en France par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité aux articles 695-11 et suivants du Code de procédure pénale.
  • 25.
    Décision-cadre n° 2008/909/JAI du Cons., 27 nov. 2008, concernant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux jugements en matière pénale prononçant des peines ou des mesures privatives de liberté aux fins de leur exécution dans l’Union européenne.
  • 26.
    Cette modification de l’article CPP, art. 695-24, 2°, par la loi du 5 août 2013, a consisté à ajouter au critère de la nationalité – jugé discriminatoire par la CJUE dans CJUE, 5 sept. 2012, n° C-42/11, João Pedro Lopes Da Silva Jorge – celui de la résidence régulière de façon ininterrompue depuis au moins cinq ans sur le territoire français.
  • 27.
    En vertu de l’article CPP, art. 728-31 : « la reconnaissance et l’exécution sur le territoire français d’une décision de condamnation prononcée par la juridiction d’un autre État membre ne peuvent être refusées que dans les cas prévus aux articles 728-32 et 728-33. La décision de refus est motivée par référence à ces mêmes articles ».
  • 28.
    Le mécanisme d’exécution des condamnations étrangères, qui repose sur le principe de reconnaissance mutuelle des décisions pénales, est un outil de coopération judiciaire de l’Union européenne sans lequel l’article 695-24, 2° ne pouvait pas effectivement être mis en œuvre ; v. en ce sens, les arguments avancés en ce sens par le Gouvernement français dans l’affaire CJUE, 5 sept. 2012, n° C-42/11, João Pedro Lopes Da Silva Jorge.
  • 29.
    Cass. crim., 5 nov. 2014, n° 14-86553, PB. Confirmé par Cass. crim., 21 janv. 2015, n° 14-88318.
  • 30.
    En vertu de l’article CPP, art. 728-12, ce certificat doit préciser notamment : la désignation de l’État de condamnation et de la juridiction ayant rendu la décision de condamnation ; l’identité de la personne à l’encontre de laquelle la décision de condamnation a été rendue, l’adresse de son ou ses derniers domiciles connus et l’indication qu’elle se trouve dans l’État de condamnation ou dans l’État d’exécution ; la date de la décision de condamnation et celle à laquelle cette décision est devenue définitive ; les motifs de la transmission de la décision de condamnation au regard de l’article 728-11 ; la date, le lieu et les circonstances dans lesquels la ou les infractions ont été commises ainsi que la nature, la qualification juridique et une description complète des faits ; la nature de la peine ou de la mesure de sûreté privative de liberté à exécuter, sa durée totale, la part déjà exécutée et la date prévue de fin d’exécution ; l’indication, le cas échéant, du consentement de la personne condamnée à la transmission de la décision de condamnation ; les observations éventuelles de la personne condamnée sur la transmission de la décision de condamnation. Le certificat est signé par l’autorité compétente de l’État de condamnation, qui atteste l’exactitude des informations y étant contenues.
  • 31.
    Habituée à ne pas renvoyer devant la CJUE les questions en interprétation du droit dérivé, la chambre criminelle de la Cour de cassation avait pourtant ici une opportunité, voire une obligation, réelle de faire un renvoi préjudiciel afin de vérifier que la décision-cadre sur le mandat d’arrêt européen et la décision-cadre de 2008, à laquelle la première renvoie, garantissent le droit au respect de la vie privée et familiale des personnes recherchées. Une question qui, à notre connaissance, n’a pas encore été traitée par la CJUE. Sur l’importance du dialogue direct entre le juge pénal national et le juge européen de Strasbourg par la voie de la question préjudicielle, v. not. Weyembergh A. et Ricci V., « Les interactions dans le secteur de la coopération judiciaire : le mandat d’arrêt européen », in Cour de justice et justice pénale en Europe, Giudicelli-Delage G., Manacorda S. (dir.), Société de législation comparée, vol. 19, 2010, Paris, p. 203.
  • 32.
    V. supra § 6.
  • 33.
    V. pour un rappel de cette règle : CJUE, 5 sept. 2012, n° C-42/11, João Pedro Lopes Da Silva Jorge.
  • 34.
    CJUE, 5 sept. 2012, n° C-42/11, João Pedro Lopes Da Silva Jorge.
  • 35.
    Une interrogation d’autant plus justifiée que dans un arrêt du 10 août 2016, la chambre criminelle s’attache à la stricte application des conditions légales de l’article 695-24, 2° du CPP (Cass. crim., 10 août 2016, n° 16-84723, PB).
  • 36.
    Décision-cadre n° 2008/909/JAI du Cons., 27 nov. 2008, art. 3, § 1, concernant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux jugements en matière pénale prononçant des peines ou des mesures privatives de liberté aux fins de leur exécution dans l’Union européenne.
  • 37.
    « L’exécution de la condamnation dans l’État d’exécution devrait accroître les chances de réinsertion sociale de la personne condamnée. Pour acquérir la certitude que l’exécution de la condamnation par l’État d’exécution contribuera à la réalisation de l’objectif consistant à faciliter la réinsertion sociale de la personne condamnée, l’autorité compétente de l’État d’émission devrait tenir compte d’éléments tels que, par exemple, l’attachement de la personne à l’État d’exécution, le fait qu’elle le considère ou non comme un lieu où elle a des liens familiaux, linguistiques, culturels, sociaux ou économiques et autres », considérant 9 de la décision-cadre 2008/909/JAI.
  • 38.
    CJCE, 16 juin 2005, n° C-105/03, Procédure pénale c/ Maria Pupino.
  • 39.
    CJUE, 5 sept. 2012, n° C-42/11, João Pedro Lopes Da Silva Jorge ; v. Beauvais P., « Mandat d’arrêt européen et discrimination à raison de la nationalité », RTDE 2013, p. 809.
  • 40.
    Décision-cadre du 13 juin 2002, relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres.
  • 41.
    Décision-cadre n° 2008/909/JAI du Cons., 27 nov. 2008, concernant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux jugements en matière pénale prononçant des peines ou des mesures privatives de liberté aux fins de leur exécution dans l’Union européenne.
  • 42.
    Cartier M.-E., « Déplacer le tabouret ou le piano – Quelques réflexions sur un nouvel instrument : le mandat d’arrêt européen », in Apprendre à douter. Questions de droit, questions sur le droit. Études offertes à Claude Lombois, 2004, PULIM, p. 639 et s.
  • 43.
    Dans le droit de l’Union européenne, v. not. Le Programme de Stockholm – Une Europe ouverte et sûre qui sert et protège les citoyens, 2010/C 115/01.
  • 44.
    V. Le principe de reconnaissance mutuelle des décisions répressives dans l’Union européenne. Contribution à l’étude d’un modèle de libre circulation des décisions de justice, 2011, LGDJ, Fondation Varenne, p. 305 et s. ; « Le principe de reconnaissance mutuelle en matière répressive dans l’Union européenne : from a blind-date to an engagement », RPDP avr. 2012, n° 2.
  • 45.
    La CJUE a, elle-même, rappelé cela dans son avis n° 2/13 pour expliquer la difficile adhésion de l’Union européenne à la Conv. EDH., avis n° 2/13, 18 déc. 2014.
  • 46.
    Pour un rappel de cette règle, v. CJUE, 26 févr. 2013, n° C-399/11, Melloni c./ Ministerio Fiscal ; pour une critique de l’application étriquée de cette règle, v. Labayle H., « Mandat d’arrêt européen et degré de protection des droits fondamentaux, quand la confiance se fait aveugle », site GDR ELSJ, 3 mars 2013 : http://www.gdr-elsj.eu/2013/03/03/cooperation-judiciaire-penale/mandat-darret-europeen-et-degre-de-protection-des-droits-fondamentaux-quand-la-confiance-se-fait-aveugle.
  • 47.
    La Cour de Luxembourg rappelle que « ce principe impose, notamment en ce qui concerne l’espace de liberté, de sécurité et de justice, à chacun de ces États de considérer, sauf dans des circonstances exceptionnelles, que tous les autres États membres respectent le droit de l’Union et, tout particulièrement, les droits fondamentaux reconnus par ce droit. Lorsqu’ils mettent en œuvre le droit de l’Union, les États membres peuvent être tenus, en vertu de ce même droit, de présumer le respect des droits fondamentaux par les autres États membres, de sorte qu’il ne leur est pas possible non seulement d’exiger d’un autre État membre un niveau de protection national des droits fondamentaux plus élevé que celui assuré par le droit de l’Union, mais également, sauf dans des cas exceptionnels, de vérifier si cet autre État membre a effectivement respecté, dans un cas concret, les droits fondamentaux garantis par l’Union » ; CJUE, avis n° 2/13, 18 déc. 2014, § 191-192.
  • 48.
    Pour une dénonciation des excès de la logique de la confiance mutuelle dans le domaine sensible du droit pénal, v. not. De Lamy B., « La confiance mutuelle comme fondement du mandat d’arrêt européen. Un peu, mais pas trop… pour l’instant », in Les droits, et le droit, Mélanges offerts à Bernard Bouloc, 2007, Dalloz, p. 563.
  • 49.
    V. décision-cadre du 13 juin 2002, art. 3 et 4, relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres.
  • 50.
    La Commission européenne a été claire sur ce point en précisant que « le Conseil n’a pas entendu faire de la condition générale de respect des droits fondamentaux un motif explicite de refus en cas de violation ». Rapport de la Commission fondé sur l’article 34 de la décision-cadre du Conseil du 13 juin 2002, relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres, COM(2006) 8 final, 24 janv. 2006.
  • 51.
    Cass. crim., 5 mai 2015, n° 15-82108 : Cordier F., « Le refus de remise suite à l’émission d’un mandat d’arrêt européen pour atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale », RSC oct. 2015, p. 906 : « Cet arrêt marque une étape dans l’évolution de la prise en compte des droits fondamentaux lors de l’examen des demandes de remise par les juridictions françaises ».
  • 52.
    CJUE, 28 juin 2012, n° C-192/12 PPU, Melvin West ; CJUE, 30 mai 2013, n° C-168/13 PPU, Jeremy F. c./ Premier ministre ; CJUE, 26 févr. 2013, n° C-399/11, Stefano Melloni c./ Ministerio fiscal ; CJUE, 16 juill. 2015, n° C-237/15 PPU, Minister for Justice and Equality c./ Francis Lanigan.
  • 53.
    V. encore très récemment, CJUE, 5 avr.2016, aff. jointes nos C-404/15, C-659/15 PPU, Pál Aranyosi et Robert Căldăraru, § 77 : « Le principe de reconnaissance mutuelle sur lequel est fondé le système du mandat d’arrêt européen repose lui-même sur la confiance réciproque entre les États membres quant au fait que leurs ordres juridiques nationaux respectifs sont en mesure de fournir une protection équivalente et effective des droits fondamentaux, reconnus au niveau de l’Union, en particulier, dans la Charte » ; § 80 : « Il s’ensuit que l’autorité judiciaire d’exécution ne peut refuser d’exécuter un tel mandat que dans les cas, exhaustivement énumérés, de non-exécution obligatoire, prévus à l’article 3 de la décision-cadre, ou de non-exécution facultative, prévus aux articles 4 et 4 bis de la décision-cadre. En outre, l’exécution du mandat d’arrêt européen ne saurait être subordonnée qu’à l’une des conditions limitativement prévues à l’article 5 de la décision-cadre ».
  • 54.
    La Cour de cassation a rappelé encore récemment « que l’exécution d’un mandat d’arrêt européen concernant des faits postérieurs au 1er novembre 1993 ne peut être refusée dans d’autres cas que ceux limitativement prévus par les articles 695-22 à 695-24 du code susvisé » ; Cass. crim., 8 juill. 2015, n° 15-83428.
  • 55.
    CJUE, 5 avr. 2016, aff. jointes nos C‑404/15 et C‑659/15 PPU, Pál Aranyosi et Robert Căldăraru ; note Gazin F., Europe, n° 6, juin 2016, comm. 192.
  • 56.
    V. not. la récente et remarquable décision de la Cour constitutionnelle allemande du 15 décembre 2015 ; Haguenau-Moizard C., « Identité constitutionnelle et mandat d’arrêt européen : l’exploitation de la jurisprudence Melloni par la Cour constitutionnelle allemande », Europe, 1er mars 2016, n° 3, p. 37.
  • 57.
    Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, 2010/C 83/02.
  • 58.
    CJUE, 5 avr. 2016, aff. jointes nos C-404/15 et C-659/15 PPU, Pál Aranyosi et Robert Căldăraru ; pour une référence à la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne en tant que source directe de protection des droits fondamentaux dans l’Union, v. principalement § 77 et 83 ; pour une utilisation des dispositions de la Conv. EDH en tant que source d’inspiration pour interpréter le contenu de la Charte des droits fondamentaux, ici son article 4, v. § 84 à 87.
  • 59.
    Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, Titre II, art. 7 : « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de ses communications ».
  • 60.
    Il est intéressant de relever dans la jurisprudence de la chambre criminelle relative au mandat d’arrêt européen que la Charte des droits fondamentaux reste encore peu invoquée par les demandeurs et, que la Cour de cassation ne la vise pas, le cas échéant, dans ses arrêts ; v. not. Cass. crim., 2 avr. 2014, n° 13-80474 ; Cass. crim., 25 juin 2013, n° 13-84149 ; Cass. crim., 30 juin 2010, n° 10-83892.
  • 61.
    Cass. crim., 16 avr. 2016, n° 16-82175. Dans la jurisprudence antérieure, v. not. Cass. crim., 4 nov. 2015, n° 15-85968 ; Cass. crim., 29 févr. 2012, n° 12-81030 ; Cass. crim., 8 juin 2011, n° 11-83622 ; Cass. crim., 12 mai 2010, n° 10-82746 ; Cass. crim., 26 oct. 2005, n° 05-85847.
  • 62.
    Rapport de la Commission sur la mise en œuvre, depuis 2007, de la décision-cadre du Conseil du 13 juin 2002 relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres, 11 avr. 2011, COM(2011) 175 final.
  • 63.
    V. not. Les conclusions des avocats généraux E. Sharpston dans l’affaire Radù, 18 oct. 2012, n° C-396/11 et Y. Bot dans l’affaire Bob-Dogi, 2 mars 2016, n° C-241/15.
  • 64.
    V. « L’arrêt Bob-Dogi : deux occasions manquées pour le droit de la coopération judiciaire pénale », site GDR ELSJ (CNRS n° 3452), 8 juin 2016.
  • 65.
    V. « Le principe de proportionnalité en coopération judiciaire pénale : principe janusien de l’espace pénal européen », site GDR ELSJ (CNRS n° 3452), 16 juin 2015.
  • 66.
    Traité sur l’Union européenne, art. 5.
  • 67.
    L’article 49, § 3 de la Charte prévoit que « l’intensité des peines ne doit pas être disproportionnée par rapport à l’infraction ».
  • 68.
    En vertu de l’article 52, § 1 de la Charte : « Toute limitation de l’exercice des droits et libertés reconnus par la présente Charte doit être prévue par la loi et respecter le contenu essentiel desdits droits et libertés. Dans le respect du principe de proportionnalité, des limitations ne peuvent être apportées que si elles sont nécessaires et répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union ou au besoin de protection des droits et libertés d’autrui ».
  • 69.
    Cass. crim., 8 juin 2011, n° 11-83622.
  • 70.
    Cass. crim., 5 mai 2015, n° 15-82108.
  • 71.
    Cordier F., « Le refus de remise suite à l’émission d’un mandat d’arrêt européen pour atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale », RSC oct. 2015, p. 906.
  • 72.
    Cass. crim., 12 avr. 2016, n° 16-81891 ; Cass. crim., 12 avr. 2016, n° 16-82175.
  • 73.
    En ce sens, Dubout E., « Au carrefour des droits européens : la dialectique de la reconnaissance mutuelle et de la protection des droits fondamentaux », RDLF 2016, chron. n° 17.
  • 74.
    En ce sens s’inscrit le processus d’harmonisation des garanties procédurales : Dir. n° 2010/64/UE, 20 oct. 2010, relative au droit à l’interprétation et à la traduction dans le cadre des procédures pénales ; Dir. n° 2012/13/UE, 22 mai 2012, relative au droit à l’information dans le cadre des procédures pénales, ; Dir. n° 2013/48/UE du PE et du Cons., 22 oct. 2013, relative au droit d’accès à un avocat dans le cadre des procédures pénales et des procédures relatives au mandat d’arrêt européen, au droit d’informer un tiers dès la privation de liberté et au droit des personnes privées de liberté de communiquer avec des tiers et avec les autorités consulaires ; Dir. n° 2016/800/UE du PE et du Cons., 11 mai 2016, relative à la mise en place de garanties procédurales en faveur des enfants qui sont des suspects ou des personnes poursuivies dans le cadre des procédures pénales.
  • 75.
    L’expression « enchevêtrement des espaces normatifs » est complètement substituable ; sur ce vocabulaire, et le phénomène décrit, v. Ruiz-Fabri H., « Propos introductifs », in Procès équitable et enchevêtrement des espaces normatifs, Ruiz-Fabri H. (dir.), 2003, vol. 4, SLC, p. 7.
  • 76.
    Sur l’importance d’identifier le contexte de référence, national, européen ou international, auquel une situation appartient, v. Bergé J.-S., L’application du droit national, international, et européen, 1re éd., 2013, Dalloz, not. p. 67 et s.
X