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Publié le 25/09/2018

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Que peuvent bien avoir en commun une libraire de Manhattan, un jeune rescapé de l’Holocauste et un mafieux new-yorkais ? C’est ce que vous découvrirez en vous plongeant dans le roman de R. J. Ellory, Les fantômes de Manhattan, paru aux éditions Sonatine.

En moins de 500 pages, R. J. Ellory retrace de sa plume alerte, près d’un demi-siècle d’histoire, passant du récit historique de la libération de Dachau, aux quartiers miteux de New-York des années 1950-1960, jusqu’au Manhattan intellectuel d’aujourd’hui.

L’auteur s’amuse avec tous les clichés qui entourent New-York, en jouant sur la fibre sentimentale quand il le faut et sur la peur et l’angoisse quand il s’agit de raconter l’histoire de gangsters. Le tout avec ce supplément d’âme qui fait de R. J. Ellory, un auteur qui compte dans le paysage littéraire américain, car c’est surtout un très grand narrateur de l’Amérique, de son histoire et des troubles de l’âme humaine.

Comme une petite mélodie dans la tête ou un vieux film des années 1950, ce récit est en réalité une fresque retraçant l’histoire de New-York, de ses immigrés ayant fuit les horreurs de la guerre aux bobos en panne d’amour.

L’auteur joue avec les lecteurs tout comme le dénommé Forrester joue avec Annie O’Neil. Jeune trentenaire, orpheline, Annie rêve de sortir de son quotidien morne et de sa librairie, une petite boutique au coin d’une rue, pour trouver le grand amour. Elle s’ennuie mais ne fait rien pour changer son quotidien, personnage passif, elle devra apprendre à se lâcher et à écouter ses sentiments pour le meilleur et pour le pire !

Ce roman se lit comme un récit d’émancipation, dans lequel Annie devra abandonner certains de ses rêves et certitudes, abandonner les fantômes qui peuplent sa mémoire pour se retrouver parmi les vivants et leur faire confiance.

Tous les personnages sont campés avec brio même si certains peuvent paraître un peu trop caricaturaux : Annie, perdue dans ses rêves qui se laisse vivre sans écouter ses émotions, Forrester, gentil papy ou personnage plus inquiétant, David, l’amoureux distant, ou encore Jack Sullivan, le voisin alcoolique mais si dévoué.

Entre histoire sentimentale et vengeance, R. J. Ellory laisse à chacun de ses personnages la place d’exister et donne corps à la fois à la femme solitaire, au bandit de grands chemins et à l’ami dévoué. Le tout au son de Sinatra.

Le talent de conteur de R. J. Ellory est flagrant dans les pages qui retracent le parcours du gangster ; ce roman dans le roman nous plonge dans le quotidien de la pègre new-yorkaise, faite de violence et d’arnaques.

Quand la petite histoire retrace la grande histoire sur laquelle s’est bâtie l’Amérique…

LPA 25 Sep. 2018, n° 139a0, p.16

Référence : LPA 25 Sep. 2018, n° 139a0, p.16

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