Qualité de consommateur et joueur de poker assidu, compétent et vivant de ses gains

Publié le 30/04/2021
Un joueur regarde ses cartes sur une table de pocker
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Ne perd pas la qualité de consommateur, la personne jouant au poker en ligne à un rythme de neuf heures par jour ouvrable pendant plusieurs années et retirant, grâce à ses compétences au poker, des gains lui permettant de vivre.

CJUE, 10 déc. 2020, no C-774/19

1. PEI, société de droit maltais, propose des services de jeu de hasard en ligne, accessibles en Slovénie où l’utilisateur est domicilié. Ce dernier, après avoir accepté les conditions générales de vente dans lesquelles figurait une clause attributive de compétence au profit des juridictions maltaises, a joué régulièrement au poker depuis 2008 et vivait de ses gains. Il a en particulier remporté, entre 2010 et 2011, la somme de 227 000 €. La société maltaise refusa cependant de lui verser la somme perçue, en raison de la violation par le joueur slovène de la réglementation du site, interdisant de créer un second compte. Le joueur, se considérant consommateur, décida alors d’agir devant les juridictions slovènes de son domicile sur le fondement des articles 15 à 17 du règlement Bruxelles I1.

Les juridictions du fond ont estimé que l’utilisateur slovène avait la qualité de consommateur et ont ainsi reconnu leur propre compétence. La société maltaise s’est donc pourvue devant la Cour suprême de Slovénie2. Cette dernière s’interroge sur la compétence des juridictions slovènes, en raison de la qualité discutable de consommateur de l’utilisateur du site. Elle relève certes que le joueur slovène a dû accepter les conditions générales fixées unilatéralement par la société maltaise, n’a pas déclaré son activité comme étant à caractère professionnel ni même n’a-t-il proposé l’activité à des tiers ni obtenu de sponsors. Néanmoins, la juridiction de renvoi observe que ce joueur a vécu de ses gains issus du jeu depuis 2008, a joué neuf heures par jour ouvrable en moyenne et avait des connaissances étendues en la matière. La Cour suprême de Slovénie décide donc de surseoir à statuer et demande à la Cour de justice si, dans une telle situation, le joueur de poker doit être considéré comme consommateur ou professionnel, qualité déterminante à la compétence internationale des juridictions slovènes3.

2. La Cour de justice répond qu’« une personne physique domiciliée dans un État membre qui, d’une part, a conclu avec une société établie dans un autre État membre un contrat pour jouer au poker sur internet, contenant des conditions générales déterminées par cette dernière, et, d’autre part, n’a ni officiellement déclaré une telle activité ni offert cette activité à des tiers en tant que service payant ne perd pas la qualité de “consommateur” au sens de cette disposition, même si cette personne joue à ce jeu un grand nombre d’heures par jour, possède des connaissances étendues et perçoit des gains importants issus de ce jeu4 ».

3. Lors de son opération de qualification, la Cour de justice procède d’abord à l’interprétation de la notion de consommateur telle qu’issue de l’article 15 du règlement Bruxelles I et réaffirme sans surprise la définition objective du consommateur (I). La mise en œuvre de cette définition ensuite, lors de l’opération de subsomption, apparaît plus surprenante, voire critiquable (II).

I – La confirmation d’une définition objective du consommateur

4. La Cour met un point d’honneur à réaffirmer sa définition objective du consommateur, selon la finalité du contrat conclu avec le professionnel (A), et prend le soin de rejeter la définition subjective, selon la compétence du contractant (B).

A – La réaffirmation d’une définition objective

5. Classiquement, la Cour commence par rappeler la définition du consommateur au sens des articles 15 à 17 du règlement Bruxelles I : le consommateur est une personne physique qui « conclut » un contrat « en dehors et indépendamment de toute activité ou finalité d’ordre professionnel, dans l’unique but de satisfaire aux propres besoins de consommation privée d’un individu ». Cette qualité n’est pas acquise « en cas de contrat ayant comme but une activité professionnelle5 ». La Cour reprend ainsi ce qu’elle avait notamment affirmé dans son arrêt Schrems6, sur lequel elle s’appuie.

Les deux qualités sont donc exclusives l’une de l’autre : la consommation privée se définit comme une activité « non professionnelle7 ». La qualité de consommateur s’apprécie donc de manière négative : l’élément déterminant de la qualification se réduit à la constatation que la personne en cause agit hors du cadre de son activité professionnelle8. Or si le caractère professionnel de l’activité est déterminant, l’on observe que la Cour n’en donne aucune définition.

6. Il nous semble possible, sur ce point, de s’en remettre à la définition donnée par Jean Savatier, selon lequel « la profession d’une personne est l’activité qu’elle exerce de manière habituelle en vue d’en tirer un revenu lui permettant de vivre9 ». Cette définition correspond d’ailleurs à celle du langage courant10. Deux critères entremêlés et cumulatifs permettraient donc d’écarter la qualité de consommateur : le caractère habituel de l’activité dans le but de retirer des moyens de subsistance, ce qui sous-entend que l’activité n’est pas simplement exercée pour en retirer un profit, mais pour en vivre, a minima11.

Philippe Le Tourneau a également proposé sept critères de la qualité de professionnel12, qui dans une certaine mesure, rejoignent ceux de Jean Savatier : le professionnel exerce habituellement (1) et officiellement (2) une activité rémunérée (3) de production, de distribution ou de prestation de service (4). Il est à la fois organisé (5), compétent (6) et jouit d’une certaine autorité sur ses subordonnés (7). Les critères avancés ne sont certes pas toujours retenus. Il en est ainsi de celui de la compétence, comme on le verra ci-dessous, mais aussi du caractère officiel de l’activité, comme en atteste la qualification de commerçant de fait, ou encore de celui des types limités d’activités, car il n’est pas d’activité professionnelle qui ne soit également civile, ce qui ne permet pas de limiter le champ des possibles13. Cela dit, ces critères montrent combien la qualification de professionnel, et donc de consommateur, est empreinte de casuistique et qu’il serait opportun que la Cour de justice arrête une définition, en vue de satisfaire à la prévisibilité des règles de compétence, dont elle clame pourtant le nécessaire respect dans l’arrêt14.

7. Afin d’apprécier la qualité de consommateur, la Cour invite les juges à « tenir compte d’une éventuelle évolution ultérieure de l’usage qui est fait des services de longue durée fournis par PEI. En effet, l’utilisateur de tels services pourrait invoquer la qualité de “consommateur” uniquement si l’usage essentiellement non professionnel de ces services, pour lequel il a initialement conclu un contrat, n’a pas acquis, par la suite, un caractère essentiellement professionnel15 ». La solution est heureuse : si le consommateur est le pendant du professionnel, dont la qualification suppose une appréciation de la régularité de l’activité, alors la caractérisation du consommateur devrait, elle aussi, s’apprécier sur la durée, et non lors de la seule conclusion du contrat.

La question se pose de savoir si le changement éventuel de qualité de l’utilisateur des services en cours de contrat a vocation à rétroagir jusqu’à la conclusion du contrat. Songeons à une personne commençant par jouer de manière occasionnelle au poker pour, plus tard, jouer régulièrement et en tirer un revenu lui permettant d’en vivre. Faut-il, aux fins de détermination de la juridiction compétente, distinguer ces deux périodes ? À la lecture de l’arrêt, la réponse semble négative, car la Cour invite le juge à vérifier si l’évolution de l’usage qui est fait des services fait ressortir un caractère essentiellement professionnel : c’est donc d’une appréciation globale de la situation contractuelle que doit découler la qualification de professionnel ou de consommateur et il n’est pas possible, pour une même situation, d’être successivement consommateur et professionnel. La solution doit être approuvée, car elle évite que des juridictions différentes soient saisies selon les étapes de vie du contrat, ce qui aurait eu pour effet d’actionner les règles relatives à la litispendance de la section 9 du règlement16.

Remarquons, par ailleurs, que la Cour réserve la qualité de consommateur à la personne physique qui contracte avec le professionnel « (…) dans l’unique but de satisfaire aux propres besoins de consommation privée (…)17 ». Il faut comprendre, pensons-nous, que la personne qui agit selon une finalité mixte – à la fois professionnelle et non professionnelle – ne saurait bénéficier de la qualité de consommateur. En tout état de cause, il y a lieu d’observer que la compétence du contractant est indifférente aux fins de qualification.

B – Le rejet d’une définition subjective

8. L’approche objective du consommateur, adoptée par la Cour, est confirmée par son rejet du critère de la compétence du joueur. Le PEI faisait pourtant valoir que la qualité de consommateur du joueur devait être écartée, car ce sont ses connaissances au poker qui lui ont permis de gagner des sommes importantes. La Cour rejette cet argument en rappelant que « les connaissances d’un particulier dans le domaine duquel relève le contrat conclu ne lui ôtent pas la qualité de “consommateur”18 et qu’au contraire, la qualité de “consommateur” d’une personne doit être examinée au regard uniquement de la position de cette dernière dans un contrat déterminé, compte tenu de la nature et de la finalité de celui-ci19 ».

En somme, parce que la qualification de consommateur suppose simplement une analyse de la finalité du contrat conclu par une personne physique avec le professionnel, la compétence de cette personne est sans importance. La solution, sous l’impulsion du droit de l’Union européenne, est classique : l’on sait, depuis son arrêt du 24 janvier 1995, que la première chambre civile de la Cour de cassation a abandonné le critère de la compétence pour qualifier une personne physique de consommateur ou de professionnel20. Une telle position est, du reste, bien ancrée dans la jurisprudence de la Cour de justice : cette dernière a par exemple précisé, dans un arrêt du 3 septembre 201521, que l’avocat, dans une affaire l’opposant à un établissement de crédit mettant en cause des clauses prétendument abusives, ne perd pas sa qualité de consommateur malgré les connaissances juridiques qu’il est censé avoir.

9. Si la solution est saluée en doctrine par le respect de la sécurité juridique qu’elle induit, certains la regrettent, en ce qu’elle ferait profiter les personnes ne le méritant pas de la protection des règles du droit de la consommation22. Sans doute pouvait-on espérer qu’une telle connaissance, à défaut de constituer une définition du consommateur, pouvait être un simple indice à prendre en considération aux fins de qualification.

Plus encore, il nous semble qu’une telle solution interroge sur les fondements du droit de la consommation. Comme le rappelle Jérôme Julien, ce droit s’est construit en réaction à la triple situation de faiblesse dans laquelle se trouve prétendument le consommateur face au professionnel : faiblesse intellectuelle, étant moins averti quant à l’objet du contrat que le professionnel, faiblesse économique et faiblesse juridique, car l’une seule des parties – le professionnel – a le pouvoir de concevoir le contenu contrat, l’imposant au consommateur23.

Or la mise à l’écart du critère de la compétence dans la définition du consommateur implique que la faiblesse intellectuelle n’apparaît plus comme un fondement du droit de la consommation. En définitive, si le consommateur est protégé c’est simplement en raison de sa faiblesse juridique et économique vis-à-vis du professionnel : ne pouvant négocier les termes du contrat qui lui sont imposés par la société maltaise, l’utilisateur slovène du site internet est bien dans une situation de faiblesse, légitimant sa qualité de consommateur.

10. Mais alors la question se pose : qu’est-ce qui justifie que, face à une telle faiblesse juridique et économique, seul le consommateur bénéficie d’un chef de compétence exclusif de protection dans le cadre du règlement Bruxelles I24 ? Il nous semble qu’un professionnel qui est amené à conclure avec un autre professionnel un contrat dont il n’a pas pu discuter le contenu est lui-même dans une situation de faiblesse juridique et économique à l’égard de son contractant, l’impossibilité de négocier traduisant, pensons-nous, un déséquilibre économique sous-jacent. Dans une situation de faiblesse analogue, ce professionnel dénué de pouvoir de négociation ne mérite-t-il de bénéficier d’une règle de conflit de juridictions protectrice ? De notre point de vue, cette protection est d’autant plus urgente que le professionnel vit (ou survit) grâce à son activité.

Une telle protection n’est, du reste, pas inconnue en droit matériel interne français. Non seulement a-t-elle été fortement appuyée en doctrine25, mais elle est de plus en plus consacrée par le législateur français. Outre les dispositions de l’article L. 442-1 du Code de commerce26, le droit français connaît, depuis l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, l’article 1171 du Code civil selon lequel, « [d]ans un contrat d’adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l’avance par l’une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite », bien que « [l]’appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation du prix à la prestation ». Certes timidement, l’idée selon laquelle certains professionnels seraient dans une situation de faiblesse a tout de même fait son entrée dans le droit commun des contrats27.

11. Quoi qu’il en soit, la Cour réaffirme son attachement à une définition objective du consommateur, dont la mise en œuvre laisse cependant à désirer dans le présent arrêt.

II – Une mise en œuvre contestable de la définition

12. Quatre facteurs sont analysés par la Cour pour apprécier la qualité de consommateur du joueur. Cependant, dans les lignes suivantes, nous concentrerons notre propos sur deux d’entre eux. Les deux autres ne nous semblent pas être de véritables facteurs à prendre en compte dans une optique de qualification : le premier, le critère de la compétence du joueur, nous a paru constituer plus une acception fondamentale du consommateur – que la Cour rejette – qu’un facteur à prendre en compte pour apprécier la qualité prédéfinie de consommateur. Le second, la prise en compte de l’évolution de l’activité, nous a plus semblé être une méthode de qualification qu’un critère. C’est pourquoi nous évaluerons, dans les lignes suivantes, la façon dont la Cour a mis en œuvre sa définition objective du consommateur à l’aune de l’importance des gains issus du jeu (A) et de la régularité de l’activité de poker (B).

A – L’importance des gains issus du jeu

13. La juridiction de renvoi a relevé que les gains issus du jeu permettaient à l’utilisateur de vivre depuis l’année 2008. Cependant, la Cour considère que le fait que l’utilisateur « a gagné des sommes importantes grâce aux parties de poker à la suite de la conclusion du contrat avec PEI n’est pas, en soi, un élément déterminant pour sa qualification ou non de “consommateur”, au sens du règlement n° 44/200128 ». La Cour justifie sa position en rappelant qu’à défaut de précision textuelle dans les articles 15 à 17 du règlement d’un montant au-delà duquel la qualification de consommateur doit être écartée, il serait contraire à l’exigence de prévisibilité des règles de compétence de soumettre la qualification de consommateur à un critère aussi vague que l’importance des gains29.

14. L’argument de la Cour laisse perplexe, car cette dernière ne paraît pas répondre à la question posée : il ne s’agissait pas tant de savoir si le fait de gagner une somme importante était de nature à écarter la qualification de consommateur, mais si un gain régulier permettant à l’utilisateur de vivre au quotidien depuis quelque année était compatible avec la qualité de consommateur. Il ne nous semble en effet pas que « des gains (…) permettant de vivre de ceux-ci30 » soient réductibles à des gains importants. Le caractère important des gains ne porte jamais que sur le montant de ceux-ci : c’est une appréciation quantitative. Des gains permettant de vivre révèlent une particularité : ce sont des gains qui peuvent être quotidiennement peu élevés mais qui se démarquent par une régularité de montant et une continuité dans le temps, de sorte à permettre d’établir un budget annuel pour la personne en cause et à maintenir un train de vie. C’est une appréciation qualitative. Il nous semble ainsi qu’il existe une différence de nature entre des gains importants – qui peuvent d’ailleurs être obtenus en une seule opération, notamment au loto – et des gains permettant de vivre de ceux-ci.

En d’autres termes, la Cour de justice aurait dû se demander si l’obtention récurrente et continue d’une somme contre l’exercice d’une activité – le poker – est de nature à exclure la qualification de consommateur. De notre point de vue, et au regard de la définition de Jean Savatier que nous avons rappelé, le fait de retirer des sommes permettant de vivre d’une activité apparaît suffisant à écarter la qualification de consommateur, dès lors que l’activité est régulière.

B – La régularité de l’activité

15. L’argument de la régularité de l’activité ne laisse pas indifférent la Cour : cette dernière rappelle, dans le sillage de son arrêt Kamenova31, que « la régularité d’une activité est un élément parmi d’autres à prendre en compte et ne détermine pas, à elle seule, la qualification à retenir à l’égard d’une personne physique au regard de la notion de “professionnel”32 ». Cela étant, elle considère que l’argument de la régularité de jeu de l’utilisateur slovène – qui jouait tout de même neuf heures par « jours ouvrables33 » pendant plusieurs années, ce qui laisse entendre qu’il ne jouait pas les jours de repos – ne lui fait pas perdre la qualité de consommateur, pour deux raisons.

16. La Cour considère d’une part que la situation d’espèce diffère de celle de l’arrêt Kamenova : dans le présent arrêt, l’utilisateur slovène ne joue ni dans le but de revendre, ni dans le but de fournir un service à un tiers par la suite34. Il nous semble devoir comprendre que, selon la Cour, la qualité de professionnel ne peut pas être attachée à l’activité du joueur slovène, car ce dernier se situe à l’extrême bout de la chaîne de distribution. Il serait, en quelque sorte, celui qui consomme le service, en ce sens qu’il en épuise totalement sa valeur économique35. On rejoint ici une acception matérielle, voire économique de la consommation36. L’argument ne convainc cependant pas, par son manque de parfaite cohérence avec la définition retenue du consommateur : ce dernier est simplement celui qui agit en dehors de tout cadre professionnel, sans que sa position dans la chaîne commerciale importe. Certes, il sera généralement au bout de cette chaîne. Cependant, selon certains auteurs, le seul fait, pour une personne, de revendre un objet à un professionnel, et donc de remettre un bien dans le circuit de distribution, ne lui fait pas perdre sa qualité de consommateur37 : c’est expressément le cas, en droit français, pour le rachat des métaux précieux par un professionnel38.

17. La Cour écarte, d’autre part, la qualification de professionnel, car elle considère que l’utilisateur « n’a pas déclaré officiellement cette activité39 ». Encore une fois l’argument laisse perplexe : au-delà du fait que cela sonne comme un aveu que l’utilisateur était bien, de fait, un professionnel, on sait à quel point, en droit commercial français, l’absence de déclaration d’une activité commerciale est sans incidence sur la qualification de commerçant40. Cette affirmation est d’ailleurs corroborée dans le domaine du droit de la consommation, où la Cour de cassation a rappelé que le fait de ne pas être inscrit au registre du commerce et des sociétés n’est pas en soi exclusif de la qualité de professionnel41.

18. De manière générale, on peut regretter la méthode adoptée par la Cour pour apprécier la qualité de consommateur : si l’évaluation séparée de chacun des critères semble emporter, ici, la qualification de consommateur, on peut penser qu’une appréciation globale de la situation aurait fait pencher la balance en faveur de la qualification de professionnel. Une telle approche d’ensemble aurait été, du reste, plus conforme à la définition multifactorielle du professionnel de Philippe Le Tourneau. Mais surtout, elle aurait été en adéquation avec la position de la Cour de justice elle-même qui précise bien, lorsqu’elle analyse les facteurs de l’importance des gains et de la régularité de l’activité, que le premier « n’est pas, en soi, un élément déterminant42 » et que le second n’est qu’« un élément parmi d’autres à prendre en compte43 » aux fins de qualification44.

Notes de bas de pages

  • 1.
     Nos 11-16 de l’arrêt.
  • 2.
    Nos 17-18 de l’arrêt.
  • 3.
    Nos 19-22 de l’arrêt.
  • 4.
    N° 50 de l’arrêt.
  • 5.
    N° 30 de l’arrêt.
  • 6.
    CJUE, 25 janv. 2018, n° C-498/16 : D. 2018, p. 2000, note F. Jault-Seseke et C. Zolynski ; D. 2018, p. 966, obs. S. Clavel et F. Jault-Seseke ; D. 2018, p. 1033, obs. B. Fauvarque-Cosson et W. Maxwell ; D. 2018, p. 1934, obs. L. d’Avout et S. Bollée ; D. 2018, p. 2270, obs. J. Larrieu, C. Le Stanc et P. Tréfigny ; D. 2019, p. 607, obs. H. Aubry, E. Poillot et N. Sauphanor-Brouillaud ; AJ contrat 2018, p. 124, obs. V. Pironon ; Dalloz IP/IT 2018, p. 371, obs. M. Combet ; Rev. crit. DIP 2018, p. 595, note H. Muir Watt ; Comm. com. électr. 2018, comm. 19, obs. G. Loiseau ; Procédures 2018, comm. 80, obs. C. Nourissat.
  • 7.
    Nos 31 et 38 de l’arrêt.
  • 8.
    G. Paisant, Droit de la consommation, 1re éd., 2020, PUF, p. 28, n° 25.
  • 9.
    J. Savatier, « Contribution à une théorie générale de la profession », Dix ans de conférences d’agrégations. In Études de droit commercial offertes à Joseph Hamel, 1961, Dalloz, p. 3-17, spéc. p. 6, n° 6 ; « Profession », in Cornu G., Vocabulaire juridique, 9e éd., 2011. À rappr., G. Paisant, Droit de la consommation, 1re éd., 2020, PUF, p. 24, n° 22.
  • 10.
    « Profession », in Trésor de la Langue Française informatisé, B.1.
  • 11.
    En ce sens, J. Calais Auloy, M. Depincé et H. Temple, Droit de la consommation, 10e éd., 2020, Dalloz, p. 5, n° 4.
  • 12.
    P. Le Tourneau, LPA 12 sept. 2005, p. 4.
  • 13.
    N. Sauphanor-Brouillaud, et a., Les contrats de consommation. Règles communes, 2013, Lextenso, p. 149, n° 160 ; CJCE, 30 mai 2013, n° C-488/11, n° 23-34 (refusant de limiter la directive n° 93/13 à certains types de contrats).
  • 14.
    Nos 35-36 de l’arrêt.
  • 15.
    N° 42 de l’arrêt.
  • 16.
    Sur ce point, L. Usunier, JCl. Droit international, fasc. 584-170.
  • 17.
    N° 30 de l’arrêt.
  • 18.
    N° 40 de l’arrêt.
  • 19.
    N° 39 de l’arrêt.
  • 20.
    Cass. 1re civ., 24 janv. 1995, n° 99-12512 : D. 1995, p. 237, note G. Paisant ; D. 1995, p. 229, obs. P. Delebecque ; RTD civ. 1995, p. 360, obs. J. Mestre ; Contrats, conc. consom. 1995, p. 5, note L. Leveneur, JCP G 19965, I 3893, spéc., n° 28, obs. G. Viney.
  • 21.
    CJUE, 3 sept. 2015, n° C-110/14 : JCP G 2015, 1110, note G. Paisant.
  • 22.
    Sur les termes du débat, not. S. Piédelièvre, Droit de la consommation, 3e éd., 2020, Economica, p. 32, n° 28.
  • 23.
    J. Julien, « La consumérialité », in Études à la mémoire de Philippe Neau-Leduc, 2018, Lextenso, p. 538 et s., spéc. p. 543, n° 7.
  • 24.
    Mis à part les compétences en matière d’assurances et de contrats individuels de travail.
  • 25.
    J.-P. Chazal, D. 1997, p. 260, spéc. nos 17 et s.
  • 26.
    Sur cet article, H. Hadj-Aïssa, Contribution critique à l’étude du déséquilibre significatif au sens de l’article L. 442-1 du Code de commerce, thèse dact., X. Henry (dir.), 2019, université de Lorraine.
  • 27.
    Comp. O. Deshayes, T. Genicon et Y.-M. Laithier, Réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, 2016, LexisNexis, p. 309-310, (art. 1171).
  • 28.
    N° 34 de l’arrêt.
  • 29.
    N° 35 de l’arrêt.
  • 30.
    N° 33 de l’arrêt.
  • 31.
    CJUE, 4 oct. 2018, n° C-105/17 : Comm. com. électr. 2018, comm. 90, obs. G. Loiseau ; Dalloz IP/IT 2018, p. 702. obs. A. Lecourt ; Contrats, conc. consom. 2018, comm. 206, obs. S. Bernheim-Desvaux ; Europe 2018, comm. 487, obs. S. Cazet ; D. 2019, p. 607, obs. H. Aubry ; Contrats, conc. consom. 2019, chron. 3, obs. C. Aubert de Vincelles.
  • 32.
    N° 45 de l’arrêt.
  • 33.
    N° 43 de l’arrêt.
  • 34.
    N° 48 de l’arrêt.
  • 35.
    G. Paisant, Droit de la consommation, 1re éd., 2020, PUF, p. 30, n° 26.
  • 36.
    N. Sauphanor-Brouillaud, et a., Les contrats de consommation. Règles communes, 2013, Lextenso, p. 101-102, n° 100.
  • 37.
    G. Paisant, Droit de la consommation, 1re éd., 2020, PUF, p. 30, n° 26.
  • 38.
    C. consom., art. L. 224-96 et s. Comp, doutant de l’applicabilité du droit de la consommation en toute hypothèse où le consommateur est vendeur, E. Gicquiaud, D. 2014, p. 559, spéc. p. 562, n° 11.
  • 39.
     N° 48 de l’arrêt.
  • 40.
    En général, L. Maupas, JCP E 2018, 1530.
  • 41.
    Cass. 1re civ., 6 juin 2018, nos 17-16519 et 17-16520 : JCP N 2018, 555, spéc. n° 25 ; JCP G 2018, 734 ; JCP E 2018, 1350 ; RD bancaire et fin. 2019, comm. 7, note N. Mathey ; Contrats, conc. consom. 2018, comm. 164, note S. Bernheim-Desvaux.
  • 42.
    N° 34 de l’arrêt (nous le soulignons).
  • 43.
    N° 46 de l’arrêt.
  • 44.
    L’auteur tient à remercier M. Hakim Hadj-Aïssa (MCF, UVSQ) pour sa précieuse relecture.
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