Le silence de Juliette
Cette statue, intitulée Le Silence, par Joseph Chinard, provenant de la chambre de Juliette Récamier, a été adjugée 918 720 €
Osenat
Georgiana Spencer, qui deviendra duchesse de Devonshire (1757-1806), écrivait à propos de Juliette Récamier (1777-1849) : « D’abord elle est bonne, ensuite elle est spirituelle, après cela elle est très belle ». Chacun a en mémoire le portrait que réalisa d’elle, assise sur une chaise, François Gérard (1770-1837). Celui-là révèle beauté de la jeune femme, célébrée par d’autres peintres comme David (Jean-Louis, 1748-1825). Ce dernier laissa volontairement inachevé son tableau après avoir appris que Gérard avait reçu une commande identique. Rappelons encore le buste par Joseph Chinard (1756-1813), qui renforce le charme et l’attraction mystérieuse de cette femme qui a fasciné ses contemporains, dont François-René de Chateaubriand, sans doute le grand amour de sa vie. « Il me semble que vous êtes d’une autre nature que le reste de la terre et que votre figure vous a été donnée pour le prouver », lui écrivait Madame de Staël.
Juliette Bernard épousa le 11 avril 1793, le banquier Jacques-Rose Récamier de 26 ans son aîné ; elle était alors âgée de quinze ans. Ce fut un mariage blanc ; on laisse entendre en effet qu’il aurait été son père et aurait voulu grâce à cette union, protéger sa fille et… sa fortune. Le couple s’installa dans un hôtel sur la Chaussée d’Antin, quartier privilégié à l’époque de la nouvelle bourgeoisie. Le réaménagement intérieur fut confié à l’architecte Louis-Martin Berthault (1767-1823). La chambre de la jeune épousée, comme un musée, fut meublée par les frères ébénistes Jacob en 1799. Ce mobilier devint une référence du style néo-classique. À un tel point que l’on venait la visiter. Cette chambre a été reconstituée dans sa quasi-totalité depuis 1994 et est désormais conservée au musée du Louvre. Il manquait la torchère (h : 194 cm) d’après Charles Percier (1764-1838).
Cette pièce en bois vert et doré, et sa girandole à neuf branches de lumière en bronze doré, a été préemptée à 86 770 € par le musée du Louvre le 4 décembre 2022, lors de la vente « L’Empire à Fontainebleau », organisée par la maison Osenat, assistée par Marie de La Chevardière et le cabinet Lacroix-Jeannest.
Figurait encore dans la chambre de Madame Récamier, une statue titrée Le Silence (marbre blanc,hauteur : 86 cm), sculptée vers 1798 par le Lyonnais Joseph Chinard, et posée sur une gaine en acajou et bronze doré (hauteur : 108,5 cm), exécutée la même année par Jacob Frères, d’après Louis-Martin Berthault (1771-1823), et qui a été adjugée 918 720 €. Ce Silence est une reprise de la Femme barbare ou Thusnelda du musée des Offices à Florence. Cette œuvre montre au dos un plissé remarquable et l’attitude du modèle, empreinte de retenue, n’est pas sans faire songer au buste réalisé par le même Chinard, de Juliette. Sur le socle a été gravée une inscription latine pouvant se traduire par « Elle protège les songes et les amours, complice de la couche ». Nous n’en saurons pas plus sur les amours de Juliette…
Osenat, Hôtel d’Albe 9-11, rue royale, 77300 Fontainebleau
Référence : AJU007j6