Puteaux, une ville précurseur dans la lutte contre le harcèlement

Publié le 09/01/2024
Puteaux, une ville précurseur dans la lutte contre le harcèlement
Edison McCullen

Le 9 novembre dernier, on célébrait la Journée de lutte contre le harcèlement scolaire. L’occasion pour de nombreuses communes de se mobiliser. Dans les Hauts-de-Seine, la commune de Puteaux a depuis longtemps mis en place un arsenal pour sensibiliser les enfants aux violences scolaires.

En novembre dernier, Puteaux a fait la Une des journaux avec une initiative hors du commun. La commune de 44 000 habitants a fait installer à l’entrée d’une quinzaine de parcs et squares municipaux des « harcèlomètres géants ». De grands panneaux présentant les différents degrés de violence dans les relations sociales, du vert au rouge, violences que peuvent rencontrer les élèves, mais aussi les adultes dans les espaces publics, les établissements scolaires… L’harcèlomètre a été conçu sur le modèle du « Violentomètre » adapté par le Centre Hubertine Auclert à la demande du conseil régional d’Île-de-France pour lutter contre les violences faites aux femmes. Il s’agit d’un outil d’autoévaluation visuel avec 23 questions rapides à se poser permettant de repérer la présence ou menace de violences sexistes et sexuelles et de mesurer si la relation de couple est saine ou non, celui-ci a été reproduit sur de nombreux supports, y compris sur les sachets de baguettes de pain.

Conçu par les enfants du conseil communal de la jeunesse, la réglette de Puteaux comporte les numéros d’appels nationaux et ce afin que cela soit très intelligible par tous : il convient de dire stop quand « on utilise mes affaires personnelles sans me demander mon autorisation », quand « on m’interdit d’avoir des interactions avec d’autres qu’elle/lui » ou quand « on m’humilie avec des surnoms rabaissant », on est en danger quand « on m’insulte quotidiennement », « qu’on me touche les parties intimes sans me demander mon consentement » ou quand « on me dit que je ne vaux rien et je ne devrais pas exister ».

Interrogés dans le cadre de plusieurs micros-trottoirs, les habitants sont ravis, les parents d’élèves en premier, « même s’ils en parlent à l’école, je trouve ça bien d’avoir ça dans un cadre neutre », explique Léa, 35 ans, mère de deux enfants. Mais les élèves ne sont pas les seuls à être sensibilisés : « c’est l’occasion de me rendre compte que mon entourage peut aussi être victime de violences », soutient Marie, 44 ans. Les affiches, qui ont fait beaucoup parler d’elles, devraient rester en place jusqu’à la fin de l’année mais ont été distribuées sous forme de marque-pages à tous les enfants scolarisés sur la commune, de l’élémentaire au lycée.

Un arsenal qui existe depuis longtemps

Marie-Cécile Ménard, adjointe à la maire, Joëlle Ceccaldi-Raynaud, et déléguée à l’Enfance et à la Jeunesse, à la Culture, à l’animation du conseil pour l’égalité Femmes Hommes, est très fière de ce dispositif mais tient à préciser que la mairie de Puteaux multiplie les actions contre le harcèlement tout au long de l’année.

« Nous sommes très vigilants là-dessus et la communauté éducative l’est aussi. Les jeunes Putéoliens qui font partie du conseil communal de la jeunesse, ont créé cet outil à la fois pour les victimes de violences, mais aussi pour les témoins et les auteurs. Le système de graduation permet de bien comprendre l’engrenage des violences et le moment où il faut avertir les autorités compétentes ». Les élèves scolarisés en école primaires ont également droit à des ateliers conçus avec la maison du droit et de la famille : « chaque enfant scolarisé à Puteaux profite dès la maternelle d’actions de sensibilisation en fonction de l’âge des enfants : des petits jeux, des mises en scène qui leur permettent de percevoir la réalité du harcèlement au sein des bâtiments scolaires. « Mon corps, ma bulle » est un petit jeu qui sensibilise les petits de maternelle au respect de l’intégrité physique, le jeu « d’accord, pas d’accord » explique les notions de consentement aux élèves d’élémentaire avec des mises en situation qui permettent de comprendre le consentement et de développer l’empathie. Les enfants ont aussi un à deux ateliers « vivre ensemble avec respect » proposés par la Maison du droit et de la famille, ainsi qu’un ciné débat « stop harcèlement », par an ».

Une vigilance saluée, mais réclamée par les administrés

La commune a également équipé les cours de récréations de « bancs de l’amitié » : « ils ont pour vocation d’accueillir des enfants qui ne se sentent pas bien, qui se sentent seuls. Quand ils voient un de leurs camarades assis sur le banc, les enfants peuvent venir à leur rencontre, les écouter, leur venir en aide ou juste créer une amitié. Les adultes peuvent, quant à eux, prendre conscience du mal-être d’un enfant ou bien être assuré, grâce à ce banc, que l’enfant est dans la recherche de dialogue. La communauté enseignante nous a fait un bon retour sur ce dispositif ». L’adjointe à la maire de Puteaux est très fière de ces dispositifs qui ont valu à la commune de recevoir deux années de suite le prix académique « Non au harcèlement » mis en place par le ministère de l’Éducation national.

Comme le démontre l’affichage des harcèlomètres et les différents outils mis en place par la commune, l’élue est convaincue que l’anticipation est la meilleure manière de lutter efficacement contre les violences faites aux enfants, mais aussi aux femmes. « L’actualité, avec la montée des violences et des cas de suicides chez les jeunes, est terrifiante et les parents savent désormais se diriger vers la Maison du droit et de la famille, les femmes se diriger vers des acteurs comme le CIDF de Nanterre avec qui nous sommes en lien. Il faut bien se souvenir qu’il convient de parler de ces violences à tous moments de l’année, et pas seulement en novembre dans le cadre des journées de mobilisation ».

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