Nerval et la Lorely

Publié le 27/01/2023

Cet exemplaire de l’édition originale de Lorely. Souvenirs d’Allemagne, publié en 1852 et enrichi d’un mot de Nerval, est estimé 1 000/1 200 €

Giquello

Qui n’a pas retenu ces quelques vers du poème d’Heinrich Heine, consacré à Lorelei : « La plus belle jeune fille est assise. Là-haut merveilleusement ». Cette fameuse jeune fille dont la voix mélodieuse séduisait les marins qui, en oubliant la navigation, se perdaient dans les flots, est toujours assise à 132 mètres au-dessus d’un méandre du Rhin, près de Saint-Goarshausen. Il y a beau temps que les marins, prévenus, ne se méfient plus de la belle. Toujours est-il que ce « conte des siècles anciens » a séduit nombre d’auteurs depuis Clemens Brentano (1778-1842), Henrich Heine jusqu’à Apollinaire (1880-1918), sans oublier Gérard de Nerval (1808-1855). Ce dernier, on l’a un peu oublié, irrésistiblement attiré par ces contrées, effectua au moins sept voyages outre-Rhin.

De ces endroits, il rapporta de nombreux écrits et articles. Et aussi son chef-d’œuvre Aurelia, que l’on retrouve dans le recueil Le Rêve et la Vie, dont un exemplaire de l’édition originale, relié en demi-chagrin vert, orné, a été adjugé 2 000 €, à Drouot, le 10 décembre 2021 par la maison Pierre Bergé & Associés, lors de la dispersion de la bibliothèque Geneviève et Jean-Paul Khan III. Auparavant, Nerval avait songé à publier ses inspirations allemandes. Il attendit une dizaine d’années avant de les réunir. Cet ouvrage n’est pas un simple recueil ;  ses textes sont organisés selon un rythme qui n’appartient qu’à l’auteur, c’est-à-dire l’enthousiasme et la mélancolie qui mènent à une certaine magie. De plus, en son centre est enchâssé sa pièce écrite en collaboration avec Alexandre Dumas, Léo Burckart.

Lorely n’est pas l’ouvrage le plus connu de Nerval. Il mérite néanmoins d’être aligné aux côtés de ses autres livres qui sont autant de chefs-d’œuvre. Un exemplaire de l’édition originale au titre complet : Lorely. Souvenirs d’Allemagne (Paris, D. Giraud et J. Dagneau, 1852. In-12), relié à l’époque en demi-chagrin violet, frappé des armoiries de Charles de Mandre sur le premier plat [« D’azur à une bande d’or, accompagnée de sept billettes du même, posées quatre en chef et trois en pointe »], les tranches mouchetées, sera mis en vente à Drouot, le 3 février 2023 par la maison Giquello, avec une estimation de 1 000/1 200 €. A été joint à cet exemplaire provenant de la collection de Lucie Scheler, une photographie et un billet de Nerval, daté du 26 novembre 1851, pour deux places de théâtre, à l’attention de Mademoiselle Laurentine (de Moisson de Brécourt), actrice de l’Odéon, qui devint en 1858 la première épouse de Victorien Sardou. Laurentine de Brécourt était l’amie de la célèbre actrice Virginie Déjazet, qui offrit à Victorien Sardou un théâtre : Les Folies Déjazet, devenu le Théâtre Déjazet. Quant à Charles de Mandre (1805-1875), il était propriétaire des houillères de Ronchamp. De l’avis du bibliophile Rhémus : « La plupart des livres [de Charles de Mandre] ne comportaient d’autre intérêt que les autographes qu’[il] y avait ajoutés. La condition des exemplaires était plus que médiocre ».

Giquello & Associés, 5 rue La Boétie, 75008 Paris

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