La responsabilité de l’agent immobilier lorsque la vente est annulée
L’acquéreuse d’un bien conclut avec son vendeur un contrat de réservation en vue de l’acquisition d’une « habitation légère de loisirs » au sein d’un ensemble immobilier.
Le contrat, conclu par l’intermédiaire d’un agent immobilier, prévoit un engagement de location du bien à usage de résidence de tourisme par l’acheteuse au profit d’une société exploitante, selon un projet de bail commercial joint en annexe. L’acquisition est financée au moyen d’un crédit.
La société locataire ayant cessé de payer les loyers et fait l’objet d’un redressement judiciaire, l’administrateur judiciaire informe l’acquéreuse de son intention de ne pas poursuivre le bail conclu avec elle.
Cette dernière assigne alors le vendeur, l’agent immobilier et son assureur, le prêteur, la SCP notariale et son assureur en nullité de la vente pour vices du consentement et, consécutivement, du prêt immobilier, ainsi qu’en responsabilité et indemnisation de ses préjudices.
La cour d’appel, relevant d’abord qu’il n’est justifié d’aucune circonstance qui aurait dû alerter le notaire sur une anomalie ou un déséquilibre contractuel lié à l’acte authentique à établir, de nature à l’amener à surseoir à ses opérations, à solliciter des précisions ou à réaliser des investigations complémentaires, fait ressortir ensuite que le notaire n’a pas eu connaissance du projet de défiscalisation de l’acquéreur et peut en déduire qu’il ne peut être reproché à celui-ci de ne pas avoir informé l’acquéreur sur les risques inhérents à un bail commercial auquel il était étranger ou sur l’absence de sécurité du placement et qu’il n’a ainsi pas commis de faute.
Il résulte de l’article 1240, du Code civil que, si la restitution du prix par suite de l’annulation du contrat de vente ne constitue pas en elle-même un préjudice indemnisable, l’agent immobilier dont la faute a concouru, au moins pour partie, à l’anéantissement de l’acte peut être condamné à en garantir le paiement en cas d’insolvabilité démontrée du vendeur.
Viole ce texte la cour d’appel qui, pour rejeter la demande de l’acquéreur formée contre l’agent immobilier et tendant à la réparation du préjudice lié à l’impossibilité d’obtenir la restitution du prix de vente du fait de l’insolvabilité du vendeur, retient que la perte du bien immobilier découle du seul choix procédural de l’acquéreur de maintenir sa demande de nullité de la vente nonobstant l’état de liquidation judiciaire de son vendeur et est étrangère à la faute imputable à l’agent immobilier, après avoir constaté que l’agent immobilier a commis une faute sans laquelle l’acquéreur ne se serait pas engagé et que le vendeur est placé en liquidation judiciaire.
Il résulte du même texte que le vendeur dont le dol est à l’origine de l’annulation de la vente et l’agent immobilier dont la faute a concouru à la nullité de la vente sont tenus de réparer toutes les conséquences dommageables qui en résultent pour l’acquéreur.
Viole encore ce texte la cour d’appel qui, pour rejeter la demande de l’acquéreur tendant à l’indemnisation de la perte des loyers escomptés, retient que, à la suite de l’annulation à effet rétroactif de la vente, l’acquéreur ne peut prétendre avoir subi un préjudice imputable à son vendeur au titre de loyers impayés, l’immeuble acquis étant censé n’être jamais entré dans son patrimoine, et que, à défaut de s’être engagé, il n’aurait pu prétendre à des loyers en exécution d’un bail qu’il n’aurait pas souscrit, de sorte que les indemnisations qu’il réclame au titre des loyers impayés ne constituent pas un préjudice en lien de causalité avec les manquements reprochés à l’agent immobilier, alors que la faute de l’agent immobilier a contribué à l’annulation de l’acte qu’elle a prononcée pour dol.
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