Hollywood ou le prix de la gloire
Éditions de La Martinière
Le cinéma est-il un art ou une industrie ? À cette question de pure rhétorique, cela fait bien longtemps que les Américains ont tranché. Pour eux, le cinéma est une industrie comme une autre, un business, au même titre que l’armement ou la construction…
Preuve en est le dernier livre de Dominique Maisons, Avant les diamants, paru aux Éditions de La Martinière.
Dans ce roman noir, l’auteur retrace l’histoire presque vraie du montage d’un film de science-fiction, pure œuvre de propagande américaine, où producteurs, acteurs, militaires, pègre, ligue de vertus et stars se disputent gloire et argent…
Un scénario tellement rocambolesque et pourtant tellement réaliste…
Nous sommes en 1953 dans la Cité des Anges, dont le nom participe lui-même au mythe du rêve américain. Un producteur de série Z, Larkin Mofat, tente de s’en sortir en produisant de mauvais westerns avec des acteurs drogués qui ont fait leur temps…
Il croit son heure de gloire arrivée lorsqu’on lui propose de produire un film où les valeurs américaines et puritaines seront encensées, et ce afin de combattre l’ennemi communiste.
Ce deal se fait par l’entremise de l’armée américaine, via le beau et flambeur Major Buckman et sa consœur, l’incendiaire agent Annie Morrisson. Sous couvert d’une production indépendante qui lui procurera l’argent et la gloire, Larkin Mofat est invité à produire un film valorisant l’esprit patriotique. Grâce à l’argent de la mafia et du proxénète Johnny Stompanato, personnage qui a réellement existé, guidé par le Père Santino Storace, dont les valeurs sont peu chrétiennes, tous vont tenter de vivre, voire survivre, dans cette cité où les anges côtoient la pire espèce de bandits, ceux sans foi ni loi sinon celle de l’argent, dans une ambiance aussi mortifère que raciste et ségrégationniste.
Mofat connaît les règles du milieu ; s’il ne peut pas échapper aux dispositions du Code Hays qui s’invitent dans chaque production hollywoodienne et dont les valeurs défendues ne sont que le pur produit du puritanisme ambiant, l’argent est quant à lui détenu par des producteurs peu regardants sur l’origine des fonds qu’ils manipulent, enfin, les films sont faits pour un public protestant avide de divertissements mais qui ignore tout de ces magouilles… La moralité des uns et des autres peut bien s’acheter à coups de dollars ou de gloire.
C’est l’Amérique des films noirs, noirs comme leurs âmes, gangrenées par le crime, le racisme et l’avilissement des femmes qui doivent correspondre aux standards du jour, et quand l’une ne fait plus l’affaire, elle disparaît au détriment d’une plus jeune ou plus bête…
Ce roman lève le voile sur une période sombre et pourtant bien réelle de l’âge d’or du cinéma américain, où les auteurs européens ont cru pouvoir participer à une certaine forme esthétique d’un art populaire… qui ne se révélera être qu’un outil de propagande aux services de biens vilaines causes.
Dans ce roman, on croise aussi bien des acteurs sur le retour comme Errol Flynn ou Clarck Gable, un petit acteur membre d’un syndicat qui deviendra un jour, plus tard, président, ou des beautés à la gloire un peu oubliée comme Hedy Lamarr.
Le mélange entre personnages ayant réellement existé, des starlettes aux « vieux beaux » du cinéma des années trente, des mafieux, aux généraux de l’armée de la première puissance mondiale, font de ce roman une pure merveille. Il se dévore sans modération, comme une boîte de pop-corn dans nos salles de cinéma préférées mais hélas encore fermées, et ce n’est pas le final digne d’un opus de Quentin Tarantino qui prouvera le contraire.
À toutes ces beautés volées et à ceux qui ont rêvé de voir leur nom en lettres dorées sur le Walk Of Fame ou en haut d’une affiche, il faut lire Avant les diamants pour comprendre que ce rêve a un prix, et quel prix…