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Nathalie Bourgeois-De Ryck, la magistrate passionnée de street art

Publié le 16/01/2023

Depuis le mois septembre 2022, Nathalie Bourgeois-De Ryck occupe la fonction de première présidente de chambre à la cour d’appel de Versailles, auprès du premier président Jean-François Beynel. Une nouvelle étape dans sa carrière de plus de 30 ans dans la magistrature. En parallèle de sa profession, elle nourrit une passion pour une activité inscrite pleinement dans la culture urbaine, le street art.

Un samedi après-midi de novembre dans le vingtième arrondissement de Paris à la recherche d’œuvres d’art. Une habitude pour la magistrate Nathalie Bourgeois-De Ryck. Non pas dans le cadre de sa profession mais pour alimenter sa passion pour le street art. En jean, basket et doudoune rouge bordeaux, elle parcourt les rues pour revoir ou découvrir des fresques sur les murs du quartier Ménilmontant. Et sur un bâtiment avancé, il y a ce tigre de plus d’un mètre sortant d’une forêt de bambou sur fond bleu. La passionnée d’urban art reconnaît tout de suite l’artiste à l’origine de cette œuvre. « Là vous avez une œuvre d’un artiste que j’aime bien qui s’appelle Mosko. Il réalise souvent des animaux sauvages. Dans cette rue, il y a ce tigre et un peu plus loin si je me souviens bien il y a une panthère noire », détaille Nathalie Bourgeois-De Ryck en pointant du doigt le bout de la rue.

« Plus je me promène dans les villes, plus je me familiarise avec les auteurs et leurs œuvres »

Cette passion pour l’art de rue a commencé il y a une dizaine d’années. « J’aime beaucoup me promener dans les villes. Ce qui m’intéressait au départ c’était l’architecture. Au fil de ces promenades, je me suis aperçu qu’il y avait des fresques, que je considère comme de véritables œuvres d’art sur les murs. Puis, progressivement, j’ai commencé à m’intéresser à la littérature sur le street art », souligne la juge. Elle lit Urban Art Magazine, suit des applications pour identifier des zones où elle peut trouver des œuvres. Jusqu’à devenir une connaisseuse de l’histoire et des types d’œuvres qu’elle peut débusquer : pochoirs, fresques ou encore mosaïques. « Plus je me promène dans les villes en France, plus je me familiarise avec les auteurs et on finit par chercher les œuvres de ces artistes. Bordeaux est très riche en street art. Il y a un artiste qui s’appelle Charles Foussard, je vais aller chercher les nouvelles œuvres qu’il a pu réaliser », explique Nathalie Bourgeois-De Ryck.

Au-delà de la France, elle a également parcouru de nombreuses zones urbaines à l’étranger. En tombant parfois dans des quartiers dédiés au street art comme Bushwick dans l’Est de New York. « Vous ne savez plus où donner de la tête », souligne-t-elle. Face à l’esprit éphémère de cette activité artistique, la street-art-trotteuse de la magistrature préfère immortaliser ses rencontres. « Je prends beaucoup de photos. Elles sont conservées sur disque dur, classées par ville et par année. J’aime bien pouvoir conserver les œuvres qui m’intéressent », précise-t-elle, sans pouvoir donner une estimation du nombre de clichés qu’elle possède.

Un moyen de décompresser du quotidien de magistrate

Au détour d’une rue du vingtième arrondissement, Nathalie Bourgeois-De Ryck tombe sur une fresque réalisée sur un mur long de vingt mètres. Une réalisation qu’elle ne connaît pas. Face à une œuvre, elle adopte toujours la même méthode : « J’ai toujours une vision périphérique en regardant l’ensemble. Puis souvent, je regarde des choses plus précises surtout sur une œuvre monumentale pour décrypter ce que l’artiste a voulu raconter ». Un moyen de s’évader, de décompresser et de sortir de sa position statique dans le cadre de sa profession de magistrate qu’elle exerce depuis une trentaine d’années.

Et il en faut de l’évasion dans le quotidien de Nathalie Bourgeois-De Ryck. Dans le cadre de sa carrière dans la magistrature, une affaire « marquante » ressort lorsqu’elle était juge des enfants au tribunal de grande instance d’Évry, entre 1996 et 2004. Elle se souvient : « C’était une affaire au pénal devant une cour d’assises pour mineurs, que je présidais en qualité de juge des enfants. Pour le dire de manière triviale, c’était à propos d’une « tournante » dans une cave avec des actes horribles. Elle impliquait des mineurs qui avaient commis des viols sur des jeunes filles. Le dossier concernait beaucoup de victimes et beaucoup d’auteurs. L’audience a duré plusieurs jours et le dossier était très pesant car sa durée était exceptionnelle pour une cour d’assises des mineurs ». Et elle le souligne, l’expérience permet d’acquérir le recul nécessaire à cette activité professionnelle.

Un poste d’expérience à la cour d’appel de Versailles

L’expérience, Nathalie Bourgeois-De Ryck la possède. En témoigne la nouvelle étape franchie dans le cadre de sa carrière. En septembre 2022, elle a rejoint la cour d’appel de Versailles pour occuper la fonction de première présidente de chambre. « Il y a peu de magistrats qui exercent cette fonction. Une vingtaine sur toutes les cours d’appel. L’objet de cette fonction est d’encadrer des pôles juridictionnels civils ou pénaux dans les cours d’appel », résume-t-elle. Son quotidien : animer et coordonner l’activité des 21 chambres et de la soixantaine de magistrats, dans les domaines civil, commercial, social ou encore familial. Elle fait aussi le lien entre les juges et le premier président Jean-François Beynel. L’objectif est d’orienter la politique juridictionnelle de la cour d’appel et des quatre juridictions du ressort en fonction de la volonté de ce dernier.

Mais comme tout magistrat, Nathalie Bourgeois-De Ryck mène aussi des audiences notamment en référé. « Avec ces missions d’animation, je vais donc avoir une fonction où la possibilité d’être en juge unique est plus importante. Les dossiers ne sont pas les plus importants de la cour d’appel mais en référé, vous pouvez avoir des dossiers conséquents. Il y aura des conclusions écrites mais une part du contentieux est en procédure orale », explique-t-elle. Et cette fonction à la cour d’appel de Versailles déteint de ses précédents offices : « C’était la possibilité pour moi de revenir dans une juridiction du fond pour de nouveau occuper des fonctions juridictionnelles et faire profiter mes collègues de la cour d’appel de l’expérience que j’ai pu acquérir à la Cour de cassation. Les liens entre les cours d’appel et la Cour de cassation sont très forts ».

Nathalie Bourgeois-De Ryck connaît bien la plus haute juridiction française. D’abord, en tant qu’auditrice entre 1993 et 1996 puis en qualité de conseillère auprès de la première présidence de la Cour de cassation en charge des groupes de travail, des relations institutionnels et avec les cours d’appel, entre 2019 et 2022. Depuis 2017 et sa nomination à la vice-présidence du tribunal d’instance de Longjumeau, elle a atteint le grade de magistrat hors hiérarchie, le plus élevé dans la magistrature. Une distinction graffée dans la carrière de Nathalie Bourgeois-De Ryck lancée en 1989 lorsqu’elle sort de l’École nationale de la magistrature.

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