D’Atala au Génie du christianisme

Qui n’aurait jamais lu le roman Atala de François-René de Chateaubriand a au moins vu et conservé en mémoire le tableau Atala au tombeau, peint en 1808, par Anne-Louis Girodet-Trioson, depuis conservé au Louvre. La peinture montre la jeune femme morte et Chactas et le père qui la placent dans le tombeau. Chateaubriand s’était, comme on le dit pudiquement, éloigné de la France en révolte, en embarquant vers le Nouveau Monde, en 1791. Il a rapporté dans son Voyage en Amérique, paru en 1826, qu’il avait remonté l’Hudson en bateau jusqu’à Albany, puis jusqu’aux chutes du Niagara, à la rencontre du « bon sauvage » et de la solitude des forêts d’Amérique du Nord. Déjà, tenaillé par l’écriture, le jeune homme entreprit de composer une saga indienne dans l’esprit des romans noirs alors en vogue à l’époque.
Atala sera en fait un court roman dans lequel il exhale le christianisme. Il sera publié pour la première fois en 1801, sous son titre complet Atala ou Les Amours de deux Sauvages dans le Désert (Paris, Migneret et l’ancienne librairie de Dupont, in-18). Un exemplaire de cette édition originale, que l’on ne voit passer que rarement en vente publique, relié postérieurement en demi-cuir de Russie brun à coins, a été adjugé 1 200 €, à Bruxelles, le 22 avril 2022, par la maison Damien Voglaire. Le succès de ce livre fut, dit-on, fulgurant ; à telle enseigne qu’il fut réimprimé cinq fois entre avril 1801 et avril 1802. Seule la première, celle-ci, contient 210 pages ; un indice qui permet de la distinguer des quelques contrefaçons qui n’ont pas manqué de suivre.
Bien plus tard, on considéra qu’il avait marqué le début du romantisme français. Chateaubriand ignorait alors ce que sera le « romantisme français ». Le futur auteur des Mémoires d’Outre-tombe ne cessa d’apporter des modifications à son texte jusqu’à ce qu’il décide de l’intégrer dans Le Génie du christianisme, ou Beautés de la religion chrétienne, écrit en Angleterre entre 1795 et 1799 et publié pour la première fois en 1802 (Paris. Migneret. 4 volumes in-8), quatre jours avant la signature du Concordat. Un exemplaire de cette édition originale a été vendu 80 €, à Toulouse, le 20 juin 2024 par la maison Marambat-de Malafosse.
La première édition collective réunissant deux des épisodes de la vaste épopée indienne les Natchez et des extraits du Génie du christianisme, la première édition séparée de René, et pour la première fois la version définitive d’Atala, a été éditée par Le Normand en 1805 (in-12), ornée de 6 planches. Un exemplaire relié par Ducastin, en maroquin rouge, a été vendu 1 950 €, à Drouot, le 19 février 2019 par la maison Berger & Associés. « Atala été réimprimée onze fois, devait dire Chateaubriand, cinq fois séparément, et six fois dans le Génie du christianisme : si l’on confrontoit ces onze éditions, à peine en trouveroit-on deux tout à fait semblables. […] J’ai passé quatre ans à revoir cet épisode, mais aussi il est tel qu’il doit rester. C’est la seule Atala que je reconnoîtrai à l’avenir. »
Référence : AJU015u0
