« Et nos morts ? » à la Maison Doisneau : une exposition qui interroge notre rapport aux défunts

Publié le 31/10/2023

Au cœur de la Maison de la Photographie Robert Doisneau, une exposition captivante se déploie jusqu’au 18 février 2024, révélant un pan méconnu de l’art photographique : la représentation des morts. « Et nos morts ? La photographie post mortem aujourd’hui en Europe », une exposition collective, lève le voile sur ce sujet délicat en présentant le travail de 20 artistes.

Eric Dexheimer, In Fine, tirages jet d’encre réalisés pour l’exposition, 2011

Eric Dexheimer / Signatures

Avec ce projet audacieux, la Maison Doisneau poursuit son exploration de photographie dite humaniste, en interrogeant non seulement l’histoire de l’Homme mais aussi les conditions de sa disparition. Pour la première fois, l’exposition se penche sur les morts individuels et multiples en Europe, avec un focus particulier sur la France. L’exposition débute avec des photographies datant du milieu du XXe siècle, mettant en lumière des artistes tels que Jacques Henri Lartigue, Laure Albin Guillot, Robert Doisneau et Raymond Voinquel. Ces images marquent les prémices d’une évolution : des contraintes techniques rigides et des codes funéraires immuables laissent progressivement place à une expression artistique plus libre et diversifiée.

Cette exposition dévoile un constat troublant : nos morts sont devenus invisibles dans l’espace médiatique occidental contemporain. Alors qu’autrefois, les portraits post mortem étaient monnaie courante dans les journaux et les médias, aujourd’hui, ils sont pratiquement absents. L’invisibilité des photographies post mortem dans nos sociétés occidentales révèle notre relation complexe avec la mort. Dans un monde où l’espérance de vie est élevée et où la mort est souvent reléguée à l’arrière-plan de nos vies, le deuil est devenu une expérience intime et solitaire. L’exposition interroge ce tabou contemporain et explore les émotions complexes liées à la vision des corps morts : la peur, la fascination, le chagrin, l’empathie et plus encore.

Le parcours de l’exposition suit une chronologie poignante des étapes après le décès : des rituels funéraires aux soins mortuaires, de la manipulation du corps aux obsèques. Chaque image expose ce qui est visible pour les vivants et ce qui reste habituellement caché, ce qui est permis de voir et ce qui est interdit. L’exposition offre ainsi un espace pour ces émotions et permet une réflexion profonde sur notre propre mortalité.

La photographie post mortem, dans sa confrontation avec notre sensibilité contemporaine, devient un moyen de sonder notre compréhension de la vie et de la mort. L’exposition « Et nos morts ? » à la Maison de la Photographie Robert Doisneau offre ainsi aux visiteurs une opportunité unique de contempler ces portraits post mortem, de réfléchir sur leur signification et d’explorer notre propre rapport à la mortalité.

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