Quand le barreau de Paris s’affiche sur TikTok
Avec le lancement en mai dernier de son compte TikTok, le barreau de Paris complète sa présence sur les réseaux sociaux en visant une cible plus jeune et avec un objectif à trois niveaux. Retour sur 6 mois de présence sur TikTok.
Avec déjà plus de 29 000 abonnés sur Twitter, 55 000 sur LinkedIn et 40 000 sur Facebook, le barreau de Paris a récemment rejoint des réseaux sociaux plutôt plébiscités par la jeunesse : Instagram (avec 6 900 followers) et depuis mai TikTok. Depuis ces débuts, le compte Avocats Paris a convaincu 832 abonnés et recueilli plus de 1,8 million de vues sur la vingtaine de vidéos publiées. Contrairement aux autres réseaux sociaux, qui s’adressent plutôt à des confrères et consœurs avocats, les contenus partagés sur TikTok ont vocation à s’adresser aux personnes très peu familiarisées avec le droit.
Patrimoine, archive et éducation populaire
Sur Instagram, le Barreau met souvent en valeur certains des nombreux procès historiques ayant fait date dans la région Île-de-France (anciennement le département de la Seine), comme celui de Bobigny (ouvrant une révolution sur l’accès à l’avortement), le procès en diffamation d’Émile Zola ou celui de Louis XIV. De même, il donne à voir les coulisses du monde des robes noires en fêtant par exemple les 40 ans du serment Badinter (présentant les quatre vertus cardinales de l’avocat : « d’exercer la défense et le conseil avec dignité, conscience, indépendance et humanité ») ou d’expliquer le concours de la Conférence des avocats organisé tous les ans à l’automne.
Le compte TikTok entend, certes, continuer sur cette lancée avec l’objectif de publier une vidéo par semaine. C’est la bâtonnière, Julie Couturier, qui régulièrement figure dans les vidéos et photographies sur les réseaux sociaux du Barreau, qui a eu l’idée d’inscrire l’institution sur le réseau de 1,7 milliard d’utilisateurs dans le monde, très jeune dans la majorité (en France, 72 % des inscrits ont moins de 24 ans). Elle est appuyée par le vice-bâtonnier, Vincent Nioré. « Le but, c’est d’atteindre et de toucher une cible plus large que celle des confrères et consœurs présents sur LinkedIn et Facebook. De manière générale, un public non initié au droit et au monde judiciaire », explique Charlotte Hildebrand, membre du conseil de l’ordre et associée à la SCP Huvelin et associés. Pour ce faire, l’équipe de communication secondée par une agence spécialisée a travaillé à créer un savant mélange entre les codes de TikTok et la rigueur imposée par le Barreau et la matière judiciaire. « Dans la première vidéo, on a repris des influenceurs déjà très connus par les jeunes et on a mis en scène des confrères et consœurs, ce qui permet de rajeunir l’image de la profession ».
Depuis sa création,il y a 6 mois, le profil du Barreau a publié une vingtaine de vidéos très diversifiées. Des décryptages historiques, comme celui du procès de Klaus Barbie (14 700 vues) ou celui du procès de Riom (52 00 vues). « Cela correspond à un plan patrimonial et historique ce qui permet de ressortir des archives qui sont en notre possession », nous explique Charlotte Hildebrand. Des vidéos sur les dessous du métier d’avocat avec une vidéo sur le rôle du bâtonnier ou de la bâtonnière non dénué d’humour (4 324 vues), l’histoire derrière la maison du barreau de Paris sur l’Île de la Cité (10 100 vues) et trois vidéos très pédagogiques sur le droit de grève (929 vues) et la fête de la musique (4 428) qui consistent en des « décryptages juridiques ou le Barreau vulgarise le droit sur des sujets de société »(tout en se gardant d’entrer dans des sujets pouvant être considérés comme polémiques). Celle sur le harcèlement scolaire n’a été vue que par 632 personnes même si elle vise justement le public cible de la démarche.
Créer des vocations ?
« Montrer les dessous du métier d’avocat, de ses missions, est le troisième volet de notre présence sur TikTok : on a eu des élections au bâtonnat et on a publié un contenu sur le rôle du bâtonnier, on souhaite s’inscrire dans le rythme de la profession et montrer aussi la vie quotidienne des avocats », soutient Charlotte Hildebrand.
« Nous sommes fiers d’être le premier barreau de France à investir cette plateforme et de démontrer ainsi la modernité de notre Ordre et notre capacité à varier nos canaux de communication. À sa manière, ce projet s’aligne sur notre objectif de replacer le droit au cœur du débat public », soutient la Bâtonnière, Julie Couturier. L’île-de-France reste la région la plus riche en avocats (34 000) et compte le département le plus jeune de France métropolitaine (la Seine-Saint-Denis) : le barreau de Paris va -t-il réussir grâce à TikTok à montrer à toutes celles et ceux qui l’ignorent encore que la robe n’est pas réservée à une élite et susciter des vocations ? C’est en tout cas l’objectif non déguisé de cette opération séduction.
Référence : AJU009o7