Les « portraitures » de Saint-Igny

Publié le 08/02/2023

Ferri

Certains personnages ont eu une vie publique si remplie que l’on ne sait rien, ou peu de chose de leur vie privée. C’est le cas de Jean de Saint-Igny, qui est né entre 1595 et 1600 à Rouen et mort après 1649. S’il résida à Paris, où il mourut, il semble qu’il a vécu davantage dans sa ville natale de Rouen. Il y participa à la fondation de la Guilde Saint-Luc, en 1631, et en fut même élu Maître, quatre ans plus tard. Ce Monsieur de Saint-Igny était donc un artiste peintre. Fort de ses talents d’observateur, il composa un essai sur sa manière. Il a intitulé son ouvrage : Elemens de pourtraiture [ou la méthode de représenter toutes les parties du corps humain] (À Paris, Chez François l’Anglois dit Chartres, s. d. [1630]. In-12), comprenant 74 planches et treize figures gravées, dont une sur une planche. La page de titre est ornée par les armes de Michel Larcher d’Olisy (vers1660-1715), [d’azur au chevron d’or accompagné de deux roses d’argent en pointe et d’une croix patriarcale d’argent en pointe], intendant de Rouen puis de Champagne, président de la Cour des comptes, à qui l’ouvrage est dédié.

Un exemplaire de cet ouvrage, relié à la fin du XIXe, pastiche du XVIIIe, en maroquin rouge, orné d’un triple filet doré encadrant les plats, le dos à nerfs orné et les tranches dorées, a été adjugé 3 200 €, à Drouot, le 9 novembre 2022 par la maison Ferre & Associés, assistée par Emmanuel de Broglie, lors de la dispersion des collections de Pierre Lallier. Cet exemplaire a autrefois appartenu à Pierre-François-Léon Duchesne de la Sicotière ( 1812-1895), son ex-libris en fait foi. Monsieur Duchesne fut notamment fondateur de la Société historique et archéologique de l’Orne.

On met souvent en exergue le portrait de Louis XIV partant à la chasse au faucon, une peinture sur bois (41 x 30), exécutée en 1647, par Saint-Igny et désormais conservée au musée Condé à Chantilly. Ses œuvres sont, disent les critiques, fortement marqués par le maniérisme imposé à Paris par Bellange, Lallemant et Vignon ainsi que Bosse, et qui est resté à la mode pendant un certain temps après le retour de Vouet d’Italie en 1627. Mais l’histoire de l’art a davantage retenu ses grisailles et ses gravures fort nombreuses, sans oublier ses scènes de genre. Ce qui a fait dire qu’il fut l’un des illustrateurs les plus représentatifs des mœurs et des modes de son temps.

Jules Hédou (1833-1905), lui-même Rouennais, considéra d’ailleurs deux siècles plus tard que Jean de Saint-Igny « était, ainsi que Bosse et quelques autres, le peintre ou plutôt le dessinateur qu’il fallait pour représenter tout ce monde de cape et d’épée, vivant dans la première moitié du XVIe siècle. Ses estampes nous donnent une idée exacte de la vie de ce temps troublé, et ce n’est pas sans raison qu’on a appelé cet enfant de Rouen, le Gavarni des raffinés de Louis XII » !

Ferri & Associés, 53 rue Vivienne, 75002 Paris

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