Google : refuser l’interopérabilité de sa plateforme avec une application tierce peut constituer un abus de position dominante

Publié le 25/02/2025 à 11h40

Saisie à titre préjudiciel, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) précise les conditions dans lesquelles le refus d’une entreprise en position dominante d’assurer l’interopérabilité entre sa plateforme numérique et une application tierce peut être abusif et produire des effets anticoncurrentiels.

Le refus de permettre l’interopérabilité peut être abusif

En 2018, Enel X Italia Srl, qui gère plus de 60 % des bornes de recharge disponibles pour les véhicules automobiles électriques en Italie, a demandé à Google de permettre l’interopérabilité de son application de recharge de véhicules automobiles électriques, avec Android Auto. Devant le refus de Google, Enel X Italia a saisi l’autorité italienne de la concurrence, qui a considéré que le comportement de Google constituait un abus de position dominante au sens de l’article 102 TFUE et a infligé une amende de plus de 100 millions d’euros à Alphabet, Google et Google Italy. Ces sociétés ont saisi le juge administratif italien d’un recours contre cette décision. Ce recours ayant été rejeté, elles ont interjeté appel devant le Consiglio di Stato (Conseil d’État, Italie), qui a interrogé la CJUE sur l’interprétation de la notion d’« abus de position dominante » au sens de l’article 102 TFUE en présence d’un tel refus d’accès.

Aux termes de son arrêt du 25 février 2025, la CJUE estime que le refus de permettre l’accès à ladite plateforme numérique est susceptible de constituer un abus de position dominante, alors même que cette plateforme n’est pas indispensable pour l’exploitation commerciale de l’application concernée sur le marché en aval, mais est de nature à la rendre plus attractive pour les consommateurs.

Ainsi, sauf à justifier de raisons objectives à un tel refus, l’entreprise en position dominante est tenue d’assurer l’interopérabilité dans un délai raisonnable, en tenant compte des difficultés rencontrées pour ce développement et des besoins de l’entreprise tierce, et moyennant, le cas échéant, une contrepartie financière appropriée, juste et proportionnée, eu égard au coût réel du développement et au droit de l’entreprise en position dominante d’en retirer un bénéfice approprié.

Le refus de permettre l’interopérabilité peut être justifié par certaines circonstances

La Cour observe que le refus d’assurer l’interopérabilité d’une application tierce avec la plateforme numérique d’une entreprise en position dominante peut être objectivement justifié lorsque l’octroi d’une telle interopérabilité compromettrait l’intégrité de la plateforme concernée ou la sécurité de son utilisation, ou lorsque d’autres raisons techniques rendraient impossible cette interopérabilité.

 

Sur cet arrêt, voir LEDICO mars 2025, n° DDC202w9, note J. Vogel et L. Vogel.

Sources :
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