La notion de parasitisme : une mise au point de la Cour de cassation

Publié le 10/07/2024 à 6h29
La notion de parasitisme : une mise au point de la Cour de cassation
Cour de cassation Chambre civile (Photo : ©P. Cabaret)

Soutenant que des objets mise en vente dans des supermarchés reproduisaient un décor créé par son bureau d’étude de style en 2010 et commercialisé sous forme de tableau sur support toile, la société Maisons du monde assigne les sociétés de grande distribution en paiement de dommages et intérêts pour concurrence déloyale et parasitisme.

Le parasitisme économique est une forme de déloyauté, constitutive d’une faute, au sens de l’article 1240 du Code civil, qui consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d’un autre afin de tirer indûment profit de ses efforts, de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis (Cass. com., 16 févr. 2022, n° 20-13542).

Il appartient à celui qui se prétend victime d’actes de parasitisme d’identifier la valeur économique individualisée qu’il invoque (Cass. com., 26 juin 2024, n° 23-13535), ainsi que la volonté d’un tiers de se placer dans son sillage (Cass. com., 3 juill. 2001, n° 98-23236).

Le savoir-faire et les efforts humains et financiers propres à caractériser une valeur économique identifiée et individualisée ne peuvent se déduire de la seule longévité et du succès de la commercialisation du produit (Cass. com., 5 juill. 2016, n° 14-10108) et, les idées étant de libre parcours, le seul fait de reprendre, en le déclinant, un concept mis en œuvre par un concurrent ne constitue pas, en soi, un acte de parasitisme (Cass. 1re civ., 22 juin 2017, n° 14-20310).

Après avoir relevé que le tableau sur toile commercialisé par la société Maisons du monde, était composé de différents clichés, disponibles en droit libre sur internet, qui ont été acquis, reproduits et agencés sur la toile, et considéré que les décors des tasses et bols commercialisés par les sociétés de grande distribution n’étaient pas des copies serviles de ces clichés, l’arrêt relève, d’abord, que la toile a été commercialisée sur une période limitée, qu’elle n’a jamais été mise en avant comme étant emblématique de la collection « vintage », genre alors en vogue, et que la société Maisons du monde n’était pas la seule à exploiter, et qu’elle n’était pas même caractéristique de l’univers des produits de cette société, qui développait simultanément d’autres collections. Elle retient, ensuite, qu’il ressort de l’attestation de la styliste de la société Maisons du monde que celle-ci a conçu seule un décor constitué « d’images cultes » évocatrices du style de vie américain des années cinquante, disponibles sur internet, et que la société Maisons du monde n’avait aucun droit de propriété intellectuelle sur les éléments de ces décors, que le décor du tableau y figurant n’a pas ensuite été décliné sur d’autres produits et qu’il constituait une combinaison banale d’images préexistantes qui n’avait jamais été mise en avant comme emblématique de l’univers de sa marque.

En l’état de ces seules constatations et appréciations souveraines, desquelles il ressort qu’en créant et commercialisant la toile, la société Maisons du monde n’a pas produit une valeur économique identifiée et individualisée, la cour d’appel retient exactement, par une motivation suffisante, qu’aucun acte de parasitisme n’avait été commis.

Sources :
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