Caillebotte, un intérieur rouge

Publié le 27/10/2023

Caillebotte, un intérieur rouge

Cette Scène d’intérieur par Gustave Caillebotte (1848-1894) exécutée en 1877, est estimée 660 000-950 000 €

Bonhams Cornette de Saint-Cyr

Gustave Caillebotte (1848-1894), ce fils de grand bourgeois, n’était vraiment pas destiné à la peinture. Il s’échappa du droit à Naples, où il fut frappé par les tableaux de Giuseppe De Nittis (1846-1884), avec lequel il se lia d’amitié. C’en était fait du droit, lui qui commençait à peindre, se consacrerait désormais aux Beaux-Arts. Si De Nittis participa à la première exposition dans l’atelier de Nadar de ceux qu’on allait appeler les Impressionnistes, Caillebotte resta, si l’on peut dire, à l’écart : il venait de se voir refuserd’exposer au Salon. Son père venait de mourir en lui laissant une fortune importante. De quoi ne pas être pris au sérieux par ses camarades peintres. Sans se décourager, il commença à collectionner les toiles de ces derniers.

C’est Renoir qui poussa Caillebotte à rejoindre le mouvement impressionniste. Il put ainsi, en 1876, participer à la deuxième exposition où il présenta huit tableaux, dont les Raboteurs de parquet (102 x 147). Ce tableau fit parler de lui, notamment grâce à Émile Zola, qui trouva cette « peinture bourgeoise à force d’exactitude ». Les clivages sociaux avaient déjà la vie dure. Bourgeois ou pas bourgeois, Caillebotte peignait à la fin des années 1870 des scènes d’intérieur. L’une d’elles, Portraits dans un intérieur (46.2 x 56 cm), exécutée en 1877, sera mis en vente à New York, le 14 décembre 2023 par Bonhams Cornette de Saint-Cyr, avec une estimation de 700 000-1 000 000 $, soit 660 000-950 000 €, lors de la dispersion de la collection Alan et Simone Hartman.

La scène montre une femme assise devant un métier à tapisserie. Elle est particulièrement attentive à son travail. On distingue derrière elle une méridienne et un piano droit. Face à elle, tournant le dos au spectateur, un personnage est assis dans un large fauteuil. D’aucuns affirment qu’il s’agit d’une femme ; d’autres assurent que ce vis-à-vis est un homme, preuve en est sa tignasse désordonnée et l’apparence d’une barbe sur le côté de sa tête. Les partisans féminins signalent la présence d’une pelote de fil blanc s’échappant de ses genoux. Les partisans masculins se reportent à nouveau sur la coiffure, qui n’est pas un chignon comme en étaient coiffées les femmes à l’époque.

L’atmosphère de ce salon marquée par les tissus rouges des sièges et des rideaux, est à la fois chargée, chaleureuse et apaisante. « Le sujet ? oh mon Dieu ! il est bien ordinaire », comme le soulignait Huysmans à propos d’une autre toile de Caillebotte, également titrée « Scène d’intérieur ». Celle-là fait davantage entrer la lumière, mais le peintre soucieux de tous les détails, ne montre, en empruntant les propos de Huysmans « ni taches trémoussantes, ni feux d’artifice, ni intentions seulement indiquées, ni indigences. Le tableau est achevé, témoignant d’un homme qui sait son métier sur le bout du doigt et qui tâche de n’en pas faire parade, de le cacher presque ».

Bonhams Cornette de Saint-Cyr, 6 avenue Hoche, 75008 Paris.

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