Cette semaine chez les Surligneurs : Une élection présidentielle sous la haute surveillance du Conseil constitutionnel

Publié le 29/04/2022

Et si on baissait la TVA sur l’essence ? La proposition est régulièrement agitée par les politiques, tous bords confondus. Hélas, les Surligneurs, spécialistes en legal checking, vous expliquent pourquoi ce n’est pas possible. Ils examinent aussi cette semaine les propositions d’Emmanuel Macron sur le contrôle parental et la commande publique. La première promesse sera facile à tenir, la mesure existe déjà. La deuxième en revanche est vouée à l’échec. Explications. 

 

Cette semaine chez les Surligneurs : Une élection présidentielle sous la haute surveillance du Conseil constitutionnel

 

Une élection présidentielle sous haute surveillance du Conseil constitutionnel, seul compétent pour proclamer les résultats

Conformément à l’article 58 de la Constitution, le Conseil constitutionnel veille à la régularité de l’élection du Président de la République, en coordination avec la Commission nationale de contrôle de la campagne électorale. Cette Commission transmet au Conseil constitutionnel les irrégularités portées à sa connaissance et susceptibles d’affecter la campagne des candidats. Elle comprend cinq membres, dont les présidents des trois plus hautes juridictions de France.

Dès le dimanche 24 avril, le Conseil constitutionnel a centralisé les procès-verbaux des quelque 70 000 bureaux de vote qui comprennent les éventuelles réclamations, qui émanent des électeurs, du préfet ou de l’un des candidats. Au premier tour, 19 réclamations ont été adressées et près de 10 000 suffrages exprimés ont été annulés.

Au second tour, il faut mentionner la rectification faite à Lourdios-Ichère (Pyrénées-Atlantiques), en raison de la mise en scène de Jean Lasalle. Il avait indiqué devant des caméras présentes dans le bureau de vote son refus de participer à l’élection. Selon le Conseil constitutionnel, ce comportement a constitué une “atteinte au respect dû à la dignité des opérations électorales auxquelles il a participé en qualité de candidat au premier tour”. Cette intervention a pu “altérer la sincérité du scrutin” et le Conseil constitutionnel a également rappelé que d’éventuelles poursuites pénales pourraient être engagées.

Le Conseil constitutionnel peut ainsi rectifier les résultats consignés aux procès-verbaux. C’est seulement après ces vérifications que les résultats sont proclamés par le Conseil constitutionnel, le 13 avril pour le premier tour et le 27 avril pour le second, trois jours après les votes à chaque fois.

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La question du contrôle parental sur les écrans dans le programme d’Emmanuel Macron : un dispositif qui existe déjà

Le Président pourra tenir cette promesse dès sa réélection : une obligation existe déjà à l’égard des fabricants d’appareils connectés, qui les contraint à pré-installer un dispositif de contrôle parental. La loi n° 2022-300 du 2 mars 2022 visant à renforcer le contrôle parental sur les moyens d’accès à internet impose un logiciel de contrôle parental obligatoire sur les appareils connectés.

C’est un député LREM qui avait proposé cette loi pour que les parents prennent davantage l’habitude d’utiliser des outils de contrôle proposés par les géants du numérique (moteurs de recherche, réseaux sociaux, plateformes vidéos à la demande) et par les fournisseurs d’accès à Internet. Le député constate que les parents font peu appel aux dispositifs existants, qui semblent parfois trop complexes.

En revanche, pour que la loi soit applicable, il faut l’adoption d’un décret qui ne pourra être adopté qu’après que la Commission européenne ait déclaré le dispositif conforme au droit de l’Union européenne. C’est peut-être cet aspect que le Président propose d’assurer.

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Le programme d’Emmanuel Macron sur la priorité au local pour la commande public va se confronter à des obstacles de droit européen

C’est une idée commune à de nombreux courants politiques : prévoir une préférence nationale pour la commande publique. Or c’est contraire au droit de l’Union européenne. Sur le fondement de l’interdiction en raison de la discrimination, la Cour de justice sanctionne toute mesure nationale de préférence nationale. La préférence européenne ne pose en revanche pas de difficulté.

En revanche, il est possible de prévoir des mesures qui privilégient le local pour des raisons environnementales ou sociales par exemple. Ainsi, la loi ASAP (Accélération et Simplification de l’Action Publique) du 7 décembre 2020 réserve une partie des grands marchés publics aux TPE-PME. Cette préférence ne s’applique pas qu’aux entreprises françaises, ce qui explique qu’elle soit conforme au droit de l’Union européenne, même s’il est évident que les TPE-PME françaises seront de fait avantagées. C’est aussi le cas de la loi Climat du 22 août 2021 qui renforce la place des critères environnementaux dans la commande publique. Ces critères peuvent également aboutir à privilégier des entreprises locales pour les circuits courts, donc françaises.

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Difficile d’abaisser le taux de TVA sur les énergies fossiles pour faire baisser les prix à la pompe

Cette option de baisse du taux de TVA est régulièrement évoquée par différents courants politiques pour jouer sur le pouvoir d’achat. Pourtant, même si la France est libre de fixer ses taux de TVA, il faut que ceux-ci respectent certains seuils prévus par une directive de l’Union européenne, adoptée par le Conseil, dès 1977.

Une nouvelle directive a d’ailleurs été adoptée le 5 avril 2022, qui a élargi la liste des produits pouvant bénéficier d’un taux réduit, mais cela ne comprend pas les carburants comme l’essence ou le diesel, puisque l’objectif de la modification était de favoriser les énergies bénéfiques pour l’environnement. De plus, la liste des produits et services pouvant bénéficier d’une baisse du taux, voire d’une exonération, est prévue de façon exhaustive dans la directive. Cette liste comprend des biens et des services de base (alimentation, eau, logement, soins médicaux, etc.), ou qui remplissent une fonction d’intérêt général ou culturelle (droits d’auteurs, transports, sport, enlèvement des déchets, spectacle, etc.).

L’objectif de la directive est d’éviter que les États membres profitent des taux réduits pour  se faire concurrence sur des biens ou des services qui remplissent une fonction sociale. Pour faire baisser le prix à la pompe, il faut donc trouver une autre solution.

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Le marché européen de l’électricité : impossible d’en sortir sans Frexit

La guerre en Ukraine ouvre des interrogations liées au marché de l’énergie. Marine Le Pen proposait, lors de l’élection présidentielle, de sortir du marché européen de l’énergie pour réduire les prix de l’électricité et assurer l’indépendance énergétique de la France. Seulement il s’agit d’un marché européen, duquel il n’est pas aisé de sortir.

Les articles 114 et 194 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne encadrent le marché intérieur de l’énergie, dispositif complété par un règlement de 2019, notamment prévu pour soutenir la décarbonation du secteur énergétique de l’Union européenne. Pour sortir de ce cadre, deux voies sont possibles. La première serait la modification du système en place avec une réforme adoptée par le Parlement européen et le Conseil. Récemment, en octobre 2021, une réforme avait été rejetée, demandée par la France, pour réguler justement les prix du gaz et de l’électricité. Neuf États membres ont rejeté la proposition car la concurrence entre les différentes sources de combustible contribue “à l’innovation, à la sécurité de l’approvisionnement et constitue donc un élément clé pour faciliter la transition“ vers des émissions à faible teneur en carbone, conformément à l’Accord de Paris sur le climat.

La seconde option est de sortir totalement de l’Union européenne. A défaut, c’est-à-dire en cas de violation des règles du marché européen de l’énergie, la Commission européenne pourrait engager une procédure de manquement, aboutissant in fine à des sanctions financières.

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