Yang Ermin, la réapparition de la couleur

Publié le 24/12/2020

Yang Ermin, la réapparition de la couleur

Musée d’art et d’histoire Louis-Senlecq

Cette exposition propose une confrontation de deux conceptions de la peinture de paysage : celle de l’Extrême-Orient et celle de l’Occident, pour établir un dialogue entre les œuvres d’un peintre contemporain chinois, qui a renouvelé la peinture traditionnelle de paysage, et la collection de peintures de paysage de la fin du XIXsiècle du musée de l’Isle-Adam, dont Jules Dupré (1811-1889) est la figure principale.

Yang Ermin est né en 1971 à Quyang, dans le Hebei, province qui enclave Pékin. C’est un artiste lettré et érudit. Il a étudié la peinture et le patrimoine chinois. Diplômé de l’Académie des arts de Nankin, il a obtenu un doctorat en esthétique au Japon.

Yang Ermin s’est intéressé à la peinture occidentale, particulièrement à Monet, Cézanne, Gauguin, Van Gogh et aux travaux des Nabis. Yang Ermin est aussi sculpteur et poète, chef de file d’un mouvement rassemblant des artistes adeptes de la peinture au lavis polychrome, substitut à part entière de l’huile et de l’acrylique. Le peintre souligne, d’autre part, que les textes poétiques sont un constant enrichissement à sa pratique.

En parlant de l’art contemporain, Yang Ermin a écrit : « La norme en art contemporain est celle du monde, c’est à l’aune de l’humain qu’elle s’est forgée. Au siècle dernier, des hommes comme Xu Beihong, Lin Fengmian, ont, après des séjours longs en France, préconisé qu’il fallait reformer la peinture chinoise au lavis, ce que reconnaissent les hommes d’aujourd’hui. Il leur a fallu s’intégrer dans une sorte de norme mondiale ».

En introduisant des couleurs intenses dans sa pratique du lavis, Yang Ermin sort de la tradition chinoise, dont le lavis se caractérise, depuis le Xe siècle, par l’utilisation unique de l’encre noire. Dans son travail, il accorde une place prépondérante au paysage, qui constitue, comme nous le savons, le genre le plus noble dans la peinture classique chinoise. Yang Ermin réalise aussi des natures mortes où se regroupent des fleurs et des fruits, et des objets familiers dans des intérieurs à l’atmosphère sereine.

Yang Ermin montre, avec ses paysages, sa connaissance de la composition des peintres anciens, des Tang au Qing notamment, dynasties au cours desquelles les montagnes, en particulier les sites célèbres, sont l’objet d’imposantes compositions. Il ne semble pas académique aujourd’hui ni restrictif, pour un peintre, de s’attaquer à des sujets traditionnels.

Le regard sur la nature, sur cet univers qui environne les humains nous appelle à une certaine modestie, car la grandeur et la beauté de la nature nous donnent beaucoup de joie et nous invitent au voyage.

La peinture de Yang Ermin montre un équilibre et une harmonie, et sa poétique est empreinte d’une certaine quiétude. La peinture à l’encre de Yang Ermin conserve le caractère premier d’une spontanéité. C’est un univers où la nature est présentée active et où le peintre a agi avec simplicité, répondant à des valeurs et à l’ordre de la nature. Une grande fraîcheur s’en dégage.

Tout en montrant un renouveau, ses paysages répondent cependant aux règles séculaires de la peinture chinoise. Elles sont relativement simples en apparence, mais d’une grande complexité pour y répondre : ouvert/fermé, serré/clairsemé, vide/plein, loin/près, élevé/bas, sec/humide, clair/foncé…

L’œuvre de Yang Ermin produit des sensations, des réflexions qui disent l’originalité de son travail. Originalité qui a fait le lien, et certainement une synthèse, entre l’Orient et l’Occident.

LPA 24 Déc. 2020, n° 156f7, p.23

Référence : LPA 24 Déc. 2020, n° 156f7, p.23

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