Géant dans la brume

Publié le 24/05/2018

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Connaissez-vous la légende du Géant de brume ? C’est une histoire que l’on conte aux enfants pour qu’ils restent bien sages…

Il était une fois… un géant de brume qui enlevait les enfants qui n’étaient pas sages…

« Si toi aussi tu n’écoutes pas bien tes parents, si tu désobéis, tu risques de faire la terrible rencontre de ce géant de brume… ».

En 2013, cette légende urbaine sévit encore dans la ville de Détroit…

Détroit, principale ville de l’État du Michigan, berceau du fordisme, des usines de voitures — d’où son surnom de Motor City. Mais Détroit, c’est aussi une ville empreinte de musique, la ville a abrité le siège de la Motown (compagnie discographique consacrée à la musique soul), celle du rap, avec Eminem.

Pourtant, cette cité n’est pas celle des anges, bien au contraire. Les anges l’ont délaissée et le sort s’abat sur elle depuis une quinzaine d’années.

Loin du rêve américain, Détroit a perdu un quart de ses habitants entre 2000 et 2010.

Cette ville est surtout la première à avoir été déclarée en faillite en 2011. Depuis, ses habitants, ses institutions tentent de sortir du marasme économique, survivre malgré la criminalité et le manque de moyens des services municipaux. La police, les hôpitaux vivotent tant bien que mal, des quartiers entiers ont été dévasté par la crise des subprimes et si certains vivent encore dans le centre-ville, bientôt ils risquent d’être expulsés…

Le décor est planté, cette ville ne fait pas rêver et pour couronner le tout un tueur en série sévit et enlève d’innocentes victimes : le fameux géant de brume.

C’est dans cette ville, symbole de l’Amérique en pleine décrépitude que se déroule le premier roman de Jérôme Loubry, et la ville joue un rôle primordial dans cette histoire.

Ce polar nous guide dans la ville, on découvre une cité rongée par la pauvreté, où ses habitants ont quitté la banlieue pour se rapprocher du centre-ville lui-même en pleine désertification.

L’ambiance est glauque, il pleut, les chiens des rues glapissent. Et ce géant de brume ressurgit après 15 ans…

Il y règne une ambiance crépusculaire ; c’est une ville froide, humide, dévastée, qui est ici décrite, le climat est sombre. Les personnages qui mènent l’enquête sont des êtres fracassés par la vie, mais qui tentent de faire de leur mieux pour arrêter ce géant qui sème la terreur.

Les deux personnages principaux sont très bien campés ; il y a Sarah Berkhamp, jeune femme dépêchée sur ces enlèvements qui ne souhaite pourtant pas mener l’enquête. Elle vit très mal sa dernière séparation et son infertilité, alors enquêter sur des disparitions d’enfants, c’est trop pour elle !

Quant à son coéquipier, Stan Mitchell, dit « le molosse », car il ne lâche rien, c’est un homme usé par la vie, les enquêtes et les sept corps d’enfants retrouvés morts 15 ans auparavant.

Jérôme Loubry a réussi à créer un véritable univers, son style est alerte, les personnages sont forts, et l’intrigue suffisamment développée pour nous donner envie de tourner les pages. Pour un premier roman, c’est une vraie découverte et un auteur très prometteur.

Ce couple infernal, borderline, résoudra cette enquête et réussira à mettre hors d’état de nuire ce prédateur pour que plus aucun enfant n’ait plus jamais peur, à Détroit ou ailleurs, de ce géant de brume.

LPA 24 Mai. 2018, n° 136n7, p.24

Référence : LPA 24 Mai. 2018, n° 136n7, p.24

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