Trésors impressionnistes à Martigny
Ordrupgaard
En 40 ans, la Fondation Gianadda a présenté les plus grands artistes du milieu du XIXe siècle jusqu’à nos jours, et cela grâce à l’amour de l’art de Léonard Gianadda et à ses inlassables recherches.
L’exposition actuelle réunit 60 tableaux, du romantisme à l’impressionnisme, provenant de la collection danoise Ordrupgaard, constituée entre 1916 et 1918, par Wilhelm et Henny Hansen et dans laquelle figurent de nombreux chefs-d’œuvre. L’acquisition de ces œuvres françaises, par le couple Hansen, s’explique par l’attrait que constituait la France dans le domaine artistique. Une colonie de peintres danois est présente à Paris à cette époque. Wilhelm Hansen effectue des séjours dans la capitale, se rend chez les célèbres marchands Ambroise Vollard, Bernheim-Jeune ou Paul Rosenberg et, parfois conseillé par le critique d’art Paul Duret, il acquiert des tableaux de grande qualité et constitue sa collection en deux ans seulement ! En 1918, il ouvre le musée Ordrupgaard à Copenhague.
L’ensemble des tableaux choisis par Léonard Gianadda est de grande facture. S’il ne fallait retenir que trois œuvres, choix subjectif, ce serait : La Corbeille de poires, un bijou de douceur en des gris-bleutés, des verts nuancés pour les fruits peints par Manet en une matière légère, puis une nature morte signée Odilon Redon, rare dans l’art du peintre, par sa sobriété rigoureuse, mais où la couleur est toujours présente. Enfin, les huit peintures de Gauguin, témoignages de son évolution picturale parmi lesquelles l’étude inattendue de La Petite rêve, enfant endormi. Cette composition de ses débuts est exécutée en de longues touches délicates ; ici, la magie du sommeil et du rêve stimule l’imaginaire. Dans Les Arbres bleus, peints par Gauguin, à Arles, chez van Gogh, en 1888, l’artiste déploie un chromatisme lumineux ; les troncs bleus, élancés, encadrent un paysage coloré de rouge sombre sous des nuages au jaune intense ; on est ici dans la période symboliste.
Les œuvres romantiques ouvrent l’exposition, dont le superbe et sobre portrait de George Sand, à laquelle Delacroix confère une vraie présence. Surprenant, celui de Dante offrant la Divine Comédie à Homère, réalisé par Ingres en de sombres tonalités, fort expressif. Les grandes figures du pré-impressionnisme et de l’impressionnisme sont présentes : Manet, Monet, Cézanne, Degas, Renoir et bien d’autres réunis en un accrochage réussi.
Nombreux sont les paysages, depuis ceux de Corot, qui enchantent par la sensibilité, la délicatesse avec laquelle ils sont traités et souvent sous la clarté bleutée du ciel. De Courbet, on retient le réalisme de La Chasse au chevreuil dans une forêt enneigée ; quelques-unes de ses œuvres annoncent l’impressionnisme, Jules Dupré ou Charles-François Daubigny de l’École de Barbizon, si proches de la nature.
Parmi les tableaux d’Alfred Sisley consacrés en priorité à l’eau et aux ports, on remarque une somptueuse Allée de châtaigniers aux arbres puissants, majestueux. Les œuvres de Monet affirment son plaisir de travailler en plein air, de saisir les différentes lumières du jour, de différents lieux : marine au Havre ou pont de Waterloo légèrement noyé de brume… Les six toiles de Pissarro réalisées à diverses périodes font apparaître les étapes de sa création ; il passe de l’impressionnisme à un pointillisme discret. Quant à ses vues urbaines plongeantes, elles reflètent l’animation de la ville.
Parmi les portraits, on trouve un petit format de Renoir, Une femme dans l’herbe : si le visage est « écrit », la robe s’étale, peinte en une palette discrète et en touches dynamiques apparentes. Il faudrait évoquer encore Berthe Morisot, ou de Cézanne Les Baigneuses, dont la nudité sensuelle occupe le premier plan. Enfin, ce sont les tableaux de Gauguin, témoins de ses recherches.
Un panorama de la peinture des siècles précédents magnifiquement évoqué !