De la latinité moderne à l’italien
Jean-Baptiste Tenant de Latour (1779-1862) fut nommé en 1846 bibliothécaire du roi Louis-Philippe Ier, au palais de Compiègne. La somme de ses connaissances a été réunie dans ses Mémoires d’un bibliophile parues en 1861. Cet ouvrage se présente sous forme de lettres à une femme bibliophile (la comtesse de Ranc… [Le Masson de Rancé]), et se compose de nombreuses réflexions sur la bibliophilie, les écrivains et le monde des lettres. Nous reprenons cet été la publication de la Lettre XII consacrée aux « Traductions ».
DR
Le père d’Hotteville, grand celier de l’ordre des oratoriens, avait pressé un professeur de lui prêter un volume auquel il tenait beaucoup. Il découvrit avec stupeur, sur une table de nuit, son malheureux livre – dernière lecture du soir de son vieux confrère – qui avait été marqué à la page où il se proposait de la reprendre avec un bout de la chandelle de suif. Il s’en émouvait encore vingt ans après.
« J’ai les Offices de Cicéron, traduits par Dubois, volume qui porte sur le titre la signature de D’Ansse de Villoison ; la traduction de l’Orateur, par l’abbé Colin, enfin celle des Philippiques et des Catilinaires, par l’abbé d’Olivet. Je possède deux jolis petits volumes auxquels j’attache un double intérêt : c’est d’abord le Traité des bienfaits et celui de la Colère, de Senèque, traduits, le premier par Malherbe, le second par Du Ryer, et l’Apocolokintosis, du même, traduit par le P. Spiridion Poupart, exemplaire envoyé au père Le Tellier avec quelques corrections de la main du traducteur et une note de l’abbé Sepher.
Voici encore un traducteur qui, comme Dussaulx, me fait naître le regret de n’avoir pas mentionné ses propres œuvres, Louis de Sacy. Outre son excellente traduction de Pline le Jeune, j’ai son Traité de l’amitié, si convenablement dédié à son amie la marquise de Lambert, et son Traité de la gloire, avec un long envoi écrit et signé de sa main. Pour ceux qui voudraient attribuer à Pline, au lieu de le donner à Aurelius Victor, le petit volume des Hommes illustres, j’ai comme complément de la traduction de Sacy celle de ce livre par Savin.
Enfin j’ai, en ouvrages de la latinité moderne, outre les traductions jointes au texte de l’abbé de Latour, dont j’ai déjà parlé, l’Utopie de Thomas Morus, traduite par Gueudeville, belle édition de Leide (1715), belles gravures, bel exemplaire relié en vélin. L’abominable Syphilis de Fracastor, l’Anti-Lucrèce du cardinal de Polignac et le poème de la Manière de nourrir les enfants à la mamelle de Scévole de Sainte-Marthe, traduit par Abel de Sainte-Marthe, avec le texte : Livre assez difficile à rencontrer.
J’ai en traductions de l’italien : celle de la Divine comédie, par M. Fiorentino, une traduction complète des Poésies de Pétrarque, par M. de Gramont, et celle du Roland Furieux, par Panckouke et Framery, révisée par Antoine de Latour et Brizeux ; De la Jérusalem délivrée, la traduction vieillie de Mirabaud, une nouvelle traduction par A. Desplaces ; plusieurs éditions de la belle version du prince Lebrun, enfin la première édition de la traduction en vers de Pierre-Marie-François Baour-Lormian, in-4, de Didot, avec les figures de Cochin ». (À suivre)
Référence : AJU009l6