Le Conseil national des barreaux lance un site dédié à la médiation
Le Conseil national des barreaux (CNB) a lancé le 20 septembre en présence de la presse son site dédié à la médiation : cnma.avocat.fr. Celui-ci recense les avocats médiateurs dont la qualité est certifiée par le CNB et permet ainsi à la profession de se positionner sur un marché en plein développement.
« Depuis des années les avocats ne sont plus uniquement des vecteurs de contentieux, mais ils s’inscrivent dans une logique d’accompagnement juridique de leurs clients pour éviter les contentieux » analyse le président du CNB Pascal Eydoux qui ajoute : « nous avons appris à nous passer des juridictions pour des raisons économiques, politiques et de demande de la clientèle. Cependant, le grand public nous identifie encore trop à nos robes ; nous en sommes fiers mais elles ne suffisent plus à identifier les missions qui sont les nôtres ». Il présente ce 20 septembre à la presse la nouvelle plate-forme du CNB dédiée à la médiation. Celle-ci se développe à l’heure actuelle sous l’impulsion de l’Europe avec par exemple la directive n° 2013/11/UE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 imposant la médiation dans tous les secteurs de la consommation, mais aussi plus récemment avec l’article 7 loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle qui la rend obligatoire en matière familiale à titre expérimental dans 11 tribunaux pour 3 ans. La médiation est donc devenue pour les avocats un « marché » à part entière. Nul n’y disposant d’un quelconque monopole, ils sont en concurrence avec de nombreuses autres professions, dont les notaires et les huissiers. Pour démarquer l’offre des avocats de celle de leurs concurrents, le CNB a misé sur l’exigence de qualité. Ainsi, la plate-forme qui vient d’être lancée ne se limite-t-elle pas à recenser les avocats pratiquant la médiation, elle exige pour y inscrire un avocat qu’il ait suivi 200 heures de formation à la médiation. Le jour du lancement, la plate-forme recensait 260 professionnels dans toutes la France.
Le public ne supporte plus l’aléa judiciaire
Pour, Pascal Eydoux la médiation répond à une véritable attente de la clientèle : « le grand public supporte de moins en moins l’aléa judiciaire. Il veut participer à l’élaboration de la solution à son problème. Il ne souhaite plus que l’autorité judiciaire tranche en lui disant : le droit c’est ça ». Et ça tombe plutôt bien parce que les pouvoirs publics ne peuvent plus ou ne veulent plus supporter l’augmentation illimitée de la demande de justice et le problème budgétaire à long terme que cela soulève. Ils encouragent donc la médiation comme solution de régulation des flux. Dans ce contexte, « il est hors de question que les avocats abandonnent le terrain de ce passage procédural obligatoire à d’autres », assure Pascal Eydoux. Précision importante, la plate-forme n’est pas un centre de médiation, mais un lieu d’information pour le public sur ce qu’est une médiation et comment trouver un avocat spécialement formé à cette activité. Il offre aussi un accès réservé aux professionnels pour développer leur pratique. Le CNB est persuadé que ce mode alternatif va se développer en raison de ses nombreuses vertus. Pour le justiciable, c’est une économie de coût et de temps car un entretien préalable et deux ou trois rendez-vous suffisent souvent à éviter des années de procédure. Le taux de réussite, tous domaines confondus, serait à l’heure actuelle de 70% ! Il est vrai que dans une médiation, les parties sont a priori d’accord pour rechercher une solution et travaillent donc dans la transparence, ce qui facilite les choses. Par ailleurs, les solutions susceptibles d’être choisies sont plus variées que dans un procès.
Sans juge, sans robe et sans palais
La conférence de presse a été aussi l’occasion pour le CNB d’évoquer sa prochaine Convention qui se tiendra à Bordeaux du 18 au 21 octobre sur le thème «Économie, numérique et territoires : les nouvelles stratégies pour l’avocat ». « Nous voulons montrer que la profession est capable d’offrir un service rénové de qualité, instantané et renseigné en termes de coûts, confie Pascal Eydoux. « Il y a quelques années, les avocats n’y étaient pas prêts, cela a été difficile, nous sommes désormais en marche vers le développement de cette nouvelle offre et capables de nous affranchir des territoires physiques. L’avocat doit savoir faire valoir ses capacités quel que soit le lieu où il se trouve ». Cette notion d’affranchissement du territoire physique pour une profession en principe très enracinée dans un espace via son tribunal et son barreau constitue en effet un défi de taille. D’ailleurs, une table ronde sera consacrée à « l’avocat sans juge, sans robe et sans palais ». « Nous n’abandonnons évidemment pas les activités traditionnelles », a tenu à souligner le président Pascal Eydoux.
Ramener l’ordre au barreau de Paris
Sans surprise, la presse a mis à l’ordre du jour de cette conférence de presse, les problèmes rencontrés par le bâtonnier de Paris dans le cadre de son litige avec Jean-Louis Bessis (lire ci-après) et l’impact possible sur la profession. La question n’était pas pour déplaire au président qui a souligné que le CNB n’avait pas d’avocats missionnés mais fonctionnait avec des permanents et, en cas de recours exceptionnel à des professionnels extérieurs, imposait des conventions d’honoraires. « Ce qui se passe nous impose de rappeler que les ordres sont des régulateurs de l’exercice professionnel et ont donc besoin de moyens pour exercer cette régulation. Ce n’est pas un péché de dédier un budget à ces missions », a souligné le président du CNB. « Certains confrères veulent plus de précisons, c’est un sujet, les ordres doivent faire un effort pour répondre à ces demandes », autrement dit pour assurer davantage de transparence dans le choix et la rémunération des avocats qui travaillent pour les ordres. « Ce n’est pas de nature à avoir de l’influence sur les travaux du CNB qui est indépendant des ordres a assuré Pascal Eydoux qui tenait visiblement à faire passer le message à propos des mésaventures de l’ordre de Paris, avant de s’avouer à titre personnel consterné par la situation. « Je souhaite que très rapidement les choses soient en ordre de façon à ce que ça n’atteigne pas la profession toute entière » a-t-il conclu.