Une très longue robinsonnade

Publié le 10/04/2024

Illustration de Robinson, dans l’ouvrage L’Ombrelle, le gant, le manchon d’Octave Uzanne et Paul Avril

Daniel De Foe (1660-1731) est-il vraiment le premier romancier anglais ? C’est une belle légende qui conforte le succès de cet ouvrage qui en inspira bien d’autres. Selon les bibliographes, le premier roman anglais serait Pandosto. The Triumph of Time de Robert Greene, publié pour la première fois en 1588 et traduit en français par L. Regnault, et imprimé en 1615. Si concurrence il y avait, Robinson Crusoé s’est largement imposé en renommée. Ce roman parut pour la première fois en 1719, sous le titre The Life and Surprising Adventures of Robinson Crusoe, of York, Mariner (London : W. Taylor, 1719), complété par The Farther Adventures of Robinson Crusoe. Un exemplaire de cette édition originale, relié à l’époque et avec les usures du temps, sous étui en maroquin, a été adjugé 81 250 $, à New York, le 14 septembre 2021 par Christie’s. Cette édition est ornée d’un portrait en frontispice gravé par Clarke et Pine, d’une carte du monde dépliante. Le succès de cet ouvrage, inspiré par le mythe de la liberté, celui de l’île déserte, et celui du bon sauvage, sans oublier le mythe chrétien… fut tel qu’il fut réimprimé dix-sept jours plus tard…

Thémiseul de Saint-Hyacinthe et Justus Van Effen s’attelèrent à la traduction en français, en lui donnant un titre un peu plus long que celui de l’original : « La Vie et les aventures étranges et surprenantes de Robinson Crusoé de York, marin, qui vécut 28 ans sur une île déserte sur la côte de l’Amérique, près de l’embouchure du grand fleuve Orénoque, à la suite d’un naufrage où tous périrent à l’exception de lui-même, et comment il fut délivré d’une manière tout aussi étrange par des pirates. Écrit par lui-même » (Amsterdam, chez L’Honoré et Zacharie Châtelain, 1720-1721, 3 volumes in-12). Le volume 2 porte en guise de sous-titre la description « Contenant son retour dans son isle, & ses autres nouveaux voyages » et le volume 3 « Reflexions serieuses et importantes de Robinson Crusoe, faites pendant les avantures surprenantes de sa vie : avec sa vision du monde angélique ». Cette première édition est illustrée d’un portrait représentant Robinson et son parasol par Bernard Picart, d’une carte répétée dans les deux premiers tomes, et de 20 figures. Il comprend en outre cinq autres gravures hors texte constituant l’une des premières éditions au monde à être illustrée de gravures hors texte ; jusque-là les ouvrages ne comportaient en gravure qu’un frontispice. Un exemplaire de cette première traduction, relié à l’époque en plein veau moucheté, dans un état moyen, a été vendu 400 €, à Paris par la maison Vermot. Les éditions se sont ensuite succédé à un rythme soutenu. Citons, par exemple, celle de Chez Cailleau, Dufour et Cuissart, (1761, 4 tomes en 3 volumes in-12), reliée à l’époque en veau moucheté, dos lisse orné, qui a été vendue 150 €, à Drouot, le 22 mars 2023 par la maison Thierry de Maigret, ou encore celle de chez Cazin, à Londres (1784, 4 volumes in-12), également reliée à l’époque en veau moucheté, triple filet doré encadrant les plats, dos lisse orné, tranches dorées, vendue 60 €, à Drouot le 10 mai 2023 par la maison Ferri.

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