Extradition vers un État tiers à l’UE

Publié le 20/10/2022

Un ressortissant luxembourgeois fait l’objet d’une arrestation provisoire en France aux fins d’extradition, sur la base d’un mandat d’arrêt par une juge américaine, pour des faits de complot en vue de commettre une fraude électronique et complot en vue de commettre un blanchiment commis notamment aux Etats-Unis et au Luxembourg.

La chambre de l’instruction ordonne, avant dire droit, un complément d’information et le procureur général transmet à la chambre de l’instruction des échanges de courriels avec les autorités judiciaires luxembourgeoises, aux termes desquels le parquet général du tribunal d’arrondissement de Luxembourg indique qu’il n’entend pas reprendre les poursuites menées contre l’intéressé par les autorités américaines et par conséquent confirme que le Luxembourg n’adressera dans ce contexte pas de mandat d’arrêt européen à la France.

Il se déduit de la jurisprudence de la CJUE que l’État membre dont la personne réclamée a la nationalité n’a pas l’obligation de rendre une décision formelle, dûment motivée et susceptible d’un recours juridictionnel.

La réception de la demande d’extradition ne peut être analysée, en l’espèce, comme un changement pertinent de la situation de l’intéressé, dès lors que les informations communiquées par le ministre français de la justice, après arrestation provisoire du requérant, mentionnaient expressément l’existence d’une demande d’extradition pour poursuites pénales et étaient suffisamment précises pour permettre aux autorités judiciaires du Luxembourg d’apprécier l’opportunité de délivrer un mandat d’arrêt européen contre lui.

La CJUE énonce qu’en l’absence d’émission d’un mandat d’arrêt européen par l’État membre dont la personne réclamée a la nationalité, l’État membre requis peut procéder à son extradition, à condition d’avoir vérifié que cette extradition ne portera pas atteinte aux droits visés à l’article 19, alinéa 2, de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

Pour ce faire, cet État membre, conformément à l’article 4 de cette Charte, qui interdit les peines ou les traitements inhumains ou dégradants, ne saurait se limiter à prendre en considération les seules déclarations de l’État tiers requérant ou l’acceptation, par ce dernier État, de traités internationaux garantissant, en principe, le respect des droits fondamentaux, mais se fonder sur des éléments objectifs, fiables, précis et dûment actualisés, éléments pouvant résulter, notamment, de décisions judiciaires internationales, telles que des arrêts de la CEDH, des décisions judiciaires de l’État tiers requérant ainsi que des décisions, des rapports et d’autres documents établis par les organes du Conseil de l’Europe ou relevant du système des Nations unies.

En l’espèce, pour écarter le grief tiré du risque de traitement inhumain et dégradant, l’arrêt attaqué énonce, en substance, que les documents produits par la défense font état d’inquiétudes et de préoccupations sur des pratiques pénitentiaires et des agressions sur des détenus estimées trop répandues, sans que l’isolement cellulaire ne soit identifié comme systématique.

Les juges en déduisent que ces éléments ne constituent pas un tableau objectif, fiable, précis et dûment actualisé des éventuelles conditions de détention de l’intéressé, détention qui par ailleurs en l’état actuel de la procédure est hypothétique dans son principe et incertaine dans ses modalités.

En conséquence, la cour d’appel retient exactement qu’aucun élément objectif, fiable, précis et dûment actualisé caractérise l’existence d’un risque, pour la personne réclamée, d’être soumise à une détention dans des conditions portant atteinte à la dignité humaine.

Sources :
Rédaction
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