Degas à l’Opéra

Publié le 19/11/2019

Degas à l’Opéra

Musée d’Orsay

Lorsque l’on évoque la peinture de Degas, inévitablement, les nombreux tableaux consacrés aux danseuses de l’Opéra s’imposent davantage que les portraits ou scènes de courses. La vraie passion du peintre : le monde de la danse, qui lui permet de fixer le mouvement, de jouer avec les couleurs…

Afin de fêter les 350 ans de l’Opéra, on ne pouvait mieux choisir que l’œuvre de cet artiste, qui a fait de ce lieu vivant le thème majeur de sa création.

Les toiles consacrées à la danse, aux musiciens, chanteurs ou spectateurs, incarnent l’esprit de la vie parisienne de son époque. Cet univers clos, où se passent tant d’événements artistiques, l’a fasciné. Degas assistait aux spectacles, prenant des notes, croquant sur le papier aussi bien les danseuses que l’orchestre, les loges ou la salle de danse qui, ensuite, devenaient peintures dans le silence de l’atelier. On découvre dans ses œuvres la perception passionnée de ce qui l’entoure.

Plusieurs études de nus au crayon ou à la pierre noire, un pastel où figure une danseuse en maillot révèlent le travail préparatoire ; les nombreux croquis reflètent le souci du peintre d’être au plus près de la vérité, tout en conservant un regard personnel. L’exposition du musée d’Orsay s’attache avant tout à l’atmosphère de l’Opéra durant les spectacles, qu’en habitué des lieux Degas a scrutée, et recréée selon son désir plastique.

Une certaine vérité apparaît dans ces œuvres vivantes, que l’on penserait peintes sur le vif que ce soient les musiciens jouant, les danseuses dans leurs mouvements gracieux ou encore l’échauffement à la barre. Il les observe encore lorsqu’elles sont au repos, lasses ; elles baillent, rajustent un chausson, se laissent aller, se massent pour calmer la douleur. Degas porte le même intérêt à l’orchestre et, plus intime, il capture le charme d’un moment fugitif : dans Madame Camus au piano, il saisit le détail caractéristique et réalise d’intéressants cadrages.

1870, c’est l’année de son premier tableau inspiré par ce monde artistique : Mademoiselle Fiocre dans le ballet. Il commence à fréquenter l’Opéra grâce au dramaturge Ludovic Halevy, qu’il évoque dans quelques monotypes à l’encre noire.

Degas utilise huile, pastel, fusain pour donner une vue de la salle où figurent les nombreux spectateurs. Puis il souhaite être au plus près des danseuses et il a bientôt ses entrées dans le foyer ou les coulisses : c’est La Salle de danse, où il anime l’espace avec les ballerines, captant les attitudes des bras, les mouvements et arabesques ; peu à peu, l’espace s’estompe autour des danseuses.

À la fin du XIXe siècle, l’éventail est l’accessoire à la mode ; Degas en a décoré quelques-uns à l’aquarelle et rehauts d’or et d’argent très raffinés. Au fil des cimaises, la vibration des couleurs est saisissante : Trois danseuses dans les coulisses, l’on s’arrête encore devant le délicat pastel de Danseuse à l’éventail, œuvre vaporeuse.

Degas sculpteur est également présent, avec l’emblématique : Petite danseuse de 14 ans, un bronze habillé d’un tutu en tulle ; la fillette porte de vrais cheveux retenus par un ruban rose ; l’effet est saisissant. Plusieurs bronzes de danseuses en mouvement, l’entourent.

De grands dessins synthétiques au pastel et fusain évoquent les jeunes femmes en une ligne appuyée et sûre ; légèrement schématisé, le dessin n’en a que plus de force. La dernière section Orgies de couleurs offre des pastels, danseuses seules ou en groupe ; toute la magie des couleurs apparaît dans des verts subtils, fondus dans du rouge ou un jaune ardent et lumineux, pour des ballerines complices…

Degas travaille en touches hachurées, il exploite le velouté, la luminosité du pastel ; du grand art !

LPA 19 Nov. 2019, n° 149d5, p.16

Référence : LPA 19 Nov. 2019, n° 149d5, p.16

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