Gravures de Rembrandt – Collection J. B. Mulders

Publié le 09/08/2016

Rembrandt van Rijn, Autoportrait avec Saskia, eau-forte, 104 x 95 cm, 1636.

J. B. Mulders

Dans l’Europe du XVIIe siècle, la gravure est très populaire et Rembrandt van Rijn est maître dans cette discipline. L’exposition de 150 feuilles issues de la collection de Jaap Mulders en témoigne une fois encore.

Le musée des Suisses dans le monde a pour objectif de rappeler combien ce pays a entretenu des relations suivies avec l’Europe, cette exposition le souligne. Le collectionneur s’est passionné pour la gravure de Rembrandt, y trouvant une analogie avec la photographie tant dans les contrastes de lumière que dans le désir du maître de capter l’instant, le moment intéressant en reflétant la réalité de ce qui l’entoure.

Entre 1627 et 1629, le maître de l’Âge d’or réalise une série de petits autoportraits aux diverses expressions, toute une gamme de grimaces étudiant ainsi la transformation du visage sous l’empire d’une émotion. Il affirme une minutie des détails, une dextérité et une variété du trait. Plus tard, il se représentera maintes fois en peinture, et ici en gravure en 1639, où il est au faîte de sa gloire. Trois ans plus tôt, il a gravé un portrait avec Saskia, auréolée de lumière, et lui plus ténébreux. Il révèle là ce que le mariage représente pour l’accomplissement de son art. Il affirme toujours dans ces feuilles un dessin juste et libre en un tracé nerveux.

Rembrandt s’intéresse à la figure humaine, ses portraits de vieillards d’une grande finesse avec leurs rides, barbe, chevelure abondante possèdent vérité et réalisme ; ils semblent indifférents au monde, représentés dans la subtilité de la lumière. La gravure est une partie importante de son travail avec une variété des tailles ; de l’ombre il fait émerger la lumière, le clair-obscur est l’élément fondamental de son œuvre.

Proche de la vie quotidienne, il réalise des portraits de gueux, des scènes de rues. Fasciné par la misère, il campe avec justesse et humanité des mendiants accablés par une vie de pauvreté en un dessin vivant et souple ; on lui reprochera de s’intéresser davantage à ces gueux qu’à la classe sociale élevée comme il est souvent de règle.

Mais peut-être est-ce dans les paysages que le graveur donne toute sa mesure, la grandeur de son talent. Chaque pièce est un petit bijou de finesse, de vérité de la nature, des arbres notamment. Il excelle à rendre la vérité de troncs séculaires sous de vastes ciels aux nuages légers ou menaçants tel Vue de l’Omval, où se trouve au premier plan un saule séculaire près d’un étang à l’eau miroitante en un intéressant contraste entre la puissance de l’arbre et la finesse du paysage.

Rembrandt dessine le plus souvent sur le motif, d’où la vérité des gravures où il témoigne souvent d’un sens du pittoresque. Quelques feuilles retiennent plus encore le regard : Paysage aux trois arbres, une composition magistrale où sont inscrits quelques personnages, paysage entre réel et imaginaire.

Une série de gravures se rapporte aux récits bibliques et à la vie du Christ. Dans ces compositions, Rembrandt utilise beaucoup le clair-obscur afin de faire porter l’attention du spectateur sur l’essentiel du sujet.

Ces feuilles vivantes traduisent la vie captée il y a tant de siècles et qui nous parvient dans la fraîcheur de l’instant.

LPA 09 Août. 2016, n° 119m7, p.23

Référence : LPA 09 Août. 2016, n° 119m7, p.23

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