Manolo Valdés, « Monumentales égéries »

Publié le 18/02/2021

Manolo Valdés, « Monumentales égéries »

Cabeza con Mariposas, Manolo Valdés.

Erik Lasalle

Impressionnante, cette galerie d’art à ciel ouvert qui accueille, avenue George V, 10 sculptures de Manolo Valdés, sculpteur et peintre espagnol à la renommée internationale. Quel bonheur en cette période si difficile de retrouver l’art sans contrainte. L’on doit cette exposition à l’Opéra Gallery qui a souhaité rendre ce magnifique hommage dans l’un des quartiers célèbres de Paris aux confins des Champs-Élysées.

Ces œuvres, quelques-unes monumentales, mesurent 7 mètres et ont besoin d’espace pour « vivre » pleinement, besoin de cette liberté. Le parcours se révèle poétique autant qu’artistique, puisqu’avec ses sculptures, Manolo Valdés revisite l’histoire de l’art. Il confère une allure contemporaine aux œuvres classiques, telles Les Ménines de Vélasquez, qu’il ne cesse de représenter, parfois mystérieuses ; elles ont fait, en partie, son succès, toujours différentes selon les matériaux utilisés.

Né à Valence en 1942, il effectue ses études à l’école des Beaux-Arts de sa ville et commence une carrière de peintre alors engagé contre le franquisme avec un groupe d’amis. L’abstraction tient la vedette à cette époque des années 1950, et le jeune artiste, s’il n’est pas hostile à ce mouvement, ne prend pas ce chemin, la figuration inventive l’intéresse bien davantage. Il s’intéresse à ce moment-ci à la sculpture, et différentes matières l’intéressent ; c’est ainsi qu’il s’exprime à travers le bronze, l’aluminium, la résine, l’acier inoxydable. Rapidement, il se révèle comme un artiste novateur qui unit avec talent liberté créatrice et admiration pour les maîtres anciens qui l’ont marqué durant ses études : Zurbaran, Gréco, Vélasquez, Botticelli entre autres.

D’emblée, l’on est frappé par le superbe travail de sculpture qui unit avec tant de bonheur classicisme et une invention presque débridée, telle cette représentation de la déesse Clio, dont le nom signifie « fêter » et qui chante les héros. S’il s’inspire de Botticelli, c’est de façon lointaine, en particulier dans Clio White, où le visage esquissé et expressif est surmonté de fines lignes d’aluminium dynamiques, jaillissantes, coiffure extravagante et superbe. Manolo Valdés communique par la beauté puissante de ses « Ménines », certaines réalisées en plaques de résine striées, d’autres colorées de bleu ou de rouge qui s’imposent par leur beauté. Il s’exprime par la simplicité des volumes, leur monumentalité et tantôt par des créations poétiques : Cabeza con Mariposas. Ici, le visage semble protégé par de grands papillons aux ailes déployées, en bronze à patine verte. Plus loin, voici en aluminium Ariela, dont les traits juvéniles sont entourés d’une cascade de feuilles doucement teintées de bleu, d’ocre.

Cette promenade parmi ces sculptures suscite l’admiration devant le talent singulier et accessible à tous, de cet artiste qui, par sa magie créatrice, fait revivre des chefs-d’œuvre et propose en parallèle des créations qui parlent d’aujourd’hui. Manolo Valdés, en effet, ne demeure pas enfermé dans son atelier, il observe le monde, les humains, le quotidien et transmet ses émotions au gré de son invention et selon sa perception. Cet art séduit également par cette alliance si réussie de puissance et de légèreté, d’innovation aussi, c’est un hymne à la féminité.

Cette création s’intègre parfaitement à l’atmosphère urbaine, lui apporte sérénité, calme.

LPA 18 Fév. 2021, n° 159p0, p.24

Référence : LPA 18 Fév. 2021, n° 159p0, p.24

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