Astrid de La Forest, « Figures du vivant »

Publié le 04/07/2023

Astrid de La Forest, Loup II, 2014

Astrid de La Forest, 2023, ProLitteris, Zurich

D’emblée, les gravures et monotypes réunis au musée Jenisch à Vevey frappent par leur puissance expressive, par le caractère inventif de la figuration de l’artiste évoquant portraits, animaux et paysages.

Loin de s’éloigner de la réalité, ces eaux-fortes, pointe sèche ou aquatinte, se rapprochent, pour certaines, de la peinture. Elles traduisent le regard original d’Astrid de La Forest, que l’on devine proche de la nature, observatrice attentive et complice de la beauté la plus simple, la plus authentique.

Varié est le parcours de cette créatrice. Après ses études à l’École supérieure des arts graphiques, elle collabore à la réalisation de décors au théâtre des Amandiers, où elle fait la connaissance du directeur, Patrice Chéreau, pour lequel elle va réaliser, entre autres, l’affiche d’Ivanov de Tchekhov. Quelque temps plus tard, ses talents de portraitiste la conduisent à devenir dessinatrice judiciaire pour la télévision. Des expériences multiples qui vont sans doute nourrir sa création. Jusqu’en 1995, elle s’exprime par la peinture qu’elle va peu à peu délaisser pour la gravure.

Les modes n’intéressent pas Astrid de La Forest, qui suit son propre chemin. En 2016, elle est la première femme élue à l’Académie des Beaux-Arts de l’Institut dans la section gravure. Une reconnaissance qui a certainement été un précieux soutien et un encouragement à continuer dans la voie qu’elle a choisie.

Les quelque 50 œuvres présentées affirment un renouvellement permanent dans sa création, qui cependant répond toujours à une figuration libre, habitée de vie. Un dessin juste, la force d’une certaine gestualité s’associent au noir dans cette écriture où la réalité se pare de poésie. Tournesols ou chardons sont imprégnés de vie, autant que la terre parcourue de sillons prometteurs de récoltes à venir. Ce sont encore des arbres aux troncs graciles, surmontés d’un feuillage touffu et réalisés en un trait souple aux élégantes arabesques.

Astrid de La Forest ne se noie pas dans les détails ; elle capte l’essentiel d’un paysage ou d’un animal tel que « Pépé le Mocco », un chimpanzé si présent, au regard intense. Certains arbres rappellent la délicatesse de l’art asiatique. Quant aux portraits en pied, dont les contours sont parfois délimités par un épais tracé noir, ils reflètent le caractère du modèle. L’artiste introduit çà et là une couleur discrète qui anime le noir. Des séries sont présentes dans l’exposition, ainsi qu’une création de 10 m2, Mémoire de l’arbre, réalisée spécialement pour le musée Jenisch Vevey. Dans cette œuvre, le noir exprime toutes les variations sans le besoin de la couleur.

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