Exposition au Domaine de Chamarande : « Dans l’épaisseur de nos lisières, là où naissent les dragons »
Kathleen Petyarre, Mountain Devil Lizard Dreaming, 2010
Kathleen Petyarre
L’exposition collective « Dans l’épaisseur de nos lisières, là où naissent les dragons », qui se tient actuellement au domaine de Chamarande et ce jusqu’au 15 octobre 2023, propose une traversée du travail de 9 artistes au croisement de plusieurs disciplines (sculpture, peinture, dessin, performance, vidéo), qui dessinent une cartographie poétique et multiple de la notion de territoire.
Le territoire est une entité englobante : « promoteurs, chiendent, castors, rouges-gorges, jardiniers, OGM, politiques, abeilles, agriculteurs, habitants, juristes, zadistes, ours, bergers, loups, chasseurs », tous s’y entassent pour se partager ou se disputer les mêmes terres. Il devient alors zone de fantasmes et de projections, terre fictionnelle, mais aux enjeux bien réels. C’est donc à la frontière du rêve que les artistes l’habitent, chacun à sa manière, invitant à la fois à explorer et à dépasser les rapports de force que suppose cette notion.
Cathryn Boch forme, par exemple, des sculptures aux éléments hétérogènes : vieilles cartes routières et atlas qu’elle redessine, sur lesquelles sont cousues des objets et matières textiles, fragiles, rapiécées, qui pourraient évoquer les cicatrices d’un territoire que l’artiste répare et complète. On trouve des matériaux similaires chez Brankica Zilovic, qui, avec Retour à Ithaque, a choisi de broder 55 territoires reliés à l’Antarctique, sur autant de livres en format poche de l’Odyssée d’Homère, formant une constellation de petites îles de couleur. En organisant les différents territoires comme des espaces insulaires, qu’elle réduit tous à la même taille, elle réinvente les rapports entre les pays et créé de nouveaux liens, symbolisés par les fils de laine, dont la fragilité sonne comme un avertissement. Kathleen Petyarre, quant à elle, fait partie des artistes qui ont contribué à la revalorisation de l’art aborigène australien, intégrant dans ses toiles les motifs secrets du Temps du Rêve, mêlant topographie réelle (suivant le tracé d’un territoire existant) et chemins imaginaires aux courbes envoûtantes.
Brankica Zilovic, Retour à Ithaque, 2022-2023
Brankica Zilovic
Référence : AJU009m2