Cette semaine chez les Surligneurs : Eric Zemmour peut-il réserver les allocations aux seuls Français ?

Publié le 26/11/2021

Chaque semaine, les Surligneurs évaluent la pertinence juridique des déclarations des hommes et des femmes politiques. Les allocations réservées au Français, la TVA à 0% sur le bio ou encore la création de peines minimales, autant de promesses de candidats plus ou moins réalisables que l’on décrypte pour vous. 

Cette semaine chez les Surligneurs : Eric Zemmour peut-il réserver les allocations aux seuls Français ?
Surligneurs

Eric Zemmour veut rendre la solidarité nationale “strictement nationale” en ne versant les allocations qu’aux seuls Français

Éric Zemmour souhaite que “la solidarité nationale redevienne strictement nationale”, en ne versant les allocations et autres prestations familiales qu’aux seuls Français. Le presque-candidat à l’élection présidentielle, promet d’augmenter le pouvoir d’achat des personnes à bas revenus en économisant sur certaines allocations, qui seraient réservées aux Français s’il était élu. Eric Zemmour réserverait ainsi aux Français l’ensemble des prestations dites “non contributives”, autrement dit celles qui ne sont pas la contrepartie d’une cotisation (comme le remboursement des soins, qui est la contrepartie des cotisations sociales prélevées sur les salaires). Seraient concernés par exemple l’allocation de rentrée scolaire, le RSA ou encore les allocations logement.

Or le Conseil Constitutionnel a eu l’occasion de dire en 2018, à propos des personnes qui avaient été exposées aux radiations issues des essais nucléaires français en Algérie

que le législateur ne peut, “sans méconnaître le principe d’égalité, établir, au regard de l’objet de la loi, une différence de traitement entre les victimes françaises et celles de nationalité étrangère résidant sur le territoire français au moment du dommage qu’elles ont subi”. La seule réserve est que l’étranger soit en situation régulière : c’est ce que juge aussi le Conseil constitutionnel depuis 1993.

Si Eric Zemmour entend réserver certaines allocations aux Français, il lui faudra démontrer qu’il existe une différence entre, par exemple, le parent français qui assume les frais de rentrée scolaire de son enfant, et le parent étranger vivant en France, et qui assume les mêmes frais pour son propre enfant. La même démonstration devra être apportée à propos de chaque allocation : la personne âgée française est-elle dans une situation différente de la personne âgée étrangère résidente, au regard de l’objectif du minimum vieillesse, qui est de compenser un niveau de retraite trop bas et mettant l’intéressé dans une situation précaire ?

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Yannick Jadot veut une TVA à 0 % sur le bio et à 5,5 % sur les produits recyclés et biosourcés : une proposition contraire à la législation européenne

Dans son programme, le candidat à l’élection présidentielle, Yannick Jadot (“2022 l’écologie”) propose que la France abaisse la TVA des produits bio à 0 %, dans le but de favoriser la consommation des denrées alimentaires qui respectent le cahier des charges européen des produits issus de l’agriculture biologique. Il propose aussi d’abaisser la TVA des produits recyclés et biosourcés à 5,5 %. Mais Yannick Jadot est aussi député au Parlement européen. Et il sait sans doute déjà que sa proposition a peu de chances de voir le jour, même s’il devait s’installer à l’Élysée en 2022 et ce d’autant plus qu’il avait déjà fait cette proposition en mars dernier, une proposition que Les Surligneursn’avaient pas manqué de “surligner. La raison est simple, il faudrait modifier la directive TVA de 2006 qui encadre les catégories de biens et services auxquels on peut appliquer un taux préférentiel. Malheureusement pour le candidat EELV, les produits bio et recyclés n’en font pas partie. Il faudra alors convaincre les 26 autres États membres de les inclure, ce qui n’est pas impossible étant donné les objectifs environnementaux que l’Union européenne est en train de se fixer.

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Selon Léa Salamé, qui interrogeait Xavier Bertrand, “on ne peut pas créer de peines minimales sans modifier l’article 8 de la déclaration des droits de l’homme”. Sauf que… c’est faux

Pour la journaliste Léa Salamé, l’obstacle serait insurmontable, car aucun président ne s’aventurerait à modifier un texte aussi sacré que celui rédigé par les révolutionnaires de 1789. Elle a sans doute raison. Mais c’est Xavier Bertrand, qui prônait des “peines automatiques” contre ceux qui s’en prennent aux forces de l’ordre, ce qui lui valut un “surlignage”. Or ce matin-là sur France inter, Xavier Bertrand – peut-être mieux conseillé ? – n’a pas réitéré sa proposition telle quelle face à Léa Salamé, se limitant à prôner des “peines minimales obligatoires”, que le juge serait tenu de prononcer à l’égard de certains crimes ou délits et qui ne pourraient pas être réduites par la suite. Ce qui est très différent.

Ces peines minimales existent déjà et, en 2007, le Conseil constitutionnel les a déclarées conformes à la Constitution. Le même Conseil constitutionnel a eu l’occasion de préciser en 2018 qu’il faut seulement que la loi laisse au juge une marge de manœuvre suffisante pour bien tenir compte des faits de chaque affaire. C’est donc bien une affaire de proportionnalité, comme le prévoit d’ailleurs l’article 8 de la Déclaration : “La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires”.

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Reconnaissance faciale dans l’espace public : entre éthique et progrès, le Parlement européen face à un choix cornélien

C’est à l’occasion de la publication des conclusions d’un rapport intitulé Biométrique et surveillance de masse comportementale dans les États membres de l’Union européenne, à la demande du Groupe des Verts/Alliance libre européenne (ALE), que le Parlement européen s’est penché sur les enjeux éthiques et juridiques des technologies de reconnaissance faciale. Importée progressivement au sein de l’Union européenne, la reconnaissance faciale constitue une technique logicielle qui permet instantanément, grâce aux algorithmes, de relier une identité à un visage apparaissant dans l’espace public en comparant les traits de celui-ci à des images stockées dans un espace de données. Si de plus en plus d’États membres en mesurent toute l’utilité, loin de faire l’unanimité, cette technologie provoque encore de nombreuses controverses dans le paysage politique et, de manière générale, dans la société civile.

Le Parlement européen a adopté une résolution visant à demander l’interdiction du recours à la police prédictive et à cette technologie dans les lieux publics, alors que la position de la Commission européenne est plutôt de l’autoriser notamment lorsque la sécurité publique est éminemment compromise. Si certaines associations craignent donc que l’encadrement de la reconnaissance faciale ne soit pas suffisant, la CNIL, en France, a manifesté toute sa satisfaction. Entre protéger et progresser… la conciliation de ces impératifs passerait-elle par un équilibre juridique indispensable pour arbitrer les intérêts en présence ?

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