Droit européen et qualification d’agent commercial
Un commerçant en vin fait appel à une société pour vendre ses produits en Russie, sans qu’aucun contrat écrit ne soit formalisé puis, plusieurs années plus tard, l’informe qu’il met fin à ses relations avec un client qui représentait 90 % de ses ventes en Russie.
Estimant que ce commerçant a rompu le contrat d’agent commercial les liant, la société l’assigne en paiement d’une indemnité compensatrice de préavis et d’une indemnité de rupture.
Selon l’article L. 134-1, alinéa 1er, du code de commerce, tel qu’interprété à la lumière de la directive 86/653/CEE du Conseil du 18 décembre 1986 relative à la coordination des droits des États membres concernant les agents commerciaux indépendants, l’agent commercial est un mandataire qui, à titre de profession indépendante, sans être lié par un contrat de louage de services, est chargé, de façon permanente, de négocier et, éventuellement, de conclure des contrats de vente, d’achat, de location ou de prestation de services, au nom et pour le compte de producteurs, d’industriels, de commerçants ou d’autres agents commerciaux.
La CJUE énonce (CJUE, 4 juin 2020, n° C-828/18, Trendsetteuse) que les tâches principales d’un agent commercial consistent à apporter de nouveaux clients au commettant et à développer les opérations avec les clients existants et que l’accomplissement de ces tâches peut être assuré par l’agent commercial au moyen d’actions d’information et de conseil ainsi que de discussions, qui sont de nature à favoriser la conclusion de l’opération de vente des marchandises pour le compte du commettant, même si l’agent commercial ne dispose pas de la faculté de modifier les prix desdites marchandises. Il résulte de la généralité de ces termes qu’il n’est pas nécessaire de disposer de la faculté de modifier les conditions des contrats conclus par le commettant pour être agent commercial.
La cour d’appel rejette les demandes de la société, après avoir rappelé que c’est au regard des missions effectivement exécutées par cette dernière que doit être vérifié si elle était chargée de manière permanente de négocier et, éventuellement, de conclure les contrats au nom et pour le compte du commerçant en vins, constate que ce dernier n’a pas confié à la société la négociation des contrats avec le client, gardant la maîtrise et le contrôle de la détermination des conditions des contrats et, en particulier, des prix. L’arrêt retient que le fait que le commerçant ait pu demander à la société de se faire remettre les contrats ou de les faire signer et les rapporter s’inscrit dans la mission de présentation des produits et de soutien des relations commerciales, qui ne se confond pas avec une mission d’agent commercial telle que définie par la loi et que le fait que la société ait assuré le suivi des livraisons et des paiements ne permet pas d’établir l’existence d’un contrat d’agent commercial, pas plus que le fait qu’elle ait amené les relations commerciales du commerçant en vins à se développer.
En statuant ainsi, en se fondant sur l’impossibilité de la société de modifier les conditions des contrats, et en particulier les prix, la cour d’appel viole le texte susvisé.
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