Clint et moi, ou comment devient-on « clintien » ?

Publié le 10/10/2020

JC Lattès

Être ou ne pas être clintien ? Telle est la question qui est au cœur et au fil des pages d’un livre absolument délicieux : Clint et moi. Ce récit écrit par Éric Libiot croise les thèmes et les genres : la critique de cinéma, l’analyse filmique, les souvenirs personnels, la confidence. Le style est alerte, ponctué d’humour et d’ironie. Côté cinéma, c’est documenté et étayé. L’émotion n’est pas absente. Le résultat est celui d’un livre, même si on n’est pas un fan d’Eastwood, qu’on ouvre et qu’on ne lâche pas.

C’est quoi être clintien ? On se gardera de répondre ici à la place de l’auteur qui, au demeurant, n’impose pas de grille et ne donne pas dans l’hagiographie. Éric Libiot retrace le parcours personnel – son rapport à Clint c’est aussi celui à son propre père – et professionnel, qui l’a conduit à vouloir interviewer Eastwood, à vouloir se rapprocher de cette figure cinématographique mais aussi de l’homme dont il nous dit tout le mystère et les aspérités. Occasion de revenir et décoder, radiographier la filmographie de Clint en tant qu’acteur et réalisateur. Que retient-on de Clint ? Ses rôles de Callaghan, le flic ? Ses personnages dans L’homme des hautes plaines, Pale Rider ou Impitoyable ? Son poncho, son cigare et ses répliques chocs dans la trilogie de Leone ? Ses réalisations, par exemple : Sur la route de Madison, Le maître de guerre, Gran Torino ? Chacun aura sa réponse, celle qui compte ici, puisque c’est le livre, étant celle de l’auteur. Lire ces pages est l’occasion d’engager un débat silencieux avec Éric Libiot. Au fait, et si la vraie question posée par le livre était : « mais qui est Clint ? ». Manière de se demander qui on est soi-même.

C’est quoi être cinéphile ? Qu’on apprécie Clint Eastwood ou pas, il y a un autre intérêt au livre : l’amour du cinéma. Et de rappeler ce qu’est (ou ce que fut ?) la cinéphilie, cet objet de désir peu à peu disparu. Beaucoup se retrouveront dans ce portrait d’un enfant puis adolescent découvrant le western ou le film noir dans les salles de cinéma de l’époque. Le cinéma comme vie rêvée et fantasmée, comme partie de soi. Est-ce encore le cas aujourd’hui ? Telle est une autre question sur laquelle peut ouvrir le livre.

LPA 13 Oct. 2020, n° 156q7, p.26

Référence : LPA 13 Oct. 2020, n° 156q7, p.26

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