Grand prix de l’ANDRH : une 2e édition au cœur des tendances RH

Publié le 20/02/2024

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Le 30 janvier dernier se tenait la 2e édition du prix de l’ANDRH. Une cérémonie résolument tournée vers les enjeux sociétaux qui se jouent à l’intérieur de l’entreprise et auxquels sont confrontées les directions des ressources humaines.

« Des projets innovants », « audacieux », « loin des pratiques habituelles ». Audrey Richard, présidente de l’ANDRH, s’est réjouie, le 30 janvier, du cru des projets sélectionnés pour cette 2e édition. Des dossiers solides qui, l’espère-t-elle, « résonneront dans les entreprises ». Car l’idée de ce prix est, in fine, le partage de bonnes pratiques. La présidente du jury de cette édition, Élisabeth Moreno, ancienne ministre de l’Égalité entre les femmes et les hommes, a montré un réel enthousiasme à embrasser ce rôle : « votre rôle est d’engager le changement », a-t-elle lancé. Car les RH sont au cœur des entreprises, elles-mêmes au cœur des évolutions sociétales. Pour l’ancienne ministre, « l’entreprise est l’espace collectif le plus puissant après la famille ». Et les choses changent : il y a dix ans, nombre de sujets n’y étaient pas abordés, jugés comme relevant du privé ou n’étant pas encore visibles. Or c’est précisément là qu’on attend désormais les entreprises. C’est cette « responsabilité sociétale » qui était déclinée par les quatre catégories de prix choisies par l’ANDRH : Prix Diversité et inclusion, Prix RH & Environnement, Prix du Care et Prix RH & Business.

Un prix en lien avec les évolutions du métier

Des catégories bien en lien avec la réalité des RH ? Pas de doute pour Vincent Binetruy, managing director chez Top Employers Institute, qui a livré son analyse des grandes tendances RH pour 2024. Résultat de l’audit mené : les enjeux portés par les prix ANDRH font bien écho au quotidien de la profession. Sur la diversité, l’inclusion et l’équité, le sujet est même « élargi » par rapport à la segmentation habituelle (femmes/ hommes, Gen Z et seniors…) avec de plus en plus de profils peu habituels, « comme les talents neurodivergents ou des candidats avec des casiers judiciaires ». Les enjeux environnementaux permettent de « mieux s’engager pour préparer l’avenir ». À ce titre, les dirigeants doivent comprendre que pour garder des collaborateurs, ces derniers ont besoin de trouver du sens. Lorsque le « management, le leadership sont bons, le niveau d’engagement est supérieur », a-t-il rappelé. Sur la notion de « care », il s’agit d’assurer l’efficacité des initiatives en matière de bien-être. À ses yeux, nul besoin de multiplier à l’infini des programmes de bien-être. Il prône plutôt du sur-mesure, plus efficace pour coller aux besoins des collaborateurs et moins coûteux pour les entreprises. Enfin, la perspective business se traduit par deux axes principaux : développer le potentiel économique des entreprises grâce à l’IA générative et mieux dialoguer en interne pour les transformer de l’intérieur.

« Les discriminations existent encore »

Du chemin a été parcouru, certes mais, a rappelé Laetitia Naudeau, GDA de l’Apec, même chez les cadres qui bénéficient pourtant d’un marché de plein-emploi, les discriminations existent encore. C’est le cas par exemple des candidats issus des quartiers prioritaires de la ville, pour qui, à diplôme équivalent, l’accès à l’emploi reste plus difficile, avec davantage de contrats courts, moins de responsabilités et de bons salaires. Et cet écart salarial est très difficilement résorbable tout au long de la carrière. De l’autre côté de la chaîne, chez les seniors, les stéréotypes sont encore très persistants : ils manqueraient de flexibilité, seraient technophobes, difficiles à manager… Mais non, à 55 ans ils ont « encore un quart de leur carrière devant eux », a souligné Laetitia Naudeau. « À nous DRH de lutter contre ces stéréotypes », en plus des actions de l’État, des associations et bien sûr, des entreprises, grandes entreprises en tête, qui ont les moyens de « tirer tout le système ».

Majda Vincent, DRH Sodexo France a ajouté : la France est riche de sa diversité. Une diversité utile « pour stimuler l’innovation et la performance ». Dans une période de tassement économique, de polarisation sociale, « célébrer la diversité est vital ». Le défi se présente aussi pour les entreprises : « notre rôle est de contribuer à un monde plus inclusif ». Les chiffres parlent : quand diversité il y a, la profitabilité grimpe de 30 %, avec moins de turn-over et des entreprises plus performantes, innovantes et attractives.

Les deux finalistes étaient : CGI, qui a constitué une équipe d’athlètes handisport permettant de fédérer leur écosystème autour des valeurs du sport, de la diversité et de l’inclusion, et Ikea avec son programme : #VivreEtGrandirEnsemble, qui vise à accompagner 180 personnes réfugiées vers l’emploi dans les unités IKEA France en trois ans. C’est finalement Ikea qui a remporté le prix. Olivier Gondry, DRH Ikea France, Claudie Touzé, people & Culture Market Manager et Lise Werle, Country Equality, Diversity & Inclusion Leader se sont réjouis de ce prix, qui honore un programme permettant une employabilité rapide et durable des personnes réfugiées. Ce projet « donne un sentiment de fierté » ainsi qu’une vraie « cohésion » aux équipes, ont-ils assuré.

« Sur l’environnement, tous les DRH doivent monter en compétences »

Présentant les enjeux RSE, Catherine Flouvat, learning and development RSE chez Orange, s’est réjouie de la place accordée à ce sujet dans son groupe, encore invisible il y a quelques années. À ses yeux, les responsables RSE sont des « alliés de la réussite ». Chez Orange, elle cherche à mettre en place une « acculturation de tous les métiers » aux sujets comme le Net zéro carbone, l’écoconception, la sobriété énergétique. Data analyst, financiers, ingénieurs… tous les métiers sont concernés. « Tout le monde doit porter ces enjeux », pas seulement les responsables RSE.

Les finalistes Ecovadis et Pau Béarn Habitat se disputaient le Prix RH et environnement. Pau Béarn Habitat a remporté le prix pour la mise en place d’un projet d’entreprise visant à accompagner les évolutions de la société dans une démarche de développement durable (pratiques plus vertueuses en interne pour les collaborateurs et en externe avec un accompagnement de leurs locataires : programme de réduction des déchets, de leur empreinte carbone et mise en place d’aménagements durables…). Le tout, dans une démarche de reproductibilité, qui n’a pas manqué de séduire le jury.

« Les employés comptent sur les entreprises pour veiller à leur bien-être »

Le Care, vaste sujet, et de plus en plus présent, pour Aurore Rougeot, directrice de Bessé Protection Sociale. Au-delà des obligations légales, Soléna Busson-Mars, DRH et gestion Grand Ouest chez Radio France, a précisé que les jurés avaient été particulièrement attentifs aux entreprises qui « allaient au-delà du minimum légal ». Car les entreprises peuvent faire plus, comme en témoignent les dispositifs existant pour les malades de cancer, faciliter la vie des aidants, recueillir les traumatismes liés aux violences intrafamiliales dans les entreprises…

Deux finalistes s’affrontaient : Coopérative U Enseigne proposait la mise en place du dispositif « Gestion et prise en charge des équipes après un attentat » et de celui en faveur de la lutte contre les violences conjugales et intrafamiliales nommé. La maison de retraite associative Village Terre-Nègre présentait un programme « La blouse sans le blues », qui a baissé fortement le turnover chez les soignants et amélioré la prise en charge des personnes âgées.

Système U (Ingrid Crambes Tisserand, DRH de Coopérative U Enseigne et son équipe ; et Satya Goetz-Lancel, Responsable gestion de crise Magasins U) ont gagné le prix du Care. « La grande nouveauté de ces dernières années, c’est que nous pouvons nous mêler de ce qui se passe à la maison ! », a lancé Satya Goetz-Lancel.

Sur le point des violences faites aux femmes, l’ANDRH avait d’ailleurs pris position en lançant, avec ONU Femmes France, un guide à destination des RH et managers. À ce titre, Céline Mas, sa présidente, a rappelé que « 48 % des salariés déclarent être en détresse psychologiques ». DRH, un « métier difficile », parfois des « paratonnerres » pour les collaborateurs, qu’elle espère voir se recentrer encore sur la matière humaine grâce à l’IA.

« Les RH ont un rôle essentiel à jouer pour la performance de l’entreprise »

La fonction RH est au cœur de la transformation des entreprises, comme l’a souligné Anne Cagnard, consultante RH, prenant en compte des enjeux aussi importants que sauver des emplois, développer l’international ou fidéliser des collaborateurs. Les postes à dimension commerciale ont aussi leur rôle à jouer.

Des deux finalistes, Groupama et Vibratec, c’est Groupama, qui a gagné avec son « Groupama Bootcamp Innovation », un dispositif permettant à des collaborateurs d’appliquer des méthodes d’incubation de start-up pour accélérer les phases d’idéation ou de maturation de leur projet. L’objectif de ce programme est de soutenir la transformation digitale du groupe et de favoriser l’innovation. Laurent Bekaert, directeur communication employeur, interne et RSE, s’en est réjoui : « une grosse entité comme la nôtre » a besoin d’aller vers plus de « transversalité, d’horizontalité », de se transformer. Le bootcamp permet ainsi de « sortir du cadre », dans un mouvement gagnant-gagnant : des salariés engagés, une entreprise qui évolue. « 80 % des projets développés dans notre bootcamp ont une suite dans l’entreprise », a précisé Jacques-Olivier Guichard, Business Partner Transformation Digitale.

Enfin, le grand prix a été rendu, véritable coup de cœur, à CGI et son équipe d’athlètes en situation de handicap. CGI « s’engage à les accompagner pour leur permettre d’atteindre leurs objectifs lors des prochaines grandes compétitions mais également au-delà de l’exploit sportif, de s’épanouir humainement et professionnellement grâce à un programme de formation pour préparer l’après-carrière, des formats interactifs et promotionnels valorisant leurs compétences… Dans l’entreprise, les effets, évoqués par Benoît Froment, DRH de CGI, de Marie-Pascale Grenu, Health & Well-Being Manager et Roxane Leib, chargée de missions RSE, diversité et inclusion, sont concrets. Reconnaissance des travailleurs RQTH, environnement de travail solidaire, meilleure équité et inclusion… « Le handicap n’est pas forcément une vulnérabilité, c’est aussi une force », s’est enthousiasmée Élisabeth Moreno.

Pour conclure, Hervé Solus, Head of Talent Software division chez Cegid, a livré un discours d’espoir. Depuis le développement du concept de « marque employeur » dans les années 2010, les notions d’inclusion se sont invitées au sein des entreprises, a-t-il résumé, que ce soit l’égalité femmes-hommes, l’inclusion des personnes en situation de handicap ou les profils plus variés. Pour lui, une chose est sûre : « le moteur de tout, c’est l’humain ». Ce n’est pas l’ANDRH qui dira le contraire…

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