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Prestation de serment de la Compagnie régionale des commissaires aux comptes de Paris : le moment fort de l’audience solennelle

Publié le 27/04/2023

Le 9 février dernier, 49 impétrants ont prêté serment lors d’une audience solennelle à la cour d’appel de Paris. Un moment attendu depuis la crise sanitaire et l’occasion de rappeler les enjeux éthiques et l’importance de leurs missions aux nouveaux commissaires aux comptes.

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Sous les ors de la salle de la cour d’appel de Paris, la cinquantaine d’impétrants réunis en ce 9 févier présente des profils et des parcours différents. Ces nouveaux venus au sein de la communauté des commissaires aux comptes (CAC) sont jeunes ou moins jeunes. Certains ont déjà une solide expérience professionnelle. Parmi eux, figure Guillaume Rémy, 44 ans, diplômé depuis 2010 et devenu associé In Extenso IDF en janvier dernier.

Lors de sa prestation de serment, organisée à l’occasion d’une audience solennelle, Guillaume Rémy exprime sa fierté d’être entouré de sa famille, mais aussi des représentants du Haut Conseil du Commissariat aux Comptes (H3C) et de la Compagnie nationale et régionale des commissaires aux comptes (CNCC et CRCC), un « moment heureux » dans « l’un des endroits privilégiés de la République, au sein de la sublime salle de la cour d’appel ».

Pour Vincent Reynier, président de la Compagnie régionale des commissaires aux comptes de Paris (CRCC), « la prestation de serment est un moment capital qui marque de manière officielle l’entrée des confrères dans une profession spécifique ». Après la longue crise sanitaire, cette audience avait une saveur particulière. « Malheureusement, avec le Covid, plusieurs cours d’appel n’ont plus pris le temps de s’offrir ce moment avec les CAC car les magistrats sont déjà surchargés de travail. Théoriquement, cette audience est inscrite dans le Code de commerce, mais la loi autorise que la prestation puisse être faite par écrit. Dommage ! Ce qui était dérogatoire est devenu quelque chose d’usuel. À Paris, cela a été la double peine, avec le Covid et le procès des attentats du 13 novembre, qui a monopolisé la cour d’appel ». .. Ce moment en « présentiel » était donc attendu. « Avec le H3C nous avons voulu redonner du faste à cette manifestation pour montrer que les impétrants rentraient dans une belle profession. L’organiser à la cour d’appel, puis terminer par un cocktail au tribunal de commerce de Paris avait beaucoup de sens puisque nous travaillons énormément avec le TC de Paris en ayant aussi un rôle dans la prévention des difficultés des entreprises, et étant en relation avec les juges consulaires, les magistrats, et tous les acteurs de la chaîne pénale ». Et si les CAC ne sont pas les seuls à prêter serment, la prestation rappelle que la profession se base sur du droit et des chiffres, à cheval sur les deux matières.

Guillaume Rémy a d’ailleurs toujours été attiré par les chiffres et la diversité des contacts clients. Après son diplôme obtenu à KEDGE Business School, il s’oriente vers l’expertise-comptable et le commissariat aux comptes : « Je voulais une compétence métier en plus de mon diplôme d’école de commerce » et « avoir accès aux dirigeants, aux entreprises, à des secteurs d’activités différents, permettant de parfaire mes connaissances métiers et techniques ».

Ainsi, diplômé en 2010, il intègre le cabinet d’expertise-comptable In Extenso IDF en prenant la direction du pôle audit à l’agence d’Évry. Aujourd’hui, le départ à la retraite d’un ami et associé lui permet d’évoluer et en janvier 2023, il devient associé du cabinet. Cette nouvelle fonction « change beaucoup de choses. Avant, on me demandait une synthèse technique et je donnais un avis. Désormais, c’est moi le signataire. Cela implique de se poser les bonnes questions, notamment lorsque certains sujets deviennent rapidement complexes. Il faut savoir prendre de la hauteur au moment de signer les rapports et bien faire le lien avec les responsabilités qui vont avec ». Dans ce contexte, il est déterminant de bien maîtriser les règles de déontologie.

Le serment : un moment unique dans une carrière

Précisément, l’audience solennelle du 9 février a rappelé les missions et les obligations des CAC, comme le contrôle et la certification des comptes, la loyauté des transactions commerciales, l’obligation de révélations au procureur, entre autres choses. « La nature même de notre serment rappelle notre rapport aux règles et à la déontologie. Comme tout serment, la dimension symbolique est très importante », assène Vincent Reynier. Ce dernier estime essentiel le « rituel » d’une audience protocolaire où le procureur dresse ses réquisitions, tout comme celui de « prêter serment devant ses pairs ».

La qualité de cette cérémonie a marqué une autre impétrante, Soukaina Hajouji Idrissi. Après une école de commerce à Reims, cette dernière a effectué deux ans en audit chez KPMG. Depuis 2018, elle exerce chez Emerson comme consultante manager et fait du conseil auprès des directions financières. Elle travaille sur des dossiers variés, « trésorerie, consolidation, contrôle interne ». En parallèle, elle réalise un stage d’expert-comptable et obtient son diplôme en janvier 2023. En 2022, elle est primée pour son mémoire: « La facture électronique en B2B : nouveaux enjeux pour l’expert-comptable », par la CRCC de Paris et le Lab 50, qui met à l’honneur les jeunes experts-comptables et commissaires aux comptes nouvellement diplômés qui ont choisi d’approfondir un thème lié au numérique. Elle est désormais inscrite à l’Ordre des experts-comptables et à la Compagnie régionale des CAC.

Si aujourd’hui, elle s’épanouit complètement dans le conseil, elle ne ferme pas la porte à exercer, éventuellement un jour, la fonction de commissaire aux comptes. Quel que soit son avenir, la prestation de serment a été un moment fort pour elle aussi. « Je ne m’attendais pas à une cérémonie de cette qualité », explique-t-elle, dans un cadre impressionnant et solennel, sensible aux « discours qui nous ont rappelé les responsabilités auxquelles on s’engage ». Ces mots ont eu un écho particulier au vu de son investissement personnel. « C’est un aboutissement après plusieurs années de travail. Je m’y consacrais pendant mes soirées, mes week-ends et mes congés », confie Soukaina Hajouji Idrissi qui préparait son examen en même temps qu’elle menait sa carrière. Cette audience officialise pour elle  « l’adhésion à la profession de commissaires aux comptes. C’est un engagement à remplir une mission d’utilité publique ».

Des enjeux pour l’avenir

Dans une période économiquement troublée, les commissaires aux comptes doivent être en alerte sur leur mission de prévention. « La loi nous impose de certifier les comptes et de réaliser la prévention des entreprises en difficulté, accrues depuis la crise du Covid. La marée monte et l’alerte va encore grimper, sans oublier la partie révélation des faits délictueux », rappelle ainsi Vincent Reynier. Pour Guillaume Rémy aussi, la crise sanitaire a sensiblement modifié le contexte. Les enjeux dans l’audit des comptes concernent toujours plus « le système d’information et la protection des données ». Le mouvement de transformation des entreprises et associations s’est accéléré, donnant naissance à des « entités toujours plus digitales. À nous de bien comprendre les systèmes d’information des différentes entités, de valider les points d’entrée et de sortie des flux financiers et de nous assurer que les entités ont mis en place des process fiables pour sécuriser leurs données financières ». Dans un système où la « certification des comptes va de plus en plus vite », le commissaire aux comptes peut accompagner ses clients par des recommandations pertinentes.

À l’avenir, il espère pouvoir accompagner, de manière plus importante, les entreprises de croissance. Guillaume Rémy affirme ses choix et aimerait « être témoin et partenaire d’entreprises à fort impact sociétal qui pourraient changer le monde ».

Enfin, alors que la loi Pacte a modifié les règles de désignation des commissaires aux comptes, faisant « disparaître une partie substantielle de leur portefeuille », reconnaît Vincent Reynier, les CAC doivent s’adapter, en remplissant de nouvelles missions. « Nous voulons dépoussiérer l’image des comptables, montrer que nous sommes compétents pour certifier les bilans carbone des entreprises, les bilans extra-financiers, les diagnostics de solvabilité. Nous sommes conscients des grands enjeux comme la RSE, le numérique (dont la facture numérique), la gestion des datas, la cybersécurité ».

Face au léger tassement dû à la loi Pacte, l’une de ses priorités est de renforcer l’attractivité de la profession. « Nous étions une profession qui communiquait peu. Nous essayons de davantage le faire, tout comme de fournir un service attractif. Quand un CAC n’a pas de mandat et qu’il y a néanmoins des cotisations à payer, ce n’est pas évident. Pendant trois ans, nous fournissons un service gratuit », explique ainsi Vincent Reynier. Soukaina Hajouji n’a pas été insensible à cet effort. « Pour les jeunes inscrits, trois ans d’exonération des cotisations, avec des outils gratuits et des heures de formation, accéder aux événements, cela permet de garder le lien avec la profession ». Elle souligne ces efforts qui vont « dans le bon sens » et permettent « d’attirer de plus en plus de jeunes ».

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