Droit et risque n° 12 (3e partie)
La chronique « Droit et risque » a été créée en 2008 à l’initiative du professeur Françoise Dekeuwer-Defossez lorsqu’elle a intégré le C3RD (Centre de recherche sur les relations entre le risque et le droit) de la faculté de droit de l’université catholique de Lille. L’objectif était de mettre en lumière les contributions des chercheurs au projet scientifique de leur centre : l’étude des interactions, croisées et réciproques, entre les risques et le droit. Ainsi, depuis 12 ans, les membres du C3RD partagent avec les lecteurs des Petites affiches leurs réflexions sur la question du risque généré par les règles juridiques, leur absence ou leur mise en œuvre. Ils livrent également leur appréciation des procédés et méthodes de gestion des risques par le droit, que cela soit pour les prévenir ou pour réparer leurs conséquences en cas de réalisation.
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Courrier commun du Medef, de la CPME, de l’U2P, de la FNSEA, de l’UDES et de l’UNAPL adressé à Mme la ministre du Travail, 30 avr. 2020 (https://www.cpmenord.fr/deconfinement-la-cpme-se-mobilise-pour-clarifier-la-responsabilite-juridique-de-lemployeur/).
« Enfin, j’entends les réticences de certains maires et de certains chefs d’entreprise, qui craignent que leur responsabilité ne soit engagée. Le sujet de la responsabilité face au Covid-19 n’est pas une petite question. (…) Oui, il faut préciser la loi, rappeler la jurisprudence qui oblige le juge à tenir compte des moyens disponibles et de l’état des connaissances au moment où l’on a agi ou pas. Mais je suis nettement plus réservé s’il s’agit d’atténuer la responsabilité de chacun. » : Philippe E., DP Sénat, 4 mai 2020, https://www.senat.fr/seances/s202005/s20200504/s20200504001.html.
En ce sens, Casado A., « Covid-19 : le nouvel article L. 3136-2 du Code de la santé publique et la majesté de la loi », BJT juin 2020, n° 113s8, p. 36.
Pénicaud M., La matinale d’Europe 1, 6 mai 2020.
Document d’orientation, Négociation sur l’amélioration de la santé au travail (disponible sur https://revuefiduciaire.grouperf.com/plussurlenet/complements/20200616_Document-orientation-nego-sante-travail-130620.pdf).
Lecocq C., Dupuis B. et Forest H., Santé au travail : vers un système simplifié pour une prévention renforcée, rapp. fait à la demande du Premier ministre, août 2018, https://www.gouvernement.fr/partage/10452-rapport-de-mme-charlotte-lecocq-sur-la-sante-au-travail.
Expert C., Lanouzière H. et Seiller S., rapp. d’expertise sur la réforme de la santé au travail, sept. 2019 (disponible sur https://aist89.fr/articles_img/fichier-2_1579000229.pdf). Ce rapport tend plus spécifiquement à identifier les leviers législatifs et réglementaires permettant la mise en œuvre des recommandations du rapport Lecocq.
A ainsi été exprimé au sein du Medef, à la suite de la publication du rapport Lecocq, le souhait de « mettre en adéquation les obligations des entreprises avec les moyens alloués » et d’« alléger les contraintes légales et réglementaires » : Medef Social, rapport Lecocq-Dupuis-Forest sur la prévention en santé au travail et ses suites, août 2018, p. 4.
V. not. CPME Île-de-France, Principaux axes doctrinaux de la CPME à propos de la santé au travail, 23 avr. 2019 (http://cpmeparisiledefrance.fr/principaux-axes-doctrinaux-de-la-cpme-a-propos-de-la-sante-au-travail/).
Ou les discussions sur la future proposition de loi que devrait déposer la députée Charlotte Lecocq début 2021.
« Les entreprises qui mettent en place de bonne foi les mesures de prévention permettant de protéger la santé et la sécurité doivent être sécurisées » ; Les partenaires sociaux « sont également invités à engager une réflexion sur la force normative de ces outils [référentiels professionnels], afin de sécuriser les entreprises qui mettent en œuvre de bonne foi les préconisations de leur secteur ».
https://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/protocole-national-de-deconfinement.pdf (dans sa version mise à jour). Hervé Lanouzière, évoquant le protocole de déconfinement dans sa version initiale du 3 mai à l’élaboration duquel il a participé, souligne ainsi que « ce sont bien sûr les principes généraux de prévention qui ont présidé à la logique de la démarche. (…) C’est un cadre de référence robuste qui montre à quel point ces principes ont une portée pratique très puissante » : Lanouzière H., « Le protocole de déconfinement donne des principes et des repères », SSL, n° 1907, p. 3.
Document d’orientation, Négociation sur l’amélioration de la santé au travail (disponible sur https://revuefiduciaire.grouperf.com/plussurlenet/complements/20200616_Document-orientation-nego-sante-travail-130620.pdf).
Not. Expert C., Lanouzière H. et Seiller S., rapp. d’expertise sur la réforme de la santé au travail, sept. 2019, p. 108.
Lecocq C., Dupuis B. et Forest H., Santé au travail : vers un système simplifié pour une prévention renforcée, rapp. fait à la demande du Premier ministre, août 2018, p. 140.
Expert C., Lanouzière H. et Seiller S., rapp. d’expertise sur la réforme de la santé au travail, sept. 2019, fiche technique n° 7, p. 35, et note argumentaire n° 5, p. 108.
D’autres propositions, qui préservent le DUERP, ont été formulées : élaboration sous la responsabilité de l’employeur mais avec les conseils du service de santé et travail (Fantoni-Quinton S., « Les sirènes de la simplification au détriment de la prévention ? », SSL, n° 1862, p. 5), rédaction commune du document unique par l’employeur et le service de santé au travail avec validation des représentants du personnel (Artano S. et Gruny P., rapp. d’information sur la santé au travail n° 10, 2 oct. 2019, pp. 82-83, https://www.senat.fr/notice-rapport/2019/r19-010-notice.html) ou encore consultation obligatoire des représentants du personnel sur le document unique lors de son élaboration et de ses mises à jour (Verkindt P.-Y., Santé au travail : les CHSCT au milieu du gué, rapp. remis au ministre du Travail, févr. 2014, p. 80).
L’obligation d’évaluer les risques a été introduite à la suite de la transposition dans notre droit national de la directive n° 89/391/CEE par la loi du 31 décembre 1991.
Circ. n° 6 DRT, 18 avr. 2002 ; Caron V., « Quel bilan pour le document unique ? », SSL, n° 1232, 17 oct. 2005.
Sans cependant préjuger de la qualité des documents uniques élaborés.
DARES Résultats, La prévention des risques professionnels en 2016, 29 juin 2019, n° 29, https://dares.travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/dares_indicateurs_prevention_risques_professionnels_2016.pdf.
Communication de la Commission au Parlement européen relative à la stratégie de l’Union européenne en matière de santé et de sécurité au travail (2014-2020), 6 juin 2014, p. 6.
Communication de la Commission au Parlement européen, Des conditions de travail plus sûres et plus saines pour tous – Moderniser la législation et la politique de l’Union européenne en matière de sécurité et de santé au travail, 10 janv. 2017, p. 7.
Ces résultats s’appuient sur les réponses apportées par 45 000 établissements répartis sur 33 pays. Un échantillon de 2 251 entreprises françaises a participé à cette enquête.
Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail, ESENER 2019, https://osha.europa.eu/fr. Toutes entreprises confondues, le taux de réalisation est de 56,9 % en France contre une moyenne européenne de 76,6 %. L’enquête est également intéressante en ce qu’elle donne des indications sur les raisons qui amènent les entreprises à se préoccuper de la santé au travail : arrive nettement en tête au niveau européen comme dans les entreprises françaises interrogées le souci de répondre à une obligation légale suivie de près par la volonté de répondre aux attentes des travailleurs ou de leurs délégués. Éviter les amendes et les sanctions de l’inspection du travail n’arrivent que plus loin dans les raisons invoquées, puis le souci de maintenir la réputation de l’entreprise, celui-ci étant cependant moins marqué en France par rapport à la moyenne européenne. Enfin maintenir ou améliorer la productivité n’apparaît pas comme un levier premier d’action.
88,5 % des micro-entreprises et 93 % des entreprises de 1 à 49 salariés déclarent disposer d’une trace écrite de leur évaluation des risques (contre 97,2 % des entreprises de 50 à 249 salariés et 99,1 % des grandes entreprises).
Pour 84,8 % des micro-entreprises interrogées ; 85,7 % des entreprises de 1 à 49 salariés.
Pour 81,9 % des micro-entreprises interrogées ; 78,4 % des entreprises de 1 à 49 salariés.
42,7 % des micro-entreprises interrogées ; 43,7 % des entreprises de 1 à 49 salariés.
20,2 % des micro-entreprises interrogées ; 23 % des entreprises de 1 à 49 salariés (contre 27 % des entreprises de plus de 250 salariés. Pour les grandes entreprises françaises, la question n’est pas renseignée mais les moyennes européennes montrent que cette raison est d’autant plus invoquée que l’entreprise est grande).
CJCE, 17 févr. 2002, n° C-5/00, Commission c/ RFA.
CJCE, 15 nov. 2001, n° C-49/00, Commission c/ Italie.
CJCE, 17 févr. 2002, n° C-5/00, Commission c/ RFA.
CJCE, 5 juin 2008, n° C-226/06, Commission c/ France. Rappelons que c’est à la suite de la condamnation de la France dans cette affaire qu’a été introduite l’obligation réglementaire pour l’employeur d’informer les salariés notamment sur les modalités d’accès au document unique et les mesures de prévention qui y sont identifiées et de prévoir la mise à leur disposition du document unique.
C. trav., art. R. 4741-1, qui sanctionne d’une contravention de 5e classe le défaut d’élaboration ou de mise à jour du document unique. Dans l’absolu, il n’est toutefois pas exclu que le défaut de plan de prévention, dont la formalisation deviendrait obligatoire dans toutes les entreprises, soit assorti d’une sanction pénale.
La première conclusion que tire l’analyse finale du projet de recherche SESAME consacré à la sécurité et la santé dans les micro et petites entreprises de l’Union européenne est « qu’un système de réglementation publique et bien développé est le fondement essentiel sur lequel l’ensemble des autres acteurs et procédures s’appuient. La nécessité de renforcer et de préserver les systèmes étatiques de réglementation et d’inspection dans tous les États membres, garantissant l’application des exigences réglementaires en matière de SST sur tous les lieux de travail est l’une des principales recommandations de cette étude. ». Il regrette « la tendance générale à l’orthodoxie économique et à la déréglementation et à la diminution des ressources des services d’inspection réglementaire des MPE dans tous les États membres » de telle sorte qu’une faible priorité est généralement accordée aux MPE : Observatoire européen des risques, La sécurité et la santé dans les micro et petites entreprises au sein de l’Union européenne, rapp. final du projet triennal SESAME – Synthèse, Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail, 2018, p. 8-9.
Ou « présentant habituellement moins de risques que certains autres secteurs d’activité ».
Ou selon les termes du rapport Lecocq « les risques majeurs ».
Lecocq C., Dupuis B. et Forest H., Santé au travail : vers un système simplifié pour une prévention renforcée, rapp. fait à la demande du Premier ministre, août 2018, p. 112.
On pourrait concevoir que les termes « d’établissement » renvoient uniquement à la forme plus ou moins détaillée ou exigeante des documents, donc uniquement à la manière dont ils sont établis.
CJCE, 15 nov. 2001, n° C-49/00, Commission c/ Italie : la disposition nationale transposant la directive doit permettre « que l'employeur – au sens de la disposition de la directive ainsi transposée – puisse considérer à coup sûr qu'il est tenu d'évaluer toutes les sources de risques pour la sécurité et la santé des travailleurs existant dans son entreprise ou son établissement ». Le même arrêt précise que « l'exigence de l'article 6, paragraphe 3, de la directive n° 89/391 va au-delà de l'obligation générale de préserver l'intégrité physique des travailleurs et de respecter la législation du travail, en obligeant l'employeur à procéder à une évaluation particulière des risques pour la sécurité et la santé des travailleurs sur le lieu du travail… ».
En ce sens, Fantoni-Quinton S., « Les sirènes de la simplification au détriment de la prévention ? », SSL, n° 1862, p. 5.
Plus précisément, le suivi d’une formation à la démarche générale de prévention par le dirigeant serait une condition d’accès au dispositif afin de l’amener à s’initier à la culture de la prévention et favoriser son autonomie ultérieure.
À défaut d’adhérer à un plan de branche, l’employeur resterait tenu de l’ensemble de ses obligations.
Expert C., Lanouzière H. et Seiller S., rapp. d’expertise sur la réforme de la santé au travail, sept. 2019, note argumentaire n° 5, p. 113.
Lanouzière H. et Toussaint J., « Entretien : Déconfinement : tout savoir sur les fameuses “fiches métiers” destinées aux entreprises », Ouest France, 29 avr. 2020, https://www.ouest-france.fr/economie/entreprises/entretien-deconfinement-tout-savoir-sur-les-fameuses-fiches-metiers-destinees-aux-entreprises-6821363. Les propos de M. Lanouzière se rapportent aux fiches métiers mais la publication par le ministère des guides des branches professionnelles participe d’une même volonté.
À ce titre, le rapport final du projet SESAME souligne que « les propriétaires/directeurs et les travailleurs des MPE ont une préférence pour les solutions facilement applicables et transférables et ils sont mieux à même d’appliquer des solutions adaptées à leur secteur que des approches générales destinées à l’ensemble des MPE. L’une des options pour y parvenir pourrait être l’analyse sectorielle des besoins des MPE et de leurs travailleurs, par exemple, dans le cadre d’organisations tripartites. » : Observatoire européen des risques, La sécurité et la santé dans les micro et petites entreprises au sein de l’Union européenne, 2018, p. 11.
Spécialement, la question de la détermination des risques du métier tel qu’il est réellement exercé, à partir de situations réelles.
Sachant que jusqu’à présent seule une vingtaine de référentiels « pénibilité » ont été homologués.
Tel que l’outil OiRA déployé à l’initiative de l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail et spécialement dédié aux TPE, qui réside dans une application sectorielle d’aide à la réalisation du document unique de l’entreprise proposant des solutions « adaptées à son métier pour construire son plan d’action ». L’OPPBTP a quant à lui mis en place un service en ligne d’aide à la réalisation du document unique à destination particulièrement des entreprises du BTP de moins de 10 salariés, monDocunique Prem’s, prenant en compte les risques majeurs des principaux métiers du BTP et permettant de générer « en quelques clics » un document unique et un plan d’action.
Actualités du droit Lamy, 22 janv. 2020.
Expert C., Lanouzière H. et Seiller S., rapp. d’expertise sur la réforme de la santé au travail, sept. 2019, p. 113.
Ou demain, en appliquant un outil numérique d’évaluation sectoriel.
Ord. n° 2017-1387, 22 sept. 2017, art. 1.
Cette présomption de bonne foi ne devrait toutefois, selon le ministère du Travail, ne jouer qu’à condition que l’usager ait correctement renseigné sa situation.
On peut noter à ce titre que la promotion de l’outil monDocunique Prem’s sur le site du ministère du Travail est bien accompagné de la précision selon laquelle « ce guide ne vise pas à l’exhaustivité de l’évaluation des risques ». Mais on peut se demander s’il n’entretient pas ensuite la confusion en indiquant qu’il permet de générer « automatiquement un plan d’action "sur mesure", adapté à chaque entreprise ».
Expert C., Lanouzière H. et Seiller S., rapp. d’expertise sur la réforme de la santé au travail, sept. 2019, p. 113.
On peut à tout le moins considérer que cette présomption de bonne foi ne pourrait jouer qu’autant que l’employeur a bien décliné ces préconisations dans son entreprise.
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