Le contrôle judiciaire de dénaturation des écrits médicaux dans la protection juridique des majeurs

Publié le 22/09/2023
Le contrôle judiciaire de dénaturation des écrits médicaux dans la protection juridique des majeurs
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Pour la première fois, le grief de dénaturation conduit la Cour de cassation à annuler une mesure de protection juridique prononcée sans respecter le contenu du certificat médical circonstancié. Exceptionnel, le contrôle de dénaturation d’une pièce maîtresse de la procédure tutélaire permet à la Cour de cassation de rééquilibrer, dans le respect des textes et de l’esprit de la législation, les pouvoirs réciproques du médecin inscrit sur la liste du procureur de la République et du juge des tutelles des majeurs.

Cass. 1re civ., 11 mai 2023, no 21-19173

1. L’équilibre entre le médical et le judiciaire. Primordial, essentiel, l’arrêt de cassation du 11 mai 2023 doit être connu de tous les acteurs de la protection juridique des majeurs. Non seulement « la garantie suprême de la liberté civile paraît bien être dans ce délicat équilibre de pouvoirs entre (…) le médical et le judiciaire »1 mais il revient à la Cour de cassation de faire respecter cet équilibre à cette fin. Depuis le 1er janvier 2009, date d’entrée en vigueur de la loi du 5 mars 20072, le prononcé3 et le renforcement4 d’une mesure de protection juridique sont subordonnés à la présentation d’un certificat médical circonstancié émanant d’un médecin inscrit sur la liste du procureur de la République. Plus rigoureuse que son illustre devancière (la loi Carbonnier du 3 janvier 1968), la loi Hauser5 du 5 mars 2007 sanctionne par l’irrecevabilité6 la requête qui n’est pas accompagnée d’un tel certificat médical. En dépit de dispositions plus longues et plus précises7, la loi de 2007 garde le silence sur la force contraignante attachée au contenu de ce certificat médical ; elle ne dit rien des limites du pouvoir d’appréciation du juge des tutelles des majeurs auquel ce certificat est destiné. L’arrêt de cassation permet de se prononcer sur ce point et, partant, de combler une lacune.

2. L’espèce. L’association MSA tutelles – inscrite sur la liste préfectorale des mandataires judiciaires à la protection des majeurs – a sollicité du juge des tutelles, par requête du 30 janvier 2020, la transformation d’une mesure en curatelle renforcée. Le juge lui ayant donné gain de cause, le majeur en curatelle – qui a qualité pour saisir, seul8, le juge et pour exercer, seul9, un recours – a interjeté appel du jugement renforçant sa mesure de protection. Le curatélaire a produit, à l’appui de son recours, un certificat médical circonstancié du 6 mars 2021 concluant à l’amélioration de son état de santé et à l’inutilité d’une curatelle renforcée. Or, le 6 mai 2021, la cour d’appel de Bordeaux a pris un arrêt de débouté ; elle maintient la curatelle renforcée au motif que l’appelant n’a pas fourni devant la Cour un certificat médical précis et circonstancié faisant état d’une amélioration de sa santé !

3. Le contenu du certificat médical produit devant le juge. Saisie par le majeur en curatelle, la Cour de cassation casse heureusement l’arrêt bordelais ; elle l’annule pour violation de « l’obligation pour le juge de ne pas dénaturer l’écrit qui lui est soumis ». L’arrêt de cassation ajoute que, à l’appui de ses conclusions, le majeur protégé produisait justement un certificat médical du docteur R. évoquant précisément une amélioration de son état de santé. La cour d’appel a donc dénaturé par omission ce document, violant ainsi l’interdiction faite au juge de dénaturer les éléments de la cause.

4. Le motif de la cassation. Une telle motivation est inédite dans la protection juridique des majeurs, alors qu’elle est devenue fréquente et s’appuie sur une jurisprudence séculaire. En effet, c’est en 1872 que la Cour de cassation a formulé le principe selon lequel il n’est pas permis aux juges, lorsque les termes d’une convention sont clairs et précis, de dénaturer les obligations qui en résultent et de modifier les stipulations qu’elle renferme10. Cent cinquante ans après ce grand arrêt de la jurisprudence civile, la Cour de cassation doit aujourd’hui faire face au succès de ce contentieux engendré par sa construction prétorienne11. « Indiscuté dans son principe, le grief de dénaturation n’a cessé de voir son domaine s’étendre : contrats de toutes sortes mais aussi actes juridiques unilatéraux, sans oublier les documents de la cause (actes de procédure, éléments de preuve), y sont soumis »12. Les arrêts de cassation rendus au visa de « l’obligation pour le juge de ne pas dénaturer l’écrit qui lui est soumis » ne sont jamais publiés, car la Cour de cassation exerce un pouvoir disciplinaire en ce qui concerne l’interprétation abusive d’un élément de fait. Si les juges du fond bénéficient d’un pouvoir d’appréciation des éléments de fait, leur décision peut être cassée pour défaut de base légale lorsque les éléments de fait mis en évidence ne correspondent pas à ceux auxquels est subordonnée l’application de la règle de droit. Leur décision peut également être annulée, comme en l’espèce, lorsque le juge s’est fondé sur un élément de fait qu’il a dénaturé.

5. L’enjeu de la question. L’arrêt de cassation du 11 mai 2023 est important13 à plus d’un titre, ce qui peut paraître étonnant à l’égard d’une décision non publiée au Bulletin des arrêts de la Cour de cassation. Il offre, en effet, l’occasion de rappeler la législation – à la fois à la lettre et dans l’esprit Carbonnier-Hauser14 : l’existence, le choix et la durée de la mesure de protection juridique sont subordonnés à une double appréciation, médicale et juridique. Si le médecin a le premier mot, le juge du fond a le dernier, mais la décision judiciaire n’est valable que si le juge n’a pas dénaturé l’écrit médical qui lui est soumis. La leçon est fondamentale ; elle mérite un commentaire sur le domaine, le sens, la valeur et la portée du contrôle de dénaturation des certificats médicaux en matière de protection juridique des majeurs. Non seulement le contrôle de dénaturation sert le principe directeur de nécessité (I) mais il assure, à cette fin, l’équilibre des pouvoirs entre le médical et le judiciaire (II).

I – Le contrôle de dénaturation de l’écrit médical au service de l’effectivité du principe directeur de nécessité

6. Les principes directeurs. Nécessité15, subsidiarité16, proportionnalité17, tels sont les trois principes de la protection juridique des majeurs mis en évidence par le député et le sénateur qui, en 2006-2007, ont rapporté sur le projet de loi portant réforme de la protection juridique des majeurs devant les chambres du Parlement18. À la réflexion19, le principe directeur de nécessité doit être entendu lato sensu. Apprécié par le médecin inscrit et le juge des tutelles, le besoin de protection détermine l’existence, la nature et la durée de la mesure de protection juridique. Le contrôle de dénaturation effectué par la Cour de cassation permet de respecter l’appréciation médicale du besoin de protection ; il est nécessaire (A) pour assurer l’effectivité du principe directeur de nécessité, sans cependant être suffisant (B), car il faut aussi contrôler l’appréciation juridique de ce besoin de protection.

A – Le contrôle de dénaturation du certificat médical circonstancié, un instrument nécessaire au respect du principe directeur de nécessité

7. Le certificat du médecin inscrit. Circonstancié, le certificat du médecin inscrit sur la liste du procureur de la République doit faire la lumière sur le besoin de protection juridique. Il doit d’abord décrire20 précisément l’existence et la nature de l’altération des facultés personnelles de la personne à protéger ou déjà protégée. Il doit ensuite éclairer le juge sur les conséquences civiles de cette altération en fonction de leur gravité. Dans le détail, la loi subordonne l’ouverture d’une mesure de protection juridique à la constatation médicale de « l’altération des facultés mentales »21, légère, modérée ou grave. Par contraste, la constatation d’un handicap n’est pas suffisante ; il faut que « l’altération des facultés corporelles »22 prive la personne examinée par le médecin de la faculté d’exprimer sa volonté pour que la première condition légale soit satisfaite. Le Code de procédure civile (CPC) impose au médecin de se prononcer sur « l’évolution prévisible »23 de cette altération au regard du contexte qui a pu justifier son examen à la demande du requérant. Le médecin doit enfin et surtout indiquer au juge si la personne à protéger a besoin d’être assistée ou représentée dans l’exercice de ses droits personnels et patrimoniaux24. Il n’est plus nécessaire au médecin de se prononcer sur le maintien du droit de vote depuis que le législateur a privé le juge de la prérogative de radier le majeur en tutelle des listes électorales25. Le certificat médical circonstancié doit être rédigé par un médecin inscrit sur la liste du procureur de la République. Le médecin inscrit peut demander la somme de 160 €26 pour cet examen médical qui, parce qu’il est un acte non thérapeutique, est parfois soumis à TVA27, ce qui devrait être porté à la connaissance des requérants avant d’effectuer le choix de ce médecin.

8. L’évaluation médicale des inaptitudes. Rédigé à l’intention exclusive du procureur de la République ou du juge des tutelles, le certificat médical circonstancié doit être remis au requérant « sous pli cacheté »28. Le juge doit traduire en droit le besoin de protection juridique29. Sous l’angle patrimonial, l’indication de l’assistance ou de la représentation doit conduire le juge à individualiser la mesure de curatelle30, de tutelle31 ou d’habilitation familiale32. Sous l’angle extrapatrimonial ou personnel, l’indication de l’assistance ou de la représentation doit porter le juge à maintenir ou augmenter le pouvoir de protection de la personne en charge de la protection33. Le pouvoir d’assistance ou de représentation ne s’exerce pas de la même manière dans le domaine de la protection des biens et de celle de la personne34. En ce second domaine, et en lui seul, l’abstention du protecteur ne signifie pas un refus ; elle peut marquer la conviction que le majeur protégé est lucide et peut prendre seul une décision personnelle35.

9. L’adéquation de la mesure de protection juridique à l’état du sujet. Le certificat médical circonstancié est non seulement une « pièce maîtresse »36 de la procédure mais l’étalon à partir duquel le juge détermine la nature et l’étendue des pouvoirs de protection. Il est donc heureux que le juge de cassation puisse contrôler la dénaturation de ce certificat par le juge du fond. En l’espèce, le certificat médical permettait d’établir que la curatelle simple était une mesure adaptée et suffisante à l’état et à la situation du majeur protégé. Or, la décision de la cour d’appel consistant à maintenir le jugement prononçant la curatelle renforcée n’était pas justifiée au regard des constatations médicales du médecin inscrit sur la liste du procureur de la République. La dénaturation du certificat médical circonstancié a pu ici permettre de sanctionner une mesure disproportionnée ; la cassation provoque un nouvel examen judiciaire et rend possible la détermination d’une mesure plus appropriée à l’état et à la situation du majeur protégé. Nécessaire, le contrôle de dénaturation est cependant insuffisant pour garantir l’effectivité du principe de nécessité.

B – Le contrôle de dénaturation du certificat médical circonstancié, un instrument insuffisant pour respecter le principe directeur de nécessité

10. L’état et la situation du sujet à protéger. Le juge ne doit pas seulement se fonder sur les constatations médicales pour justifier le prononcé d’une mesure de protection juridique. Il doit aussi découvrir le besoin juridique d’ouvrir une telle mesure en fonction du besoin effectif de la personne d’être assistée ou représentée dans l’exercice de ses droits. La loi prévoit que la mesure est inutile lorsque l’entourage de la personne vulnérable comprend des personnes qui font face aux besoins de la personne et prennent des décisions en son nom et pour son compte grâce à un pouvoir de représentation contractuel37 ou judiciaire38. Tel est le sens de la règle de subsidiarité39, corollaire du principe directeur de nécessité. En clair, la mesure n’est nécessaire que si la personne vulnérable n’est pas en situation de sauvegarder ses intérêts personnels et patrimoniaux.

11. Un besoin d’assistance ou de représentation. Le bien-fondé d’une mesure de curatelle renforcée doit ainsi être motivé par la constatation d’un double besoin40 : d’une part, celui de la personne à protéger d’être représentée pour faire face à ses dépenses quotidiennes ; en clair, la personne vulnérable doit être dans l’incapacité de payer son loyer et ses autres dépenses courantes de première nécessité ; d’autre part, elle doit être représentée pour percevoir ses droits sociaux et engager les démarches administratives pour les obtenir. À cet égard, la Cour de cassation fait état d’une jurisprudence41 constante, sourcilleuse de faire respecter le principe directeur de nécessité. « La Cour de cassation multiplie les censures fondées relatives à la double motivation exigée afin de mettre en place la curatelle renforcée. C’est assurément le signe sinon d’un mépris affiché des principes directeurs, du moins d’un travail judiciaire bâclé. Il n’est en rien excusable, surtout au stade d’une cour d’appel »42. La Cour de cassation ne manque donc pas de moyens pour faire respecter le principe directeur de nécessité ; la cassation pour défaut de base légale43 lui permet d’annuler les curatelles renforcées – comme les tutelles44 – qui sont prononcées sans que le juge du fond ne justifie en fait et en droit le besoin de protection au regard des techniques de protection attentatoires à la liberté individuelle. Sous cet angle, le contrôle de dénaturation du certificat médical circonstancié s’avère un instrument complémentaire garantissant au majeur protégé que la mesure a été justifiée par les constatations exigées par la loi. Le contrôle de dénaturation de cet écrit médical profite directement aux personnes les plus vulnérables, bénéficiaires des mesures de protection juridique. Ce contrôle garantit, de surcroît, l’équilibre entre le pouvoir médical et celui du juge.

II – Le contrôle de dénaturation de l’écrit médical au service de l’équilibre des pouvoirs

12. Le grief de dénaturation. Le contrôle de dénaturation du certificat médical circonstancié trouve ici sa première illustration dans la protection juridique des majeurs. Le sens et le fondement du contrôle de dénaturation se prêtent à plusieurs analyses ; la plus rigoureuse d’entre elles profite aux sujets des mesures de protection et doit, pour cette raison, être retenue (A). Quant à la portée de la cassation, rien ne permet de limiter le contrôle de dénaturation au certificat médical circonstancié ; bien au contraire, il convient de l’étendre à tous les autres avis médicaux utiles à la procédure devant le juge des tutelles des majeurs (B).

A – Le sens et le fondement du contrôle de dénaturation

13. L’altération de la vérité. Le sens littéral de la dénaturation n’éclaire pas suffisamment la cassation opérée le 11 mai 2023. Entendue dans son sens commun, la dénaturation est l’opération qui vise à modifier la substance d’une chance. Littré donnait l’exemple de la dénaturation d’un alcool pour permettre son exportation45. Les dictionnaires enseignent que l’action de dénaturer a pour effet d’altérer ou de vicier la substance. Appliqué à un texte ou à une loi, dénaturer une norme a pour effet d’en déformer le sens, les conditions ou les effets. Rapportée à notre espèce, ayant pour objet un certificat médical circonstancié, l’action de dénaturation n’a pas le même sens. Comment est-il possible de dénaturer un certificat médical en ignorant son contenu ? La dénaturation est une action ; elle ne peut correspondre à une omission. Le terme de « dénaturation » a, néanmoins, une telle force évocatrice qu’il traduit l’altération de la vérité.

14. L’articulation du médical et du judiciaire. Le sens dynamique de la dénaturation porte une promesse, tant il prend appui sur l’esprit de la législation CarbonnierHauser. Le doyen Carbonnier a retenu la leçon de Montesquieu. Toute personne qui a du pouvoir est portée à en abuser. Seul le pouvoir arrête le pouvoir. C’est la raison pour laquelle la loi du 3 janvier 1968 a contraint le juge à fonder l’ouverture d’une mesure de protection juridique sur la constatation médicale de l’altération des facultés personnelles du sujet vulnérable à protéger. Et ce certificat devait émaner d’un médecin spécialiste inscrit sur la liste du procureur de la République. Seul un auxiliaire de justice pouvait et peut aujourd’hui encore jouer ce rôle. Le médecin inscrit sur la liste du procureur de la République est, comme tout docteur en médecine et en pharmacie46, frappé d’une incapacité spéciale de jouissance : il lui est interdit d’exercer une mesure de protection juridique des majeurs à l’égard de son patient. La loi Hauser a maintenu le juge des tutelles et le médecin inscrit dans leurs fonctions. Elle a cependant requis le certificat médical circonstancié à titre de recevabilité de la requête. Cette législation humaniste porte en elle une exigence procédurale ; le juge ne peut pas prononcer une mesure plus lourde que celle qui est préconisée par le médecin inscrit au regard de ses constatations cliniques. En clair, si le médecin constate le besoin de la personne d’être assistée dans l’exercice de ses droits patrimoniaux, le juge ne peut pas prononcer de tutelle. Et si l’état de santé de l’intéressé s’est brusquement dégradé depuis la date à laquelle le médecin inscrit a fait son certificat, le juge est alors contraint de solliciter un nouvel examen pour prononcer la mesure renforcée qui correspond au besoin actuel du majeur à protéger ou déjà protégé. En pareil cas – et pour éviter une double appréciation médicale –, c’est au médecin inscrit d’anticiper sur l’évolution prévisible de l’altération des facultés personnelles et d’informer le juge que le besoin de représentation peut se manifester à court terme. Quoi qu’il en soit, le contrôle de dénaturation de l’écrit médical permet à la Cour de cassation d’annuler une tutelle ouverte ou prononcée par une juridiction en contemplation d’un certificat médical constatant un simple besoin d’assistance. Le contrôle de dénaturation du certificat médical circonstancié ne doit donc pas se limiter à sanctionner « l’omission » ; il a vocation à sanctionner toute mauvaise lecture du certificat médical circonstancié47.

15. Du texte au principe ; du principe au texte. Quant au fondement du contrôle de dénaturation, la cassation du 11 mai 2023 vise l’obligation informelle faite au juge de ne pas dénaturer l’écrit qui lui est soumis. L’arrêt fait état d’un « principe »48. La Cour de cassation ne marque pas toujours la même audace ; elle couple parfois l’interdiction de dénaturer un contrat ou un document de la cause49 avec une disposition du Code civil50, du CPC51 ou du Code de procédure pénale52, comme si, au fil des décennies, la construction prétorienne de son principe avait connu des consécrations légales pour le renforcer et lui donner une plus large assise. Dès lors que le contrôle de dénaturation sert l’équilibre des pouvoirs entre le médical et le judiciaire, il convient de lui accorder la plus large audience.

B – La portée du contrôle de dénaturation

16. L’avis médical de non-audition. Trois arguments justifient d’étendre le contrôle de dénaturation à cet autre écrit médical qu’est l’avis médical de non-audition devant le juge des tutelles des majeurs. D’abord, c’est un écrit non thérapeutique qui émane d’un médecin inscrit sur la liste du procureur de la République. Ensuite, c’est un avis qui augmente le pouvoir du juge des tutelles puisqu’il lui permet de rédiger une ordonnance de non-audition. Au fond, la loi subordonne cet avis au cas où l’audition de l’intéressé est « de nature à porter atteinte à sa santé »53, ce qui peut être le cas d’un patient paranoïaque ou psychopathe qui entrerait en crise aiguë face au juge des tutelles54. Le Code civil envisage également le cas où l’intéressé est « hors d’état d’exprimer sa volonté »55, ce qui ne correspond pas exactement au cas où l’audition ne serait pas contributive, suivant les termes en usages dans les avis de médecins inscrits. Dans ces deux situations, la Cour de cassation serait bien inspirée, si le cas se présente, d’étendre son contrôle de dénaturation à cet avis qui a pour effet de priver le sujet de la mesure – en cours ou à venir – de son droit d’être entendu par le juge des tutelles.

17. L’avis médical justifiant une mesure de longue durée. L’avis médical de non-évolution favorable de l’état de santé du majeur à protéger ou déjà protégé entre également dans le domaine du contrôle de dénaturation. La même argumentation peut être reprise. Cet avis émanant du médecin inscrit a pour effet d’étendre le pouvoir du juge des tutelles puisqu’il peut prononcer une tutelle pour dix ans56 au lieu de cinq ans ou renouveler une curatelle ou une tutelle pour vingt ans57, alors qu’il est limité en principe à cinq ans. La Cour de cassation a assoupli son contrôle sur le libellé de cet avis médical non thérapeutique58. Elle pourrait néanmoins sanctionner la dénaturation de cet avis par le juge.

18. L’avis médical du médecin traitant. Les autres avis médicaux émanant d’un médecin non inscrit sur la liste du procureur de la République ne doivent pas échapper au contrôle de dénaturation. La Cour de cassation a déjà reproché aux juges du fond d’avoir dénaturé un certificat médical dans le contentieux de l’hospitalisation sans consentement59. Il reste à signaler que le médecin traitant peut jouer un rôle très important dans la procédure judiciaire de protection des majeurs. D’abord, son avis est nécessaire pour caractériser l’altération des facultés personnelles de l’intéressé lorsque le médecin inscrit fait face à son refus obstiné de se laisser examiner par lui60. Ensuite, l’avis d’un médecin traitant est nécessaire pour disposer du logement lorsqu’aucun retour dans un logement individuel n’est envisageable après l’entrée en EHPAD61. Enfin, l’avis d’un médecin traitant est suffisant au soutien d’une demande en mainlevée, en allègement de la mesure ou en renouvellement à l’identique de celle-ci62. Le retour à la pleine capacité juridique n’est pas attentatoire à la liberté individuelle et ne requiert pas la consultation d’un médecin inscrit sur la liste du procureur de la République63. Cela dit, dans de pareils cas, le juge est parfois porté à ignorer l’avis du médecin traitant. Et la vigilance de la Cour de cassation est le moyen de rétablir les droits fondamentaux64. C’est dans cette jurisprudence que s’inscrit l’important arrêt du 11 mai 2023.

Notes de bas de pages

  • 1.
    J. Carbonnier, Essais sur les lois, 2e éd., 1995, Defrénois, p. 71. Cette citation est extraite d’un texte dans lequel l’auteur du projet de la loi n° 68-5 du 3 janvier 1968, réformant le droit des incapables majeurs, exprime les idées fortes qui caractérisent la refonte du titre XI du livre 1er du Code civil, intitulé encore aujourd’hui « De la majorité et des majeurs protégés par la loi ». Adde G. Mémeteau, « Le médecin et la loi du 3 janvier 1968 portant réforme du droit des incapables majeurs », RDSS 1973, p. 403 à 443.
  • 2.
    L. n° 2007-308, 5 mars 2007, portant réforme de la protection juridique des majeurs : JO, 7 mars 2007, p. 4325. Sur celle-ci, P. Malaurie, « La réforme de la protection juridique des majeurs », Defrénois 30 juin 2007, art. 38569, p. 557 à 572 ; J. Hauser, « Des incapables aux personnes vulnérables », Dr. famille 2007, étude 14, p. 5 à 7 ; T. Fossier, « La réforme de la protection des majeurs, Guide de lecture de loi du 5 mars 2007 », JCP G 2007, I 118, p. 13 à 23 ; A.-M. Leroyer, « Chronique législation française. N° 4 », RTD civ. 2007, p. 394 à 407.
  • 3.
    C. civ., art. 431, al. 1er (L. n° 2007-308, 5 mars 2007).
  • 4.
    C. civ., art. 442, al. 4 (L. n° 2007-308, 5 mars 2007) : « [Le juge] statue d’office ou à la requête d’une des personnes mentionnées à l’article 430, au vu d’un certificat médical et dans les conditions prévues à l’article 432. Il ne peut toutefois renforcer le régime de protection de l’intéressé que s’il est saisi d’une requête en ce sens satisfaisant aux articles 430 et 431 ».
  • 5.
    T. Fossier, « Le législateur des pauvres en esprit », in Mélanges en l’honneur du professeur Jean Hauser, 2012, Dalloz-LexisNexis, p. 94 à 109.
  • 6.
    C. civ., art. 431, al. 1er (L. n° 2007-308, 5 mars 2007) : « La demande est accompagnée, à peine d’irrecevabilité, d’un certificat circonstancié rédigé par un médecin choisi sur une liste établie par le procureur de la République. Ce médecin peut solliciter l’avis du médecin traitant de la personne qu’il y a lieu de protéger ».
  • 7.
    La loi du 5 mars 2007 a bonifié la loi du 3 janvier 1968, notamment en améliorant la trilogie « sauvegarde de justice, curatelle et tutelle » mais aussi en précisant les fonctions des organes de la protection juridique des majeurs. Pour une démonstration, v. G. Raoul-Cormeil, « La loi du 5 mars 2007, entre le passé et l’avenir de la protection juridique des majeurs (Colloque : Brest, 8 mars 2019. – Grenoble, 5 avril 2019. – Caen, 26 avril 2019) », in G. Raoul-Cormeil, M. Rebourg et I. Maria (dir.), Majeurs protégés : bilan et perspectives, 2020, LexisNexis, chap. 1er, p. 31 à 58. Contra « La réforme de la protection juridique des majeurs », Defrénois 30 juin 2007, art. 38569, p. 557, note 2, spéc. n° 4, citant – pour tout exemple – l’une des lettres persanes de Montesquieu, « Lettre CXXIX », in Œuvres complètes, t. I, 1949, Pléiade, p 322 : « Ils se sont jetés dans des détails inutiles ; ils ont donné dans des cas particuliers, ce qui marque un génie étroit qui ne voit les choses que par parties et n’embrasse rien d’une vue générale ».
  • 8.
    C. civ., art. 430.
  • 9.
    CPC, art. 1239. Le majeur protégé dispose d’une capacité spéciale pour saisir le juge des tutelles et exercer des recours à l’encontre de ses décisions, alors que la législation Carbonnier-Hauser soumet l’action en justice, en demande et en défense, à l’assistance ou à la représentation de la personne en charge de la protection. Sur ce point, v. J. Hauser, « La distinction des actions personnelles et des actions patrimoniales à l’épreuve du droit des majeurs protégés », in Mélanges en l’honneur du professeur Gérard Champenois, 2012, Defrénois, p. 441 à 451, EAN : 9782856231852 ; G. Raoul-Cormeil, « Les droits de la personne majeure protégée dans la procédure où elle est partie », in S. Moisdon-Chataigner et R. Desgorces (dir.), Procédures, majeurs protégés et juge au XXIe siècle, t. 159, 2022, IFJD, Colloques & Essais, p. 89 à 106.
  • 10.
    Cass. civ, 15 avr. 1872, veuve Foucault et Coulombe c/ Pringault : DP 1872, 1, p. 176 ; S. 1872, 1, p. 232 ; reproduit et commenté in H. Capitant, F. Terré, Y. Lequette et F. Chénedé, Grands arrêts de la jurisprudence civile, t. 2, 13e éd., 2015, Dalloz, p. 147 à 151, n° 161.
  • 11.
    Suivant les arrêts, la Cour de cassation vise « l’obligation faite au juge de ne pas dénaturer l’écrit qui lui est soumis » ou « l’interdiction faite au juge de dénaturer l’écrit qui lui est soumis ». Cette construction prétorienne a été consacrée par la réforme du droit des obligations. C. civ., art. 1192 (Ord. n° 2016-131, 10 févr. 2016) : « On ne peut interpréter les clauses claires et précises à peine de dénaturation ».
  • 12.
    F. Terré, P. Simler, Y. Lequette et F. Chénedé, Droit civil, Les obligations, 13e éd., 2022, Dalloz, Précis, p. 722, n° 619. Contrairement à ces auteurs qui soutiennent que le grief de dénaturation est « incontesté dans son principe », le recours de plus en plus fréquent à cet ultimum subsidium a été critiqué par un courant doctrinal qui perçoit un retour subreptice à un contrôle de pleine juridiction, en fait et en droit, de la Cour de cassation. P. Morvan, Le Principe de droit privé, 1999, Panthéon-Assas, nos 217, 270, 462 et 579, où l’auteur cite notamment les travaux critiques des frères Mazeaud, de Perdriau et du doyen Cornu.
  • 13.
    C. Lesay, « L’importance du certificat médical dans les mesures de protection », obs. ss Cass. 1re civ., 11 mai 2023, n° 21-19173, arrêt 311, F-D, AJ fam. 2023, p. 350. Adde D. Noguéro, « Dénaturation du certificat sur l’amélioration de la santé du curatélaire », obs. ss Cass. 1re civ., 11 mai 2023, n° 21-19173, D. 2023, Pan., p. 1196 ; L. Mauger-Vielpeau, « Le juge ne doit pas dénaturer le certificat médical circonstancié produit en appel », Dr. famille 2023, comm. 137.
  • 14.
    La loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 a réformé la protection juridique des majeurs, alors que la loi du 3 janvier 1968 avait refondu le titre XI du livre 1er du Code civil. La refonte opérée en 1968 a fait table rase de l’interdiction et du conseil judiciaires institués par le Code Napoléon (1804-1968). Par contraste, la loi du 5 mars 2007 a bonifié un grand nombre d’institutions introduites par les lois du 14 décembre 1964 et du 3 janvier 1968. Elle a ainsi conservé la trilogie « sauvegarde de justice, curatelle et tutelle », même si elle a hiérarchisé ces trois mesures (C. civ., art. 440). Elle a maintenu le binôme « médecin inscrit sur la liste du procureur de la République » (C. civ., art. 431) et « juge des tutelles » (not. C. civ., art. 416). Elle a conservé la définition scientifique de la vulnérabilité dans le Code civil (C. civ., art. 425). Sur les changements et métamorphoses de cette discipline juridique, v., en dernier lieu, G. Raoul-Cormeil, « Le droit de la protection des majeurs », in B. Teyssié (dir.), Les Métamorphoses du droit des personnes, 2023, LexisNexis, p. 301 à 329.
  • 15.
    C. civ., art. 425, al. 1er : « Toute personne dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté peut bénéficier d’une mesure de protection juridique (…) ».
  • 16.
    C. civ., art. 428, al. 1er.
  • 17.
    C. civ., art. 428, al. 2.
  • 18.
    Rapp. n° 3557, 10 janv. 2007, au nom de la commission des lois de l’Assemblée Nationale, É. Blessig, p. 43 : « Le premier objectif du projet de loi est de rétablir le respect des principes de nécessité, de subsidiarité et de proportionnalité des mesures judiciaires de protection. Il met ainsi le droit français en conformité avec la recommandation du Conseil de l’Europe sur les principes concernant la protection juridique des majeurs incapables » – Sénat, rapp. n° 253, 20 févr. 2007, fait au nom de la Commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant réforme de la protection juridique des majeurs, H. Richemont, p. 16 : « Le projet de loi a ainsi pour ambition de réaffirmer les principes de nécessité, de subsidiarité et de proportionnalité de la protection juridique, de replacer la personne au centre des régimes de protection ». Adde M. Rebourg, « Les principes directeurs de la loi du 5 mars 2007 réformant la protection juridique des majeurs », Dr. famille 2007, n° 5, étude 16.
  • 19.
    G. Raoul-Cormeil, « L’opposition d’intérêts, obstacle à la magistrature tutélaire. Étude à partir du contrat d’assurance sur la vie », RGDA 2011, p. 397 à 422 ; G. Raoul-Cormeil, « Le principe de probité, face unitaire de la profession MJPM et limite au devoir d’adaptabilité », LPA déc. 2022, n° LPA201x7. À côté du principe directeur de nécessité qui gouverne l’existence, la nature et la durée de la mesure de protection juridique, le principe directeur de probité gouverne l’activité de la personne en charge de la protection : incapacité de recevoir à titre gratuit (C. civ., art. 909), obligation de se faire remplacer en cas d’opposition d’intérêts (C. civ., art. 455 – C. civ., art. 508), rémunération ou gratuité (C. civ., art. 419).
  • 20.
    CPC, art. 1219, 1°. En effet, « le certificat médical circonstancié prévu par l’article 431 du Code civil : (…) 1° Décrit avec précision l’altération des facultés du majeur à protéger ou protégé ; (…) ». Adde D. Noguéro, « Le certificat médical pour l’ouverture des mesures de protection des majeurs », RRJ 2011, p. 1227 à 1252.
  • 21.
    C. civ., art. 425, al. 1er : « Toute personne dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté peut bénéficier d’une mesure de protection juridique (…) ».
  • 22.
    C. civ., art. 425.
  • 23.
    CPC, art. 1219, 2°. En effet, « le certificat médical circonstancié prévu par l’article 431 du Code civil : (…) 2° Donne au juge tout élément d’information sur l’évolution prévisible de cette altération ; (…) ».
  • 24.
    CPC, art. 1219, 3°. En effet, « le certificat médical circonstancié prévu par l’article 431 du Code civil : (…) 3° Précise les conséquences de cette altération sur la nécessité d’une assistance ou d’une représentation du majeur dans les actes de la vie civile, tant patrimoniaux qu’à caractère personnel ».
  • 25.
    Sur la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 abrogeant l’article L. 5 du Code électoral et le décret n° 2022-728 du 22 juillet 2019 modifiant l’article 1219 du CPC. V. D. Noguéro, « Élection, droit de vote, droits fondamentaux et majeurs protégés. Hommage à un juge des tutelles humaniste », in G. Raoul-Cormeil et A. Caron-Déglise (dir.), La vie privée du majeur protégé. In memoriam Thierry Verheyde, 2019, Mare et Martin, étude 6, p. 75 à 104 ; adde N. Peterka, « La déjudiciarisation du droit des personnes protégées par la loi du 23 mars 2019. Progrès ou recul de la protection ? », JCP G 2019, 437, spéc. n° 5 ; J.-J. Lemouland, « Simplifier et recentrer le rôle du juge dans le domaine de la protection juridique des majeurs », D. 2019, p. 827 à 832, spéc. p. 828.
  • 26.
    CPP, art. R. 217-1 : « Le médecin auteur du certificat circonstancié prévu à l’article 431 du Code civil reçoit, à titre d’honoraires, la somme de 160 € ».
  • 27.
    F. Douet, « Sort en matière de TVA du certificat médical constatant l’altération des facultés personnelles », Dr. famille 2023, comm. 100, p. 35.
  • 28.
    CPC, art. 1219 in fine : « Le certificat est remis par le médecin au requérant sous pli cacheté, à l’attention exclusive du procureur de la République ou du juge des tutelles ».
  • 29.
    Des médecins abusent de leur pouvoir et se prononcent sur la curatelle, la tutelle ou l’habilitation familiale, alors que les textes ne leur demandent que d’identifier un besoin d’assistance ou de représentation.
  • 30.
    C. civ., art. 467 (curatelle simple) – C. civ., art. 471 (curatelle aménagée) – C. civ., art. 472 (curatelle renforcée).
  • 31.
    C. civ., art. 504 à 509 (tutelle) – C. civ., art. 473, al. 2 (tutelle aménagée).
  • 32.
    C. civ., art. 494-1 (habilitation familiale simple ou générale, par assistance ou par représentation).
  • 33.
    C. civ., art. 459, al. 2 : « Lorsque l’état de la personne protégée ne lui permet pas de prendre seule une décision personnelle éclairée, le juge ou le conseil de famille s’il a été constitué peut prévoir qu’elle bénéficiera, pour l’ensemble des actes relatifs à sa personne ou ceux d’entre eux qu’il énumère, de l’assistance de la personne chargée de sa protection. Au cas où cette assistance ne suffirait pas, il peut, le cas échéant après le prononcé d’une habilitation familiale ou l’ouverture d’une mesure de tutelle, autoriser la personne chargée de cette habilitation ou de cette mesure à représenter l’intéressé, y compris pour les actes ayant pour effet de porter gravement atteinte à son intégrité corporelle. Sauf urgence, en cas de désaccord entre le majeur protégé et la personne chargée de sa protection, le juge autorise l’un ou l’autre à prendre la décision, à leur demande ou d’office ».
  • 34.
    G. Raoul-Cormeil, « Assistance et représentation dans la protection juridique des majeurs », in I. Maria (dir.), « Dossier : Réforme de la justice et majeurs protégés », Dr. famille 2021, dossier 17, p. 10 à 13.
  • 35.
    C. civ., art. 459, al. 1er : « (…) la personne protégée prend seule les décisions relatives à sa personne dans la mesure où son état le permet ». Sur l’ordonnance n° 2020-232 du 11 mars 2020, relative au régime des décisions prises en matière de santé, de prise en charge ou d’accompagnement social ou médico-social à l’égard des personnes majeures faisant l’objet d’une mesure de protection juridique, et sur la loi n° 2021-1017 du 2 août 2021, dite loi Bioéthique, introduisant et développant les occurrences de la mesure de « protection juridique avec représentation relative à la personne » dans le Code de la santé publique et le Code de l’action sociale et des familles, v. G. Raoul-Cormeil, « La recodification du droit de la santé du majeur protégé : le pour et le contre ! », RGDM 2020, n° 75, p. 101 à 113 ; G. Raoul-Cormeil, « La loi bioéthique du 2 août 2021 et le droit des majeurs protégés : un bouclier ou un filet ? », RGDM 2021, n° 81, p. 59 à 75 ; D. Noguéro, « L’humanisme juridique et les droits simplement et strictement personnels des majeurs protégés. Incursion dans la protection de la personne et autonomie », in Regards humanistes sur le droit. Mélanges en l’honneur de la Professeure Annick Batteur, 2021, LGDJ, p. 421 à 450, EAN : 9782275091631 ; L. Gatti, Les décisions de santé des majeurs protégés. Pour un dialogue entre protecteurs et professionnels de santé, 2022, LEH édition, préf. G. Mémeteau.
  • 36.
    F. Fresnel, « Le certificat médical, une pièce maîtresse de la mesure de protection des majeurs », D. 2010, point de vue, p. 2856.
  • 37.
    C. civ., art. 428, al. 1er.
  • 38.
    C. civ., art. 1984 à 2003.
  • 39.
    C. civ., art. 217 (habilitation judiciaire) – C. civ., art. 219 (représentation judiciaire) – CPC, art. 1289 à 1289-2 – adde C. civ., art. 1426 (substitution judiciaire en régime de communauté légale ou conventionnelle). Et, pour une illustration, Cass. 1re civ., 1er févr. 2012, n° 11-11346 : Dr. famille 2012, comm. 53, note I. Maria ; D. 2012, Jur., p. 921, note G. Raoul-Cormeil ; JCP N 2012, 1183, note J. Massip ; RTD civ. 2012, p. 289, obs. J. Hauser.
  • 40.
    V., par ex., Cass. 1re civ., 6 mars 2019, n° 18-13854 : Dr. famille 2019, comm. 113, 2e esp., note I. Maria ; DEF 10 oct. 2019, n° DEF152d6, obs. D. Noguéro. La Cour de cassation rejette le pourvoi formé contre un arrêt (CA Bordeaux, 26 avr. 2018) au motif que « c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation de la portée du rapport d’expertise que la cour d’appel, qui n’avait pas à procéder à la recherche prétendument omise dès lors que la mesure de protection était fondée sur une altération des facultés mentales, a, sans contradiction de motifs, légalement justifié sa décision sur le fondement de l’article 425 du Code civil ».
  • 41.
    V. not. Cass. 1re civ., 29 févr. 2012, n° 10-28822 : D. 2012, Pan., p. 2699, spéc. p. 2707, obs. D. Noguéro ; RTD civ. 2012, p. 290, obs. J. Hauser ; Dr. famille 2012, comm. 88, obs. I. Maria – Cass. 1re civ., 12 févr. 2014, n° 13-12482 – Cass. 1re civ., 4 mars 2015, nos 14-15218 et 14-18123 : D. 2015, Pan., p. 1569, spéc. p. 1576, obs. D. Noguéro ; Dr. famille 2015, comm. 111, obs. I. Maria – Cass. 1re civ., 10 janv. 2018, n° 17-16010 : D. 2018, Pan., p. 1458, spéc. p. 1467, obs. D. Noguéro – Cass. 1re civ., 26 janv. 2022, n° 20-17278 : D. 2022, Pan., p. 1174, spéc. p. 1180, obs. D. Noguéro ; DEF 17 févr. 2022, n° DEF206b5, obs. D. Noguéro ; LEFP mars 2022, n° DFP200q6, obs. G. Raoul-Cormeil ; Dr. famille 2022, comm. 85, obs. I. Maria – Cass. 1re civ., 18 mai 2022, n° 20-22876 : LEFP juill. 2022, n° DFP200x2, obs. G. Raoul-Cormeil – Cass. 1re civ., 12 oct. 2022, n° 21-11090 : AJ fam. 2022, p. 606, obs. C. Lesay ; Dr. famille 2022, comm. 181, 2e esp., note L. Mauger-Vielpeau ; DEF 15 déc. 2022, n° DEF211g6, obs. D. Noguéro ; GPL 10 janv. 2023, n° GPL444g5, obs. L. Ait Madi – constante, la jurisprudence prend sa source sous l’empire de la loi n° 68-5 du 3 janvier 1968, au regard de l’ancien article 512 du Code civil, Cass. 1re civ., 1er juill. 1986, n° 84-17792 : Bull. civ. I, n° 190 – Cass. 1re civ., 6 avr. 1994, n° 92-17622 : Bull. civ. I, n° 142 – Cass. 1re civ., 25 nov. 2009, n° 08-19738 : D. 2010, Pan., p. 2115, spéc. p. 2124, obs. J.-J. Lemouland ; Dr. famille 2010, comm. 30, note I. Maria.
  • 42.
    D. Noguéro, « Mise en place à motiver de la curatelle renforcée », D. 2023, Pan., p. 1195.
  • 43.
    V., par ex., Cass. 1re civ., 29 févr. 2012, n° 10-28822, où la Cour de cassation casse et annule un jugement d’appel (TGI Bobigny, 17 déc. 2009) maintenant une curatelle renforcée, pour défaut de base légale au regard de l’article 472 du Code civil, dans sa rédaction issue de la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007, « sans rechercher si M. X… était ou non apte à percevoir ses revenus et à en faire une utilisation normale » – adde Cass. 1re civ., 12 oct. 2022, n° 21-11090 – Cass. 1re civ., 18 mai 2022, n° 20-22876 – Cass. 1re civ., 26 janv. 2022, n° 20-17278 – Cass. 1re civ., 10 janv. 2018, n° 17-16010 – Cass. 1re civ., 4 mars 2015, nos 14-15218 et 14-18123 – Cass. 1re civ., 12 févr. 2014, n° 13-12482 – Cass. 1re civ., 6 avr. 1994, n° 92-17622 – Cass. 1re civ., 25 nov. 2009, n° 08-19738.
  • 44.
    V., par ex., Cass. 1re civ., 12 oct. 2022, n° 21-11090 : Dr. famille 2022, comm. 181, 1e esp., p. 43, note L. Mauger-Vielpeau, où la Cour de cassation casse et annule un arrêt (CA Nîmes, 17 déc. 2020) maintenant une tutelle, pour défaut de base légale au regard des articles 425 et 440 du Code civil « par des motifs impropres à caractériser la nécessité pour Mme [E] d’être représentée d’une manière continue dans les actes de la vie civile ».
  • 45.
    P.-E. Littré, Dictionnaire de la langue française, t. 2, 1877, reprint 1999, v° Dénaturation, p. 1569.
  • 46.
    C. civ., art. 445, al. 2 (L. n° 2007-308, 5 mars 2007) : « Les membres des professions médicales et de la pharmacie, ainsi que les auxiliaires médicaux ne peuvent exercer une charge curatélaire ou tutélaire à l’égard de leurs patients ».
  • 47.
    Comp. G. Mémeteau, « Le médecin et la loi du 3 janvier 1968 portant réforme du droit des incapables majeurs », RDSS 1973, spéc. p. 428 : « Le médecin spécialiste (…) ne préconisera pas de mesures, ne déduira pas les conséquences de ses observations, mais se bornera à consigner ces dernières, établissant nécessairement une altération des facultés mentales, ou une altération des facultés corporelles empêchant l’expression de la volonté (C. civ., [anc.] art. 490, 493-1) ».
  • 48.
    Sur la qualification formelle de « principes de droit », formulés par la Cour de cassation par une inscription au visa d’un arrêt de cassation, v. P. Malaurie et P. Morvan, Introduction au droit, 9e éd., 2022, LGDJ, Droit civil, n° 346, texte et note 151, pour la bibliographie, EAN : 9782275093925. Adde P. Morvan, Le principe de droit privé, 1999, Panthéon-Assas, préf. J.-L. Sourioux ; comp. la définition substantielle et plus stricte du professeur D. Bureau, in Les sources informelles du droit dans les relations privées internationales, thèse, 1992, Panthéon-Assas, Paris 2, 1992, n° 71, p. 61, où les principes généraux du droit sont définis comme des « propositions juridiques non écrites dont la généralité permet de soutenir une large série de solutions positives ».
  • 49.
    Sur la proposition de reformuler le principe en « interdiction de dénaturer les documents de la cause », v. J. Voulet, « Le grief de dénaturation devant la Cour de cassation », JCP G 1971, I 2410, n° 16. Et sur sa consécration jurisprudentielle, Cass. com., 2 déc. 1986, n° 85-10547 : Bull. civ. IV, n° 227, p. 198 : « Vu l’obligation pour le juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ».
  • 50.
    C. civ., art. 1134, art. 1er anc. : « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faîtes » – adde Cass. 2e civ., 18 janv. 2006, n° 05-12390 : « Qu’en statuant ainsi, alors qu’il résultait des stipulations du contrat, qui ne prévoyait pas la cessation des garanties en cas de déchéance du terme du contrat de prêt, que celui-ci garantissait le risque d’incapacité partielle de travail, la cour d’appel, qui en a dénaturé les termes clairs et précis, a violé [l’article 1134 du Code civil] » – C. civ., art. 1196 : « On ne peut interpréter les clauses claires et précises à peine de dénaturation ».
  • 51.
    CPP, art. 4 : « L’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties. Ces prétentions sont fixées par l’acte introductif d’instance et par les conclusions en défense. Toutefois l’objet du litige peut être modifié par des demandes incidentes lorsque celles-ci se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant » – adde Cass. 1re civ., 5 déc. 2018, n° 17-28128, à propos de la dénaturation d’un bordereau – Cass. 1re civ., 11 mai 2022, n° 21-12896, à propos de la dénaturation d’un plan cadastral – CPC, art. 5 : « Le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ».
  • 52.
    CPP, art. 593 : « Les arrêts de la chambre de l’instruction, ainsi que les arrêts et jugements en dernier ressort sont déclarés nuls s’ils ne contiennent pas des motifs ou si leurs motifs sont insuffisants et ne permettent pas à la Cour de cassation d’exercer son contrôle et de reconnaître si la loi a été respectée dans le dispositif. Il en est de même lorsqu’il a été omis ou refusé de prononcer soit sur une ou plusieurs demandes des parties, soit sur une ou plusieurs réquisitions du ministère public » – adde, par ex., Cass. crim., 18 oct. 2011, n° 11-81568.
  • 53.
    C. civ., art. 432, al. 2 – si la demande a pour objet l’habilitation familiale, C. civ., art. 494-4, al. 1er.
  • 54.
    Cass. 1re civ., 15 janv. 2020, n° 19-12912 : AJ fam. 2020, p. 258, obs. Y. Montourcy ; D. 2020, Pan., p. 1485, obs. D. Noguéro. L’arrêt de cassation rendu au visa de l’article 432, alinéa 2, du Code civil révèle des faits singuliers. « Pour confirmer l’ordonnance du juge des tutelles ayant dit n’y avoir lieu de procéder à l’audition de M. Q…, l’arrêt, après l’avoir entendu à l’audience, retient qu’il résulte de l’examen du médecin inscrit que la personnalité paranoïaque hostile de l’intéressé risque de rendre difficile son audition et que les éléments de la procédure établissent qu’il a pu faire preuve d’agressivité et de violences par le passé notamment dans les locaux de l’UDAF ».
  • 55.
    C. civ., art. 432, al. 2 – si la demande a pour objet l’habilitation familiale, C. civ., art. 494-4, al. 1er.
  • 56.
    C. civ., art. 441, al. 2.
  • 57.
    C. civ., art. 442, al. 2.
  • 58.
    Cass. 1re civ., 4 mai 2017, n° 16-17752 : D. 2017, Pan., p. 1501, obs. J.-J. Lemouland ; Dr. famille 2017, comm. 170, note I. Maria ; GPL 3 oct. 2017, n° GPL304d2, obs. C. Robbe et H. Malherbe – Cass. 1re civ., 8 juill. 2020, n° 19-16246 : DEF 24 sept. 2020, n° DEF163h9, note J. Combret ; D. 2021, Pan., p. 1257, note D. Noguéro – comp. Cass. 1re civ., 10 oct. 2012, n° 11-14441 : Dr. famille 2012, comm. 184, note I. Maria ; AJ fam. 2012, p. 619, obs. T. Verheyde ; D. 2012, p. 2723, note G. Raoul-Cormeil ; RTD civ. 2013, p. 90, obs. J. Hauser.
  • 59.
    Cass. 1re civ., 27 sept. 2017, n° 16-22544 : Dalloz actualité, 3 oct. 2017, obs. N. Peterka ; DP santé, Bull. n° 286/287, nov.-déc. 2017, p. 5, obs. M. Couturier ; Dr. famille 2017, comm. 232, note I. Maria ; RDSS 2018, p. 125, note P. Véron. Le juge ne peut pas substituer ses propres constatations faites à l’audience à l’évaluation médicale de l’état de santé de l’intéressé.
  • 60.
    Cass. 1re civ., 20 avr. 2017, n° 16-17672 : AJ fam. 2017, p. 356, obs. Y. Moutourcy ; AJ fam. 2017, p. 3257, note G. Raoul-Cormeil ; D. 2017, Jur., p. 1455, note N. Peterka ; JCP G 2017, 525, note D. Noguéro. Dans cet arrêt de cassation, la Cour de cassation admet que, au sens de l’article 431 du Code civil, « le certificat circonstancié peut être établi sur pièces médicales, en cas de carence de l’intéressé ».
  • 61.
    C. civ., art. 426, al. 3 : « Si l’acte [de disposition du logement] a pour finalité l’accueil de l’intéressé dans un établissement, l’avis préalable d’un médecin, n’exerçant pas une fonction ou n’occupant pas un emploi dans cet établissement, est requis ».
  • 62.
    C. civ., art. 442, al. 1er : « Le juge peut renouveler la mesure pour une même durée ». Le silence de la loi à propos du certificat médical est éloquent. Un simple certificat médical est nécessaire, au fond, pour justifier du bien-fondé du maintien de la mesure mais il n’est pas une condition de recevabilité de la requête en révision.
  • 63.
    Cass. 1re civ., 9 nov. 2016, n° 14-17735 : D. 2017, p. 1490, obs. J.-J. Lemouland et D. Noguéro ; Dr. famille 2017, comm. 18, note I. Maria ; LEFP janv. 2017, n° DFP110e7, obs. G. Raoul-Cormeil ; RTD civ. 2017, p. 99, obs. J. Hauser. La production d’un certificat médical n’est pas une condition de recevabilité de la demande de mainlevée de la mesure de protection juridique.
  • 64.
    Cass. 1re civ., 15 avr. 2015, n° 14-16666 : AJ fam. 2015, p. 343, obs. Y. Montourcy ; Dr. famille 2015, comm. 131, note I. Maria ; RTD civ. 2015, p. 587, obs. J. Hauser. Cassation pour défaut de base légale au regard des articles 425 et 440 du Code civil, de l’arrêt qui maintient la mesure de curatelle renforcée « sans constater la persistance de l’altération des facultés mentales de l’intéressée et la nécessité pour celle-ci d’être assistée ou contrôlée d’une manière continue dans les actes importants de la vie civile ».
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