En mer avec Sir Robert Dudley

Publié le 30/10/2024

En mer, les routes ne sont pas balisées comme sur la terre ferme où l’on se perd aussi parfois. Depuis des lustres, pour se diriger, les navigateurs se sont fiés aux astres et à la position du soleil. Les instruments de navigations les plus anciens comme le bâton de Jacob, surnommé l’arbalète, ce long bâton réglé, servait à mesurer la latitude. Mais la plupart des premiers navigateurs suivaient les côtes, quoique l’on sache désormais que les Nordiques traversaient les océans, sans coup férir. Puis vint le temps des cartes marines. Mercator, de son vrai nom Gérard Kremer (1512-1594) inventa deux nouvelles projections, l’une pour représenter le globe entier, la « projection stéréographique » et l’autre pour les marins avec la « projection Mercator ». Cette vision allait révolutionner l’art de la cartographie et permettre aux navigateurs de tracer leur route et de mieux se mouvoir le long des mers.

Parmi ses successeurs, Robert Dudley (1574-1649) fit un bond en avant en réalisant le premier atlas réunissant les cartes marines du monde entier, le premier à fonder ces cartes sur les projections cartographiques utilisées par Mercator et le premier à y indiquer les vents et courants. Son ouvrage, L’Arcano del mare ou « Les secrets de la mer » parut pour la première fois en 1646-1647, en 4 volumes in-folio de formats variés. Une seconde édition devait être publiée en 1661, douze années après la mort de Robert Dudley. Elle est illustrée des mêmes gravures mais beaucoup plus monumentales car imprimées en deux très grands volumes d’un même format. Le premier contient les livres I à V, qui réunissent les conseils sur tous les aspects de la navigation, construction navale, manœuvres militaires et explications pour dessiner des cartes précises. Le deuxième, le livre VI, est l’atlas proprement dit, contenant les 131 cartes. Un exemplaire de cette seconde édition (Florence, Giuseppe Cocchini, pour Jacopo Bagononi et Anton Francesco Lucini, 1661, 6 parties en 2 vol. in-folio), relié à l’époque en veau brun, sera mis en vente le 27 novembre 2024 par la maison Tajan, assistée par Ségolène Beauchamp, avec une estimation de 350/500 000 €.

Cet ouvrage est aussi exceptionnel que la biographie de Sir Robert Dudley, tour à tour corsaire pour le compte de la Couronne anglaise et ingénieur naval du duché de Toscane, sans oublier les méandres de sa vie privée. Il commença, semble-t-il, ses recherches vers 1631, tandis qu’Antonio Francesco Lucini (vers 1605 – après 1661) gravait les 489 planches, dont 146 cartes marines, sans oublier les 15 portulans qui ornent cette « encyclopédie maritime innovante, comprenant d’étonnantes pièces mobiles », comme le souligne l’expert Ségolène Beauchamp. « Ce traité marin d’une grande érudition est une référence en matière de calculs de navigation astronomique, dessins de cartes, construction de vaisseaux et batailles marines », explique encore l’expert. L’exceptionnel repose encore sur les planches gravées par Lucini qui nécessitèrent 5 000 livres (équivalant à 2 tonnes) de cuivre.

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