Les miracles japonais d’Huguette Berès

Publié le 26/01/2024

La série de 68 estampes, consacrée aux miracles de la déesse Kannon, est estimée 6 000/ 8 000 €

Beaussant Lefèvre

Au centre de l’île d’Hokkaidō, dans le parc Kita-No-Miyako, au Japon, se dresse une statue féminine représentant la déesse Kannon. Ce monument haut de 88 mètres, inauguré en 1989, est la 10e plus haute statue au monde. En japonais Kan signifie observer ; on signifie le son. Kannon, c’est celle qui entend les cris du monde. Cette apparence correspond au bodhisattva Avalokiteśvara, celui qui incarne la compassion ultime. Cette figure, dont la tête est ornée d’une auréole dorée, a le regard baissé, en signe de recueillement ou de prière, les bras et les mains dans la position du mudrā vitarka, signe de transmission de l’enseignement du Bouddha.

Cette vénération repose sur les miracles accomplis par cette divinité. Un album sous couverture en bois, monté en accordéon, comprenant 68 estampes dont la page de présentation de la série avec les titres des différentes estampes, décrit les miracles de cette déesse (Kannon Reigenki Hyaku Ban Mokuroku). Cet album, réalisé par Hiroshige II (1826-1869), et Toyokuni III (1786-1865), sera mis en vente le 2 février 2024 par la maison Beaussant Lefèvre, assistée par Alice Jossaume du Cabinet Portier & Associés, avec une estimation de 6 000/8 000 €. Cette grande série, conçue entre 1858-1859, raconte donc des miracles accomplis par Kannon, avec des scènes se déroulant dans des temples. Elle est normalement divisée en trois parties : trente-trois estampes pour les provinces de l’Ouest (Saigoku), trente-trois pour les provinces de l’Est (Bandô) et trente-quatre pour les provinces du Centre (Chichibu). Ici, l’album regroupe les 33 provinces de l’Ouest et les 34 provinces du Centre. Chaque estampe (36,5 x 24,5 cm) est ornée d’une scène avec des personnages et d’un texte et signée Kunisada ou Toyokuni, tandis que dans la partie supérieure figure, inséré dans un cadre en trompe-l’œil, un paysage signé Hiroshige II.

Cette pièce provient de la collection d’Huguette Berès (†1999) qui ouvrit en 1952 sa galerie au 25 quai Voltaire. Celle-ci, consacrée aux œuvres des XIXe et XXsiècles, présentait également des œuvres orientales et plus particulièrement du Japon. La galeriste n’a cessé, au cours des années suivantes, d’enrichir ses collections, en achetant en nombre ces fameuses estampes japonaises à une époque où ce domaine était mal connu. Elle savait reconnaître les feuilles ukiyo-e, les « images du monde flottant », imprimées sur des feuilles très fines. La collection personnelle d’Huguette Berès a été dispersée au cours d’une première vacation en 2002, suivie par une deuxième en 2010. Celle-ci, la dernière, comporte 384 lots. Sa fille Anisabelle, qui avait ouvert en 2002 rue de Beaune une galerie essentiellement centrée sur l’art japonais, a repris avec sa propre fille Florence Montanari la galerie du quai Voltaire, dédiée aux œuvres d’avant-garde et d’après-guerre en France. Mais comme le souligne le rédacteur de la préface du catalogue de vente, « les estampes marquées du cachet Berès continueront de faire rêver les amateurs avertis ou novices au gré des collections futures ».

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