La colombe décrochée

Publié le 04/01/2023

Cette « Colombe eucharistique » en cuivre ciselé et doré (Limoges, XIIIe siècle), a été vendue 26 000 €

Marie-Saint Germain

Selon les encyclopédies, la « colombe » est un nom vernaculaire dont le sens est ambigu en biologie car utilisé pour désigner seulement une partie des oiseaux classés dans la sous-famille des Colombidae, autrement dit les Colombinés. Cette famille représente les pigeons, tourterelles, tourtelettes, colombes, colombines, phasianelles, géopélies, gallicolombes, etc. Leur roucoulement ne suffit pas à les distinguer. Dans l’inconscient collectif, la colombe ramène à elle les plus beaux symboles, notamment celui de la paix. L’iconographie en la matière est abondante, d’autant plus que cet oiseau au plumage blanc éclatant incarne le Saint-Esprit. Depuis Noé, qui, depuis son arche, l’envoie afin de vérifier si les eaux ont baissé, jusqu’au baptême de Clovis où elle apparaît au-dessus de sa tête, en passant par le propre baptême du Christ et aussi sur saint Jean l’Évangéliste. Cette représentation a perduré dans les arts chrétiens du Moyen Âge et de la Renaissance, où la colombe apparaît souvent comme une représentation du divin. Ce n’est pas un hasard si le roi Henri III, créant en 1578 un nouvel ordre de chevalerie, lui donna le nom d’ordre du Saint-Esprit.

Une plaque de chevalier, une fabrication de la fin du XIXe siècle en argent, la colombe sur fond d’émail vert, a été adjugée 1 024 € par la maison Ader, assistée par Jean-Claude Dey et Arnaud de Gouvion Saint-Cyr.

Avant de figurer sur un insigne, la colombe a encore joué dans les rites chrétiens un rôle non négligeable dans la célébration eucharistique. Ces objets en argent, émaillé, en or aussi, furent consacrés afin de recevoir, comme les tabernacles, le « Corps du Christ ». Ils furent, sans doute d’abord à Byzance et ensuite en Occident, suspendus au-dessus des autels afin de préserver le pain consacré des rongeurs, et de manière symbolique offrait une représentation du Saint-Esprit.

Une Colombe eucharistique en cuivre ciselé et doré (Limoges, premier tiers du XIIIe siècle), a été vendue 26 000 € à Drouot, le 13 décembre dernier par la maison Marie-Saint Germain, assistée par Benoît Bertrand qui la décrit de cette manière : « Debout, la tête est droite, les ailes sont repliées le long du corps qui est gravé de plumes stylisées de forme losangique, le bec est strié, les articulations du haut des pattes sont marquées par un décrochement, la queue est en éventail ; la panse du côté droit s’ouvre par une porte découvrant une niche pour conserver les saintes espèces ».

Les premières mentions de colombes eucharistiques datent du IIIe siècle. Ces objets sacrés furent utilisés jusqu’au XIIIe siècle, date à laquelle les nouvelles pratiques liturgiques de l’adoration du Saint-Sacrement les firent disparaître des voûtes auxquelles elles étaient suspendues.

Marie-Saint Germain, 253 rue Saint-Honoré, 75001 Paris.

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