Shakespeare romantique
Othello et Desdémone, Jules Robert Auguste, musée du Louvre.
RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / René-Gabriel Ojéda
Au XIXe siècle, de nombreux peintres se tournèrent vers des textes du passé, ceux de l’Antiquité et ceux des poètes et des dramaturges. Le théâtre de William Shakespeare les intéressa particulièrement pour la morale, la psychologie des personnages et leurs sentiments exacerbés. Ainsi, avec les spécificités de leurs histoires, les pièces de Shakespeare nourrirent un grand nombre d’œuvres picturales des romantiques et des symbolistes.
L’exposition qui se tient actuellement à Saint-Omer souligne le regard et la lecture qu’ils eurent sur cette œuvre incomparable depuis le théâtre grec. Des œuvres de Johann Heinrich Füssli, Eugène Delacroix, Théodore Chassériau, Paul Albert Steck, Gustave Moreau, Auguste Préault ou Gustave Doré sont présentées : soixante-dix peintures et gravures nous plongent dans la tragédie shakespearienne.
En 1824, Stendhal écrivait : « Tous les grands écrivains ont été les romantiques de leur temps ». En effet, le XIXe siècle fut marqué par un grand enthousiasme pour les grandes œuvres littéraires telles celles de Dante, de l’Arioste, de Shakespeare ou de Racine. Elles devinrent d’essentielles sources d’inspiration. Les peintres entretinrent alors une relation par l’art de la mise en scène de ces fresques romanesques et dramaturgiques. En France, les pièces de William Shakespeare furent une véritable redécouverte, et elles influencèrent les artistes qui créèrent un art de l’émotion et de la peinture narrative.
Les œuvres de Delacroix, Chassériau, Moreau, Préault ou Füssli constituent un imaginaire collectif que firent naître les pièces de Shakespeare. Leurs créations influencent encore aujourd’hui les mises en scène des pièces du dramaturge anglais. Cela indique le caractère universel des thèmes qu’il développa et de la psychologie que Shakespeare, en bon connaisseur de l’homme, sut décrire et soumettre à notre lecture et interrogation.
Cette exposition nous permet de redécouvrir Shakespeare sous l’angle d’images et d’interprétations, chacun des artistes ayant privilégié des thèmes et des images narratives particulières. Elle permet des confrontations entre certaines œuvres, dont certaines n’ont jamais été exposées ensemble. Par exemple, sont réunis les trois fragments du Songe de la reine Catherine de Füssli, nous permettant de visualiser la composition originale ; ou l’ensemble des pierres lithographiques que réalisa Delacroix, exposé pour la première fois en dehors de Paris, parallèlement avec les lithographies qu’elles ont permis d’imprimer.
Le 25 novembre 2015, une annonce officielle a relaté la découverte de l’ultime first folio connu, dans les fonds de la bibliothèque d’agglomération du Pays de Saint-Omer. Cette découverte a suscité un intérêt international, et le texte est depuis étudié par des spécialistes de Shakespeare. Des rencontres régulières ont lieu, et la ville de Saint-Omer a maintenant pour ambition de rejoindre le cercle des « Villes Shakespeare ». Au mois de mai dernier a eu lieu un « Shakespeare day » pour le lancement de cette exposition.