La préface inédite de Calligrammes

Publié le 16/10/2024

Considérant ses calligrammes, Guillaume Apollinaire expliquait à André Billy, « ils sont une idéalisation de la poésie vers-libriste et une précision typographique à l’époque où la typographie termine brillamment sa carrière, à l’aurore des moyens nouveaux de reproduction que sont le cinéma et le phonographe. » Si ces poèmes traduits par des mots dessinés sont aujourd’hui unanimement reconnus, il n’en fut pas de même lors de sa sortie en librairie. Son accueil a plutôt été mitigé. Les lecteurs ont mal compris cette innovation, pire, on a jugé les poèmes trop peu critiques vis-à-vis de la guerre. Un exemplaire de l’édition originale numéroté sur papier d’édition de ce recueil, titré Calligrammes. Poèmes de la paix et de la guerre (1913-1916), paru dans le Mercure de France en 1918, a été adjugé 260 €, à Bruxelles, le 21 septembre 2024 par la maison Damien Voglaire. Les éditions originales sont ornées d’un portrait en frontispice par Picasso gravé sur bois par Jaudon. La couverture de cet exemplaire-ci est brunie.

Apollinaire avait prévu une préface pour cet ouvrage. Le manuscrit de cet « Avertissement de l’auteur » resté inédit (une page in-4) mis en vente à Drouot, le 22 octobre 2024 par la maison Magnin Wedry, assisté par Thierry Bodin avec une estimation de 3 000/ 4 000 €. « Voici la plus grande partie de mes poèmes de guerre jusqu’au moment où j’ai été grièvement blessé », écrivit-il sans doute en 1917. « Je les adressais à mes amis dans des lettres d’où ceux-ci ont bien voulu les tirer. Il m’en manque encore beaucoup. J’ai laissé de côté pour ne la publier que plus tard ma production poétique d’avant la guerre. Les idéogrammes lyriques qui ouvrent le recueil avaient été faits peu de temps avant que n’éclatât le grand conflit et allaient paraître sous le titre d’Et moi aussi je suis peintre, lorsque la mobilisation fut décidée. L’édition disparut dans la tourmente… »

Le poète précise ensuite qu’une partie de ses poèmes d’artilleur a paru en 1915 dans un petit livre polygraphié à 25 exemplaires au bureau de sa batterie. Il est intitulé Case d’armons et c’est je crois le seul recueil édité sur la ligne de feu où l’on a surtout publié des journaux. Ils sont devenus des trésors bibliophiles. Ces 21 poèmes sont insérés dans le recueil Calligrammes. Le catalogue propose aussi les trois premiers poèmes de la section Lueurs des tirs dans Calligrammes ; 1 page in-4 (27 x 21 cm) : La grâce exilée ; La boucle retrouvée et Refus de la colombe, estimés 6 000/ 8 000 €.

Tous ces manuscrits, archives personnelles du poète, conservées par Jacqueline Apollinaire (1891-1967), furent donnés après sa mort à Bernard Poissonnier (1898-1993), collectionneur et marchand d’art, ami et homme de confiance de Jacqueline Apollinaire, éditeur avec Robert Mallet du Guetteur mélancolique. Il fit des dons importants en 1989 à la Bibliothèque nationale et au Musée Picasso. Il avait cependant conservé quelques documents aujourd’hui mis en vente.

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