Réminiscences

Publié le 14/11/2019

Réminiscences

Gallimard

Les générations futures, dont l’apprentissage de l’écriture manuscrite semble définitivement relégué en arrière-plan, auront-elles la chance de connaître la joie de l’encre sympathique ?

Ce « liquide incolore servant à écrire un texte secret et n’apparaissant que sous l’action de la chaleur ou d’un réactif », selon la définition du Larousse,a permis à des générations entières de se délester de secrets en toute impunité, et combien de trésors et autres mystères ont-ils pu être cachés puis révélés grâce à ce procédé…

Certes aujourd’hui il y a Snapchat… mais on ne peut pas dire que cela soit tout à fait la même chose !

Il y a évidemment un côté désuet à se souvenir de ce que l’on avait bien pu écrire, jouer les détectives, retracer un sentiment, une émotion, ou découvrir un code secret, et justement il y a un peu de tout cela dans le dernier roman de Patrick Modiano, Encre sympathique, paru aux éditions Gallimard.

Le narrateur part à la recherche d’une certaine Noëlle Lefebvre, mais on ne sait pas bien pourquoi. L’agence de détective dans laquelle il travaille lui a confié cette mission.

Dans cette quête, on suit le parcours de ce jeune homme à différents moments de sa vie. Mais on n’en saura pas plus. Peu d’indications formelles, nous ne savons pas exactement quand l’histoire se déroule, en revanche on découvre ou redécouvre certains quartiers de Paris, et notamment le XVe arrondissement. La précision des lieux, le parcours pour y arriver sont aussi précis que sont approximatifs, les dates, les noms des personnes rencontrées…

Il y a de la nostalgie, presque un vague à l’âme qui nous touche dans ce récit. On suit le narrateur, Paul, Jean, on ne sait plus bien, dans ses déambulations. Mais est-ce vraiment une enquête, cherche-t-il vraiment cette mystérieuse Noëlle ? Le seul élément vraiment concret est le carnet retrouvé fortuitement dans une table de nuit, un agenda bien vide où seules quelques indications encore plus mystérieuses sont distillées, et ce fameux : « Si j’avais su… ».

Patrick Modiano joue avec le lecteur. Il nous perd dans des lieux oubliés de la capitale parisienne mais aussi à Rome, où le récit prendra fin.

Les mots du romancier nobélisé en 2014 restent ancrés en nous comme une mélodie. Son style, simple et précis, est toujours aussi jubilatoire !

Les réminiscences du passé font face à l’oubli, peu importe le temps qui passe, et certains souvenirs restent indélébiles…

LPA 14 Nov. 2019, n° 149f5, p.16

Référence : LPA 14 Nov. 2019, n° 149f5, p.16

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