La beauté du tricot

Publié le 22/10/2021

Le tricot, 1941.

Aguttes

« Sortir, par quelle porte, ô rêve qui m’obsède ? Je voudrais m’évader, loin des sentiers battus. Aux semelles d’azur de mes souliers d’aède, l’argile du passé s’attache en globe drus », écrivait en 1936, Pham Van Ky (1910-1992), dans son premier recueil de poèmes, Une voix sur la voie. Cet écrivain vietnamien devait venir s’installer en France deux ans plus tard. Celui qui fut lauréat du Grand prix du roman de l’Académie française en 1961 s’est attaché dans son œuvre littéraire à la confrontation entre le Vietnam et la France, entre les cultures d’Extrême-Orient et celles d’Occident.

Les ventes spécialisées organisées aujourd’hui par la maison Aguttes, assistée par Charlotte Reynier-Aguttes, enregistrent des montants d’adjudication de plus en plus hauts. Le dernier en date s’est porté sur la toile Le tricot (encre et couleurs sur soie, signée et monogrammée), exécutée en 1941, par Luong Xuan Nhi (1913-2006). Cette œuvre simple et lumineuse a été adjugée 756 440 €. On en demandait 160/200 000 €, ce qui était déjà une somme confortable. Comme Lê Phô, Nguyen Gia Tri, Maï Thu, Le Thi Luu, Vu Cao Dam, Tô Ngoc Vân, et de nombreux autres encore, Luong Xuan Nhi passa par l’école des Beaux-Arts d’Hanoï, fondée en 1924 par le peintre Victor Tardieu, qui la dirigera jusqu’à sa mort en 1937. Là, notre artiste travailla sous la direction de Nguyen Nam Son, il fut même l’un des premiers peintres à utiliser la peinture à l’huile au Vietnam. Surnommé « le maître des verts », car il utilisait cette couleur dans ses paysages. On l’appela encore « le peintre de la beauté », grâce ou à cause de ses portraits de jeunes femmes. Le Tricot en est un bel exemple. Ici, l’artiste sublime cette jeune femme assise sur ses genoux, pieds nus, tricotant paisiblement. Les longues aiguilles semblent encore ajouter des mailles. L’élégance de son ao dai, – son vêtement traditionnel – son collier en or mais aussi sa délicate coiffure séduisent le spectateur. En outre, Luong Xuan Nhi, qui demeurait attaché au Vietnam traditionnel, montre dans cette composition un regard sensible sur la vie quotidienne où la femme occupe une place centrale. La même maison a vendu 170 125 €, le 6 juin 2016, le portrait d’une Jeune femme (encre et couleurs sur soie) confirmant son expression de la beauté. Ce que n’a pas négligé l’ancien directeur associé de la société Joseph Martin et représentant à Saïgon des Plantations des Hauts Plateaux en poste à Saïgon d’octobre 1929 à juillet 1966, qui acquit Le tricot directement auprès de l’artiste.

Maison Aguttes, 164 bis avenue Charles de Gaulle, 92200 Neuilly-sur-Seine.

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