Application immédiate de la loi pénale en matière de contrefaçon

Publié le 17/06/2025 à 6h45

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La filiale d’un groupe espagnol revend des rétroviseurs fabriqués par ce groupe, lui-même équipementier de première monte de constructeurs français.

À l’issue de l’information ouverte sur ces faits, cette société et son dirigeant sont renvoyés devant le tribunal correctionnel qui les déclare coupables notamment de détention de marchandises présentées sous une marque contrefaisante, importation et vente ou mise en vente de telles marchandises, détention de marchandises contrefaisantes sans document justificatif régulier constitutive d’un fait réputé importation en contrebande, importation sans déclaration en douane applicable à une marchandise prohibée.

Pour appliquer immédiatement aux prévenus les dispositions de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets qui a modifié l’article L. 513-6 du Code de la propriété intellectuelle en précisant que les droits conférés par l’enregistrement d’un dessin ou modèle ne s’exercent pas à l’égard d’actes qui visent à rendre leur apparence initiale à un véhicule à moteur et qui sont réalisés par l’équipementier ayant fabriqué la pièce d’origine, entrés en vigueur postérieurement aux faits, la cour d’appel  retient qu’elles n’ont modifié ni les peines encourues ni la définition de la protection des dessins et modèles, mais qu’elles ont créé un régime exonératoire de responsabilité pénale dont peut se prévaloir l’équipementier d’origine et s’analysent en une loi pénale plus douce.

Elle précise que l’exonération de responsabilité pénale de l’équipementier d’origine concerne les pièces qu’il fabrique et qu’il peut de ce fait librement céder, que les participants à la chaîne commerciale entre ce dernier et le consommateur ne peuvent donc être poursuivis et qu’une lecture contraire de la loi la rendrait inutile si l’équipementier ne pouvait pas céder les pièces qu’il produit licitement.

Elle relève enfin que l’application immédiate de ces dispositions n’est pas contraire au droit de propriété.

En effet, en premier lieu, les dispositions législatives modifiant l’article L. 513-6 du Code de la propriété intellectuelle ont redéfini, dans un sens favorable aux prévenus, le champ de l’incrimination pénale tendant à la protection des droits en matière de dessins et modèles.

En deuxième lieu, ces dispositions portent auxdits droits une atteinte proportionnée au but légitime poursuivi, les travaux parlementaires établissant qu’elles ont pour objet de favoriser, par l’ouverture à la concurrence du marché des pièces détachées visibles, l’entretien et la réparation des véhicules automobiles afin d’éviter que, en raison du coût excessif par rapport à leur amortissement, des véhicules qui pourraient continuer à rouler ne soient mis au rebut.

En troisième et dernier lieu, en interprétant ces dispositions comme étant applicables non seulement à l’équipementier d’origine, mais aussi à la chaîne commerciale existant entre lui et le consommateur, la cour d’appel leur confère leur exacte portée sans méconnaître le principe d’interprétation stricte de la loi pénale.

Sources :
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