Les derniers jours de Mandelstam

Publié le 18/01/2017

Ossip Emilievitch Mandelstam, poète et essayiste russe, naquit à Varsovie, dans une famille juive, en 1891. Il fut l’un des principaux représentants de l’acméisme, un moment de la poésie russe, peu avant la révolution d’Octobre. Mandelstam suivit les cours de la prestigieuse école Tenichev, à Saint-Pétersbourg, puis il partit étudier à la Sorbonne, de 1907 à 1908, suivant les cours de Joseph Bédier et d’Henri Bergson qui auront une influence sur son œuvre. Il étudiera ensuite, à Heidelberg, la littérature française et l’histoire de l’art, puis la philosophie à l’université de Saint-Pétersbourg où il put s’inscrire après s’être fait baptiser. Mandelstam fut membre de la Guilde des poètes, et ses premiers poèmes parurent en 1910 dans la revue Apollon.

Dans les années 1920, Mandelstam délaissa la poésie pour écrire des livres pour enfants et traduire des œuvres d’Upton Sinclair, Jules Romain ou Charles De Coster. Mais il demeura marginal dans le contexte littéraire russe de cette époque, se tournant plus volontiers vers la culture traditionnelle dont le rôle était pour lui central. Cette position lui valu, de la part des autorités soviétiques, un doute quant à sa loyauté vis-à-vis du régime bolchévique. Ainsi, il sera suspecté d’activité contre-révolutionnaire, malgré les interventions de Gorky et de Pasternak. En 1930, il partit en Arménie où il écrivit son Voyage en Arménie, puis il revint à la poésie après cinq ans de silence. À l’automne 1933, Mandelstam composa un poème, bref, de seize vers, Épigramme contre Staline, Le Montagnard du Kremlin. Il fut arrêté une première fois en 1934 et exilé à Tcherdyne puis à Voronej jusqu’en 1937.

Le récit de Vénus Khoury-Ghata se resserre sur les dernières années de la vie de Mandelstam, qui furent tragiques. Nous sommes au mois de décembre 1938. Ossip Mandelstam, déporté en Sibérie, n’était plus qu’une faible respiration, un corps qui s’épuisait, gagné par le typhus. Il payait là pour le poème avec lequel il défia Staline, car comment le « tsar rouge » pouvait-il supporter et oublier le contenu de ses vers de 1933 : « Et chaque exécution est un régal / Dont se pourlèche l’Ossète au large poitrail » ?

L’œuvre et la vie de Mandelstam sont exemplaires. Il ne pouvait accepter le compromis. Son drame est celui de milliers d’autres esprits libres de cette période. Sa femme, Nadejda, le raconta dans son livre Contre tout espoir, paru en 1972. Le livre de la poétesse Vénus Khoury-Ghata est une ode à l’écrivain dont elle se sent si proche.

 

 

LPA 18 Jan. 2017, n° 122u9, p.13

Référence : LPA 18 Jan. 2017, n° 122u9, p.13

Plan
X