L’optimisation fiscale et le devoir de prudence et de conseil de l’avocat

Publié le 01/07/2025 à 6h26

tribunal ; cour de cassation

Un justiciable réalise une opération d’optimisation fiscale sur le conseil et le concours d’un avocat. L’administration fiscale lui ayant notifié une proposition de rectification de l’impôt sur le revenu, fondée sur l’article L. 64 du Livre des procédures fiscales (LPF) réprimant l’abus de droit, position approuvée par le comité consultatif pour la répression de l’abus de droit (CCRAD) et après recours en contestation devant la juridiction administrative, dont il se désiste en raison d’un accord conclu l’administration réduisant les pénalités et majorations, le contribuable assigne l’avocat en responsabilité et indemnisation.

Tenu d’un devoir de conseil et de prudence, l’avocat a l’obligation d’appeler l’attention de son client sur les incertitudes du droit positif au jour de son intervention et sur les risques pouvant affecter la validité ou l’efficacité de l’opération projetée.

Après avoir retenu, d’une part, qu’à la date de l’intervention de l’avocat, le Conseil d’État admettait déjà l’existence d’un abus de droit lorsque le contribuable a pour but d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que l’intéressé aurait normalement supportées eu égard à sa situation et à ses activités réelles, d’autre part, que, s’il n’avait pas statué sur le fondement de l’article L. 64 du LPF en cas de sursis d’imposition, dès 2007 et 2008, certaines juridictions administratives avaient admis l’application de ce texte au sursis d’imposition malgré le caractère de plein droit de cette mesure, la cour d’appel constate que, même s’il avait indiqué à son client que l’administration avait tendance à remettre en cause ce type d’opérations sur le fondement de l’abus de droit à défaut d’investissement du prix de cession des titres apportés dans le développement d’une activité industrielle, commerciale ou artisanale, l’avocat avait conclu de manière péremptoire et peu étayée que l’opération ne présentait aucun risque en se fondant seulement sur les avis du CCRAD de 2005.

Elle relève ensuite, d’une part, que, toujours chargé de procéder aux formalités déclaratives, l’avocat n’avait alors pas appelé l’attention de son client sur la nécessité de procéder, avant la fin de cette année, à des investissements significatifs dans des activités économiques, malgré un arrêt du Conseil d’État du 8 octobre 2010 faisant application de l’article L. 64 du LPF au report d’imposition aux motifs que l’intérêt fiscal de la mesure était de différer l’imposition et que celle-ci entrait dans le champ d’application de cet article dès lors qu’elle avait nécessairement pour effet de minorer l’assiette de l’année au titre de laquelle l’impôt est normalement dû en raison de la situation et des activités réelles du contribuable et retenu, d’autre part, que cette solution était transposable au sursis d’imposition produisant des effets similaires.

De ces seuls motifs et sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, elle a pu déduire qu’au regard de l’état du droit à l’époque de ses interventions successives, l’avocat avait manqué à ses devoirs de prudence et de conseil.

Sources :
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