L’aiguière de Murat

Publié le 09/02/2022

Cette aiguière, commandée par Joachim Murat à l’orfèvre Biennais, est estimée 120/150 000 €.

Osenat

La puissance d’un prince se voit aussi par le luxe qu’il affiche. Il n’est pas certain que Louis XIV aurait été un mauvais roi s’il n’avait fait bâtir Versailles. Bien sûr, comme le souligne Sacha Guitry, « le luxe est une affaire d’argent. L’élégance est une question d’éducation » ! Dirions-nous que Joachim Murat aurait été un meilleur souverain s’il n’avait pas commandé à l’orfèvre Biennais, une aiguière – et son bassin – destinée à une athénienne semblable à celle commandée par Napoléon ? Ce meuble de toilette que Napoléon légua à Caroline Murat est aujourd’hui conservé au Louvre. Avant d’aller plus loin, rappelons-nous que l’athénienne est un meuble qui peut avoir trois fonctions : lavabo, jardinière ou brûle-parfum. Pourquoi ce nom ? En 1763, le peintre Joseph-Marie Vien (1716-1809), composa un tableau figurant une prêtresse à Athènes célébrant le culte d’Athéna et le faisait au moyen d’un meuble de ce type. Cela fit florès et nombreux firent leur toilette comme s’ils célébraient un culte à la déesse de la sagesse et de la stratégie militaire. Ce qui a dû plaire à l’empereur.

Joachim Murat (1767-1815) venait, semble-t-il, de ceindre la couronne du royaume des Deux-Siciles, lorsqu’il commanda au même orfèvre Martin-Guillaume Biennais (1764-1863) une aiguière et son bassin. Ces deux pièces en vermeil, exécutées en 1809, seront mises en vente à Fontainebleau, le 12 mars prochain par la maison Osenat, avec une estimation de 120/150 000 €. Elles sont marquées l’une et l’autre par un poinçon de titre 950 Coq 1, un poinçon de moyenne garantie, le poinçon d’orfèvre Biennais, au singe, et la signature sous le pied : « Biennais Orfèvre de LL MM Impériales et Royales et de Sa Majesté le Roi de Hollande à Paris ». Ces deux pièces étaient destinées à une athénienne de grand luxe dont seuls trois exemplaires sont répertoriés, l’un au Louvre, l’autre à Fontainebleau et le dernier au Metropolitan Museum.

L’anse en col-de-cygne, des feuillages, palmes et fleurettes, frise de laurier, de cariatides ailées, guirlandes de feuilles de laurier à rubans et fleurettes, enrichie à la base de griffons ailés enrichissent ces pièces d’orfèvrerie et participent à leur somptuosité. Le pied de l’aiguière est gravé des grandes armes du roi Joachim Murat, tandis que le fond du bassin montre au centre des grandes armes du roi Joachim Murat, ceinturé d’une couronne de feuilles de lauriers gravés et enrichis d’un large décorde volutes fleuries, de feuillages et roseaux. Ces armoiries sont entourées du collier de la Légion d’honneur et non de celui de l’ordre des Deux-Siciles ; ce qui permet d’indiquer que ces pièces ont été fabriquées vers 1808-1809. Le roi de Naples n’aura pas profité longtemps de son « lavabo ». Après Waterloo, il se réfugia en Corse et tenta de reconquérir son royaume. Capturé en Calabre, il fut passé par les armes, le 13 octobre 1814.

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