Quelle cloche à bord ?

Publié le 30/09/2024

Par Alain.Darles — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, via Wikicommons

À quoi donc peut servir une cloche sur les bateaux ? D’abord, leur nom officiel est « cloche de quart » pour la simple raison qu’elle servait à bord à réguler les quarts de service des marins. Leur présence est toujours obligatoire, car elle signale le navire par temps de brume et donne l’alarme en cas d’avarie ou d’incendie. Généralement en bronze, ces cloches pouvaient être en laiton, comme celle qui sera mise en vente, à Drouot, le 2 octobre 2024 par la maison Jean-Marc Delvaux lors de la succession du peintre Claude Cambour (1940-2012). Cette cloche fait partie d’un lot comprenant une boussole de marine [on devrait dire compas], un sextant en laiton et un théodolite, et est estimée 30/50 €. Cette cloche est marquée 1841, mais ne porte pas comme le veut l’usage le nom du bateau auquel elle appartenait. C’est pourtant grâce à cette inscription que les archéologues marine peuvent identifier une épave.

Pour toutes ces raisons, la cloche de quart, même si, aujourd’hui, elle ne les rythme plus, fait partie de l’histoire maritime et… permet de taquiner les béotiens. La première question que les marins aguerris posent à ceux qui montent à bord d’un vaisseau est : combien de cordes y a-t-il à bord ? C’est naturellement un piège. Combien alors ? Une seule, celle de la cloche, les autres étant des cordages ? Êtes-vous sûr de votre réponse ? Devant l’embarras du terrien, le marin malin réplique : il y en a deux, quelle est l’autre ? Nouvelle hésitation. La réponse arrive comme un cri de mouette moqueuse : la seconde est sa remplaçante.

Le vocabulaire marine est plein de particularités et les hommes de mer aiment le faire savoir avec un brin de taquinerie vis-à-vis des non-connaisseurs. Ce n’est pas le cas de Pascal-Raphaël Ambrogi, qui vient de publier un Dictionnaire culturel de la mer et de la marine (Édition Champion, 1024 p. 38 €). Cet ouvrage est une somme ; il s’inscrit dans l’héritage d’Augustin Jal (1795-1873), un archiviste de la marine qui, en 1848, publia un Glossaire nautique. Répertoire polyglotte de termes de marine anciens et modernes (Paris, Firmin Didot frères). L’exemplaire du prince de Joinville, relié en demi-chagrin bleu, est passé en vente le 23 novembre 2017 et a été adjugé 877 € par la maison Pierre Bergé & Associés.

Haut fonctionnaire, Pascal-Raphaël Ambrogi sait ce qu’est la mer. Il n’est pas étonnant qu’il soit aussi capitaine de vaisseau dans la réserve opérationnelle. Pour lui, « la richesse du vocabulaire de la mer et de la marine est gage de liberté. Il importe de connaître ces mots de l’océan et ceux des gens de mer qui vivent à ses côtés depuis des millénaires. » Cette profession de foi se traduit dans ces pages par un inventaire de plus de 16 000 entrées. « En progressant dans cet ouvrage […] le lecteur percera les mystères du large. Il entendra le sifflement de la bourrasque, sentira le goût salé des embruns et le pont mouvant des bateaux », dit l’amiral Pierre Vandier, major général des Armées, ancien chef d’état-major de la Marine, qui lui aussi entend la mer.

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