Et s’il n’y avait pas d’adieu ?

Publié le 31/01/2025

Cette sculpture de Joseph Erhardy (1928-2012), l’Adieu (marbre de Carrare,  1972, 37,5 x 18 x 10,7 cm), a été adjugée 300 €

Crait & Müller/ Luc Pâris

Depuis une période récente, les faire-part de décès qui mentionnent la date, l’heure et le lieu des obsèques les indiquent avec cette formule commençant par « la cérémonie de l’À Dieu ». Elle contredit d’une certaine manière le constat qu’a fait Victor Hugo écrivant dans les Chants du Crépuscule (Eugène Renduel, 1835, in-8) : « J’ai observé que, d’ordinaire, on se dit “au revoir” quand on espère bien qu’on ne se reverra jamais – tandis qu’en général on se revoit volontiers quand on s’est dit “adieu”. » Ernest Hemingway (1899-1961) a, quant à lui, choisit le titre de son roman L’Adieu aux armes, publié en 1929, en s’inspirant du titre du chant final d’une pièce composée en 1590 par le poète, George Peele (1556-1596), en l’honneur du 42e anniversaire de l’avènement de la reine Élisabeth. L’écrivain cherchait-il à exprimer le départ des armées du soldat qu’il était, l’inanité de la guerre voire ce qu’elle engendrait pour détruire les amours de deux êtres jetés dans cette fournaise ? Dans le poème de Peele on voit un vieux chevalier devenu trop vieux pour combattre et aimer. Hemingway était âgé de 30 ans lorsqu’il écrivit ce roman, son troisième, qui remporta un énorme succès.

Avec ce livre, il rejoignait l’immense cohorte des adieux, ceux des marins sur le port, ceux des amants, ceux des voyageurs, des souverains déchus qui tous ont inspiré les peintres. On ne compte plus les tableaux représentant les adieux de Fontainebleau et ceux de Louis XVI à sa famille internée au Temple, sans oublier ceux de Mary Stuart à la France. Et Alain Delon dans le film Adieu l’ami de Jean Herman avec Charles Bronson, diffusé en 1968. Un exemplaire de l’affiche (1,20 × 1,60 m), a été vendu récemment 40 € à Drouot par la maison Blanchet. Elle voisinait avec l’affichette au titre plus optimiste du film de James V. Kern avec Errol Flynn et Eleanor Parker, Ne dites jamais Adieu (1946). Celle-là a obtenu 50 €.

Il faut combattre l’adieu. C’est sans doute ce que s’est dit Maurice Blanchet lorsqu’il composa le parfum Sans Adieu, lancé par Worth en 1925. Un flacon (vide) dessiné par Lalique, en verre vert émeraude, la panse cylindrique, le bouchon conique à gradins, en verre de couleur identique, a été adjugé 210 €, à Drouot, le 28 novembre 2022 par la maison Copages Auction. Malgré son titre, le fait que le flacon soit vide signifierait-il qu’il exprime un adieu ? Est-ce la raison pour laquelle René Lalique a remis son ouvrage sur le métier en dessinant, en 1926, un nouveau flacon en cristal pressé moulé teinté vert émeraude de section cylindrique, en forme rouleau. Il l’a coiffé d’un bouchon conique à six gradins (h : 35,5 cm). Une réédition a été vendue 644 €, à Drouot, le 29 novembre 2022 par la maison Coutau Bégarie.

Finalement, le geste de l’adieu appartient à la main qui, paume ouverte, oscille comme un salut rempli de promesses. Le sculpteur Joseph Erhardy (1928-2012) l’a figé en 1972, dans un bloc de marbre de Carrare (37,5 x 18 x 10,7 cm). Cet Adieu a été adjugé 300 €, à Drouot, le 8 décembre 2023 par la maison Crait + Müller assistée par le cabinet Lacroix-Jeannest.

Fin.

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