Cette semaine chez les Surligneurs : L’Ukraine pourrait juridiquement entrer dans l’OTAN

Publié le 11/03/2022

Il n’y pas d’obstacles juridique à l’entrée de l’Ukraine dans l’OTAN, en revanche, cela pose un problème politique. Les Surligneurs, spécialistes de legal checking vous expliquent pourquoi. Ils passent aussi au crible la proposition de Valérie Pécresse d’abaisser à 16 ans la majorité pénale, la possibilité de fermer les écoles hors contrat voulue par Fabien Roussel ou encore l’affirmation de Philippe Martinez selon laquelle supprimer la redevance TV porterait atteinte à l’indépendance de l’audiovisuel public. 

Cette semaine chez les Surligneurs : L'Ukraine pourrait juridiquement entrer dans l'OTAN

L’entrée de l’Ukraine dans l’OTAN : les conditions juridiques sont réunies, pas les conditions politiques

L’OTAN est fondée sur le principe d’accord et d’entraide mutuelle dont le but affiché est de faire respecter les valeurs démocratiques et assurer une stabilité à la paix dans le monde. Adhérer à cette alliance géostratégique revient, entre autres, pour les Etats, à bénéficier automatiquement du mécanisme de défense collective en cas d’agression par des forces armées. Cette conséquence juridique d’une adhésion (ou non) demeure fondamentale pour comprendre, aujourd’hui, la situation ukrainienne et l’impossible assistance à ce pays, du moins dans le cadre de l’OTAN, alors même que Moscou s’oppose fermement à une extension de l’Alliance à l’Est.

En réponse à l’agression, le Traité de l’Atlantique Nord ne prévoit aucun mécanisme de défense conjoint parce que l’Ukraine n’y est pas membre. De fait, intervenir militairement ne pourrait en aucun cas être justifié juridiquement par les statuts de l’organisation et encore moins par le mécanisme de légitime défense. Cela ne signifie pas qu’il soit impossible de venir en aide militairement, mais cela ne se ferait pas en vertu du traité. Cela se ferait en vertu d’une simple volonté d’un ou plusieurs États souverains, de venir en aide à un autre État souverain agressé.

En l’état, l’adhésion de l’Ukraine entraînerait tous les membres de l’Alliance dans la guerre, avec en première ligne les Etats limitrophes à l’Ukraine. Un tel acte serait, en effet, perçu comme une véritable provocation du côté de la Russie, qui ne souhaite pas une autre extension de l’OTAN jusqu’à ses frontières, après les pays baltes et la Pologne. Il n’existe donc pas d’opposition juridique, mais politique à l’adhésion.

Cela étant, les Etats membres de l’OTAN et de l’Union européenne ont largement accepté de fournir une assistance, se traduisant par l’envoi, non pas de troupes, mais de matériels et d’armements militaires. L’aide indirecte étant la seule alternative en dehors de l’entrée en guerre. À cela s’ajoutent les sanctions économiques qui ont été décidées par la majorité des États membres de l’Union européenne et l’Union européenne elle-même. Mais ce n’est pas l’OTAN qui agit dans ce cas.

 En savoir plus ? Cliquez ici.

Fabien Roussel (PCF) sur les écoles hors contrat : « On ne sait pas ce qu’on y enseigne », « je les ferai fermer »

Fabien Roussel, candidat communiste à l’élection présidentielle, dénonce les écoles privées hors contrat qu’il entend fermer. Selon lui, « l’Etat n’a pas le droit d’y mettre son nez (en dehors des) règles d’hygiène ». Si, dans les faits, les contrôles ont pu s’avérer défaillants, l’enseignement hors contrat est, en droit, étroitement contrôlé depuis peu. Une école hors contrat ne peut, sous peine de sanctions pénales, ouvrir sans s’être déclarée trois mois à l’avance. Si durant ce délai, l’autorité administrative ou judiciaire ne s’y est pas opposée, elle peut alors ouvrir.

Certes, les écoles hors contrat sont « entièrement libres dans le choix des méthodes, des programmes, des livres et des autres supports pédagogiques ». Cela étant, elles doivent « respecter l’objet de l’instruction obligatoire » à savoir : les « fondamentaux du savoir » et « connaissances de base », la « culture générale », le développement d’un « esprit critique permettant de s’insérer dans la vie sociale et professionnelle, de partager les valeurs de la République et d’exercer sa citoyenneté ». Des contrôles sont prévus, dans le Code de l’éducation, pour sanctionner, notamment, par la fermeture, les établissements qui ne respectent pas ces exigences. Cela s’est déjà fait à l’encontre d’écoles religieuses musulmanes, mais aussi catholiques.

Si les manquements doivent être réprimés et l’insuffisance des moyens réglée, il n’en reste pas moins que la liberté de l’enseignement est protégée, notamment, par la Constitution. L’instruction obligatoire peut, en effet, être donnée « soit dans les établissements ou écoles publics ou privés, soit dans les familles par les parents […] ou toute personne de leur choix ». Plutôt que de fermer les écoles hors contrat, Fabien Roussel pourrait, à la limite, renforcer les conditions d’ouverture, en la soumettant à une autorisation ou supprimer leur régime pour les obliger à conclure un contrat avec l’Etat, mais il faudra alors que l’Etat prenne en charge les salaires des enseignants.

En savoir plus ? Cliquez ici.

Valérie Pécresse (LR) propose, « pour tenir compte de l’évolution de la criminalité, d’abaisser la majorité pénale à seize ans »

Candidate Les Républicains à l’élection présidentielle, Valérie Pécresse propose d’abaisser la majorité pénale des mineurs afin de mettre un coup d’arrêt à la « montée continuelle de la violence ». L’abaissement de la majorité pénale aurait pour conséquences qu’un délinquant mineur civilement mais majeur pénalement ne comparaitrait plus devant une juridiction spécialisée pour mineurs, mais devant les juridictions pénales de droit commun, et qu’il ne bénéficierait plus du tout de l’excuse de minorité, ni d’atténuations de responsabilité. Cette proposition est compliquée à mettre en œuvre au regard du droit international et de la jurisprudence constitutionnelle.

 Tout d’abord, la France a ratifié la Convention internationale relative aux droits de l’enfant, selon laquelle enfant ne peut être pénalement traité comme un adulte et doit bénéficier de juridictions pénales spécialisées. Pour surmonter cet obstacle et supprimer la spécialisation des juridictions pour les personnes dès seize ans, il faudrait abaisser l’âge de la majorité civile en France par une loi. La convention s’appliquerait alors aux enfants de moins de seize ans. Mais une telle réforme serait problématique et très discutée, car elle soulèverait beaucoup de questions annexes telles que la question du droit de vote, celle du mariage ou encore la capacité financière…

Ensuite, l’abaissement de la majorité pénale se heurterait au principe à valeur constitutionnelle de « l’atténuation de la responsabilité pénale des mineurs en fonction de leur âge », une façon très explicite de dire qu’une personne mineure ne peut être jugée comme une personne majeure.

Enfin, le Code de la justice pénale des mineurs permet déjà, en fonction de la gravité des délits et des crimes, de lever l’excuse de minorité et la comparution devant une juridiction spécialisée pour les mineurs, dès seize ans. En somme, la proposition de Valérie Pécresse innove assez peu.

En savoir plus ? Cliquez ici.

Selon Philippe Martinez (CGT), la suppression de la redevance TV est une « attaque contre l’audiovisuel public, qui doit rester la propriété des Français »

En réaction à la proposition du président de la République sortant de supprimer la contribution à l’audiovisuel public, Philippe Martinez décrie une « attaque contre l’audiovisuel public ». En vérité, l’audiovisuel public est déjà la « propriété des Français », au sens figuré en tout cas, car il appartient à l’État à travers des sociétés dont il est entièrement actionnaire ou presque. Peu importe qu’il soit financé par une contribution ou directement par l’État lui-même. L’enjeu n’est pas l’appartenance, mais l’indépendance. Or, on voit mal en quoi la contribution à l’audiovisuel public protège juridiquement cette indépendance.

Certes, à la différence d’autres taxes, la contribution à l’audiovisuel public est affectée. Cela signifie qu’elle est acquittée par le contribuable, et versée directement au budget des différentes composantes de l’audiovisuel public (télévisions, radios, INA notamment). Elle ne fait que transiter par le budget de l’État. À l’inverse, le produit des taxes non affectées va dans le budget de l’État et ressort à travers n’importe quelle dépense publique. Autrement dit, il est possible de suivre les 138 euros sortis de la poche du contribuable (coût actuel de cette taxe), jusqu’au budget des télévisions et radios publiques. Pour autant, dans les deux cas, la pérennité du montant comme de l’existence même du budget de l’audiovisuel public ne sont en rien garantis, et ne dépendent que du bon vouloir du législateur, qui peut à tout moment rogner ce budget ou le supprimer.

En vérité, l’indépendance s’acquiert bien sûr par des garanties de financement. Mais surtout par des garanties juridiques : une loi, voire une réforme constitutionnelle sanctuarisant un audiovisuel public neutre et laïc, avec une autorité de contrôle indépendante (l’ARCOM) aux pouvoirs étendus, notamment en matière financière.

 

En savoir plus ? Cliquez ici.

X